Chapitre 27. ModEélisme

Apprendre au travers de l'imitation et de l'observation des autres

“On devrait faire quelque chose,” dit Charlie avec inquiétude, quittant la cuisine pour se diriger vers la source des sanglots.

Alan attrapa son jumeau par la manche et le tira en arrière. “Non, il ne faut pas,” dit-il fermement.

“Alors tu devrais faire quelque chose. Alan, ça fait plus d'une heure,” dit Charlie, presque suppliant.

Alan attira Charlie dans une douce étreinte et secoua la tête. “Ca va prendre bien plus d'une heure. Il faut les laisser. Ils font des progrès.”

Un fracassement en provenance du salon disait le contraire. “Ne me touche pas !” hurla l'un des jeunes jumeaux, la voix cassée par les cris qu'elle avait déjà émis.

“Alan, ce n'est pas du progrès. Comment peux-tu les laisser se faire ça l'un à l'autre

Charlie n'avait pas les nerfs pour ça. Il avait écouté ce qui s'était dit durant toute cette dernière heure, les chuchotements virant aux cris puis aux sanglots. Pendant tout le temps, Alan était resté assis à la table de la cuisine, sirotant un café noir en feuilletant un journal. Si Charlie n'avait pas aussi bien connu son jumeau, il l'aurait cru insensible. Cela ne faisait qu'un jour que Charlie connaissait les jumeaux Kaulitz, mais il avait toujours été quelqu'un de très empathique. Il ne pouvait pas supporter de voir les autres souffrir. En fait, Alan n'y arrivait pas non plus, mais il s'y était habitué. "La douleur est une condition pour pouvoir vivre," disait souvent le conseiller.

"Il faut qu'ils le fassent par eux-mêmes," insista Alan.

La bataille ne semblait peut-être pas être un progrès pour Charlie, mais Alan savait que ç'en était pourtant un. Les jumeaux avaient commencé par parler à voix très basse, en chuchotant, tournant autour du pot et retombant dans leurs vieilles habitudes. Alan n'avait pas besoin d'un miroir sans teint pour voir la scène familière se dérouler. Les jumeaux essayaient de se reconnecter et de se réconforter l'un l'autre, mais les dégâts étaient bien trop importants pour que de petits baisers et des excuses vides ne les réparent. Avec le docteur Amsel qui avait joué les cruels marionnettistes, Bill et Tom s'étaient infligés des blessures profondes et avaient rompu une relation qui avait toujours été bâtie sur des fondations instables.

De jolis mots ne pourraient pas réparer les choses cette fois-ci. Les jumeaux avaient besoin de hurler et de crier jusqu'à ce que leurs voix soient cassées et qu'il ne reste plus rien à dire. Alan n'aurait pas pu être plus fier que Bill ait enfin réalisé qu'il ne pouvait pas juste laisser Tom le prendre dans ses bras et le caresser pour éloigner la douleur. Il avait laissé son frère tricher et s'en tirer sans parler pendant trop longtemps.

Un autre sanglot angoissé résonna dans la maison. "Tu as rompu ta promesse ! Tu avais promis que tout irait bien."

Le cri qui vint comme réponse était empli de toute la souffrance réprimée que l'aîné des jumeaux retenait depuis des années. "Toi aussi ! Tu l'as écouté. Tu l'as laissé t'enlever à moi. Je t'ai dit que je n'arrêterai jamais de t'aimer, quoi qu'il puisse dire. Tu ne m'as pas écouté… Pourquoi est-ce tu as pas pu juste m'écouter ?" La voix de Tom était désespérée et suppliante.

Charlie eut un moment de recul puis laissa sa tête retomber contre l'épaule de son frère, certain qu'il était en train d'assister à la fin d'une relation. Alan tint fort son frère et soupira, sachant qu'il assistait à la naissance d'une nouvelle relation.

~**~

Les jumeaux s'assirent sur le sol du salon, une pile de mouchoirs froissés devant eux et des éclats de verre derrière eux. Bill n'avait pas eu l'intention de pousser Tom aussi fort, mais ça n'avait pris qu'un petit trébuchement pour que la lampe ne tombe de sa place sur la table où elle reposait en équilibre précaire. Ils s'étaient juste battus jusqu'à ce que Bill ne sache plus quoi dire et ne s'accroupisse pour ramasser les débris de verre. L'un des éclats tranchants l'avait coupé au doigt et soudainement la bagarre s'était arrêtée.

A présent ils étaient assis au sol, la main de Bill dans celles de Tom tandis que celui-ci pressait un mouchoir contre la blessure et essayait d'arrêter le saignement. Bill attrapa un autre mouchoir dans la boîte presque vide et essuya les larmes de son visage avec sa main valide. Il ne ressemblait plus à rien. Son visage était enflé, ses yeux rouges, et il avait de la morve qui lui coulait du nez, ce qui était particulièrement peu ragoûtant. Tom n'était pas en meilleure forme et pour une fois, ils avaient vraiment l'air identiques.

Bill siffla de douleur lorsque son frère retira le mouchoir ensanglanté et regarda la blessure, mais la vérité des accusations de Tom était bien plus douloureuse que la petite coupure. Bill leva les yeux vers son frère et renifla un peu. "Je ne voulais pas," chuchota-t-il.

"N'empêche que c'était idiot de ta part de ramasser du verre à mains nues," répondit Tom tandis qu'il repressait le mouchoir contre la blessure et serrait, tirant un petit gémissement à Bill. Tom garda les yeux sur sa main. Il ne pouvait gérer que le fait de regarder les blessures physiques, pour le moment.

"Je ne parlais pas de la coupure..."

Tom leva les yeux avec hésitation pour aller rencontrer ceux de son frère. Il mordilla nerveusement son piercing à la lèvre en l'aspirant dans sa bouche, puis il soupira. "Moi non plus," répondit-il.

Une lourde tension pesait sur eux tandis que leurs torses s'abaissaient et se soulevaient en harmonie, leurs respirations anxieuses. Les bons mots étaient sur le bout de leurs langues, mais les deux jumeaux avaient du mal à leur insuffler leur souffle. De savoir qu'ils étaient à un embranchement qui pourrait les mener dans deux directions très différentes rendait extrêmement difficile de faire un pas, dans quelque direction que ce soit.

Etrangement, ce fut le jumeau le plus silencieux qui trouva le courage de parler en premier. "Je suis désolé," chuchota Tom, ne trouvant qu'une toute petite inspiration à insuffler à de si grands mots. Ce n'était pas de nouvelles excuses creuses prononcées pour faire finir la dispute. Tom comprit que ses excuses constituaient le début de la discussion, et non sa fin.

Un silence tendu régna pendant un moment tandis que Bill fixait son jumeau, incertain d'avoir entendu correctement le murmure à peine audible.

"Je sais," finit par murmurer Bill. Ce n'était pas la réponse que Tom avait espéré, mais Bill n'avait pas la force de dire quoi que ce soit de plus.

Tom ferma les yeux et déglutit avec difficulté, se battant pour trouver en lui la force d'avoir cette conversation. Il savait que ce que Bill voulait, c'était des excuses pour avoir brisé la promesse qu'il avait faite, mais Tom ne pouvait pas les présenter, ces excuses-là. Il avait promis à son jumeau que tout irait bien, et il l'avait pensé. Peut-être que tout n'allait pas bien en cette minute précise, peut-être que tout n'allait pas bien depuis des semaines, mais à la fin, tout finirait par aller bien. Tom espérait juste que cela ne leur prendrait pas autant de temps que cela n'en avait pris à Alan et Charlie.

Tom leva les yeux et rencontra le regard de son frère, le soutenant pendant un moment tandis qu'ils rétablissaient une connexion perdue depuis des mois. "J'essaye encore de respecter ma promesse," dit-il.

La lèvre de Bill trembla, sa poitrine le brûlant tandis qu'il essayait de retenir de nouveaux sanglots. "Je ne voulais pas," répéta-t-il, la voix serrée par les émotions portées par ses mots.

"Je sais," chuchota Tom en retour.

Le silence régna de nouveau, mais cette fois-ci il était dénué de toute tension. Leurs poitrines se soulevaient et s'abaissaient lentement, leurs respirations profondes. Tom saisit la main de Bill et entrelaça leurs doigts. Ils ne retomberaient pas dans la veille habitude de recouvrir les blessures sentimentales d'un bandage d'intimité, mais il était intolérable d'éviter de se toucher l'un l'autre quand tous deux souffraient à cause de leurs cœurs brisés à l'idée d'avoir presque perdu l'autre.

Bill hoqueta doucement à cause de tous ses pleurs et Tom faillit vraiment rire à la façon dont les petits hoquets secouaient le corps de son frère. Il était étrange de trouver quelque chose de drôle en un moment aussi sombre, mais sous tout ce chagrin, il y avait dans le cœur de Tom la joie de savoir que Bill non plus n'avait pas abandonné.

"Ce n'est pas drôle," geignit Bill, ayant lui-même un petit sourire malgré sa protestation.

Les hoquets de Bill ne durèrent que quelques minutes, et tandis qu'ils s'estompaient, le sérieux de la situation refit surface. Bill soupira doucement, ses épaules s'affaissant. Tout ce qui avait besoin d'être dit avait déjà été crié de toute la force de leurs poumons, mais Bill n'était pas sûr qu'ils se soient entendus l'un l'autre. Il n'en était pas sûr, mais c'était peut-être le but de hurler en fait. Parfois ils avaient juste besoin de hurler.

"Je suis désolé de ne pas t'avoir écouté," murmura Bill, ses pouces caressant le bout des phalanges de Tom tandis qu'il tenait sa main.

Tom fixa leurs mains et se mordit la lèvre, choisissant ses mots avec soin avant de parler. "Je t'ai promis que je n'arrêterai jamais de t'aimer. J'aurai juste aimé que tu me croies," admit-il, avec de la tristesse plutôt que de la colère dans la voix.

Bill hocha un petit peu la tête. Il aurait souhaité la même chose, mais souhaiter n'allait pas effacer son manque de foi et les dommages qu'il avait causés. "Je ne savais plus ce qui était réel. Je ne savais plus quoi croire et quand j'allais vers toi, tu me repoussais."

Les épaules de Tom se tendirent mais il résista au besoin de retirer sa main. Cela faisait tellement mal de savoir que la foi de Bill et son amour pour lui pouvaient être aussi facilement balayés alors que son propre amour pour Bill était tellement, tellement fort. "Je ne savais pas quoi croire moi non plus. Mais pourtant je n'ai jamais cessé de t'aimer, et je ne croyais pas toutes ses conneries quand il essayait de me dire que je ne t'aimais pas. Comment as-tu pu croire ça ?" demanda-t-il, le calme de sa voix s'évanouissant et se faisant accusateur sur la fin.

Bill inspira en tremblant et de nouvelles larmes commencèrent à dévaler ses joues de nouveau. La culpabilité qu'il ressentait était presque insupportable. "Il a dit que tu n'avais jamais voulu être avec moi. Il a dit que tu voulais juste que je t'aime comme un frère, alors j'ai essayé. J'ai essayé, Tomi, mais alors tu ne me laissais même plus t'aimer de cette façon-là. Tu ne me laissais même pas te toucher," dit Bill, sa voix se fissurant lorsqu'il essaya de retenir un sanglot.

L'hypocrisie de ses accusations frappa Tom d'une manière extrêmement soudaine. Il s'était apprêté à crier sur Bill pour avoir cru aux conneries d'Amsel quand il réalisa soudainement qu'il y avait cru, lui aussi. Il ne n'avait pas laissé Bill le toucher parce qu'il croyait aux mensonges du docteur Amsel, lui aussi. Tom avait succombé à une série de mensonges différente, mais il avait au final été tout aussi faible que son frère.

Tom déglutit difficilement, se sentant coupable maintenant qu'il comprenait combien avoir repoussé Bill avait contribué au manque de foi de ce dernier. Il pouvait maintenant voir que tout cela n'avait été qu'une énorme mascarade orchestrée par le docteur Amsel, et qu'ils n'avaient été que deux marionnettes utilisées pour prouver ses ridicules théories sur la thérapie. Tom ne pouvait pas reprocher à son frère son manque de foi maintenant qu'il savait qu'il avait été tout aussi aisément manipulé.

Bill le fixait, dans l'expectative, attendant d'entendre les explications de Tom qui donneraient la raison pour laquelle il l'avait repoussé alors qu'il avait promis de ne jamais cesser de l'aimer. Tom s'essuya le visage du revers de sa manche et se prépara pour faire la confession qu'il lui fallait avouer.

"Il m'a dit que je ne pouvais plus du tout te toucher," chuchota Tom, rebaissant les yeux vers la main entaillée de Bill pour éviter de voir son expression blessée.

L'esprit de Bill mit un moment à enregistrer l'aveu de Tom, mais quand cela fut fait il retira immédiatement sa main de celle de Tom et se leva. Le verre craqua sous ses pieds tandis qu'il reculait sans y penser. Peut-être qu'ils n'en avaient pas fini avec les hurlements, après tout.

"Tu l'as écouté ? Tu me cries dessus pour l'avoir écouté, mais toi aussi tu l'as écouté ?" dit-il d'un ton accusateur. Bill tremblait visiblement de colère.

La tension revint en un instant et ils emplirent leurs poumons en prenant de profondes inspirations, prêts à recommencer à crier si c'était ce qu'il fallait. Tom se leva et s'approcha de Bill, et ils restèrent debout face à face, les poings fermés et les visages rougis par les larmes. Tom n'avait rien à dire pour sa défense, aussi resta-t-il silencieux et attendit-il simplement que Bill recommence à hurler. Si Bill avait besoin de crier, alors ils crieraient

Bill inspira lentement et desserra les poings, laissant de nouveau ses épaules s'affaisser. Il secoua la tête, déclinant l'invitation implicite de décharger sa colère. "J'en ai fini," murmura-t-il doucement.

Le corps de Tom demeura tendu et il eut soudainement la sensation d'avoir la bouche remplie de coton. Il déglutit difficilement et se força à parler. "Avec quoi ?" chuchota-t-il, effrayé.

"J'en ai fini de laisser les autres nous faire du mal. Le docteur Amsel n'est même pas là et il continue pourtant à tirer les ficelles et à nous manipuler," dit calmement Bill. Il s'approcha de Tom et posa précautionneusement sa main sur son épaule. Quand Tom se détendit légèrement et relâcha la respiration qu'il avait retenue, Bill se pressa un peu plus près et laissa sa tête reposer sur l'épaule de Tom.

Tom enroula prudemment un bras autour de Bill, posant sa main dans le bas de son dos. C'était bon d'avoir de nouveau Bill dans ses bras, mais il hésitait. Les avertissements d'Alan à propos de se réconforter au lieu de faire face aux problèmes pesaient lourdement sur son esprit. Il ne pouvait plus laisser Bill éviter la confrontation. Il fallait qu'il soit sûr que tout serait réglé.

"Alors qu'est-ce qu'on fait maintenant ?" demanda Tom. Le véritable test pour savoir s'ils avaient surmonté tout ça était de voir la manière dont ils procéderaient à partir de maintenant. Leur ancienne façon de faire aurait juste été de faire l'amour et d'oublier ce qui avait pu causer le problème en premier lieu, quoi que ce soit, mais en ce moment précis ce n'était pas une option envisageable. Ils reconstruisaient leur relation depuis ses fondements.

Les yeux de Bill se perdirent dans le vague tandis qu'il réfléchissait et se mordait la lèvre inférieure, se penchant un peu plus vers Tom. Il se rappela de quand ils étaient de tout petits garçons qui avaient réussi à cacher un si gros secret à tous les adultes qui les entouraient, et il aurait aimé être encore aussi malin qu'à l'époque. Mais quelque chose avait changé en chemin, et Bill voulait redevenir celui qu'il avait été.

"On retourne à nos origines," dit résolument Bill.

"Qu'est-ce que tu veux dire ?" demanda Tom.

"Tu te rappelles ce qu'on disait quand on était petits ?" demanda-t-il.

Tom eut besoin d'y réfléchir pendant une minute. Il y avait beaucoup de choses qu'ils disaient quand ils étaient petits. A une époque ils avaient même une langue complète constituée de mots secrets et de phrases qu'eux seuls comprenaient ; leur propre petit langage de jumeaux. Après avoir passé un moment à y réfléchir, Tom réalisa avec exactitude ce à quoi Bill faisait référence.

"Ils ne comprennent pas," commença Tom.

"Ils n'ont pas d'importance," compléta Bill.

Le mantra avait été inventé quand ils n'avaient que six ans et avaient l'impression qu'ils étaient en décalage avec le reste du monde. Bien sûr maintenant ils pouvaient en voir les limites. Les autres avaient de l'importance. Il y avait tout un ensemble de gens qui les regardaient, et ce qu'ils pensaient d'eux avait de l'importance. Si des gens découvraient leur secret, cela pourrait signifier la fin de leur carrière, la perte de leurs amis, ou la destruction de leur famille. Malgré tout cela, Bill et Tom ne pouvaient s'empêcher de se demander combien de douleur ils auraient évité s'ils s'étaient appliqués à suivre ce simple petit mantra et avaient ignoré le reste du monde. Au moins s'ils l'avaient fait Amsel n'aurait-il jamais mis la main sur eux.

Les jumeaux restèrent silencieux tandis qu'ils étudiaient ce mantra et ce que cela voudrait dire de s'y conformer de nouveau. Ignorer le reste du monde et s'aimer en dépit de tout ce qui s'élevait sur leur chemin était très tentant, mais ils n'étaient plus de petits garçons et il était temps d'apporter quelques petites modifications à cette devise.

Tom se mordit la lèvre et regarda son frère, soutenant son regard pendant un moment. "Ca paraît vraiment une bonne idée, Bill. Je veux dire… ce serait génial s'il n'y avait que nous deux, mais tu sais bien que ce n'est plus possible, pas vrai ?" dit-il, décidant qu'il devait être celui qui avait à enfoncer les portes ouvertes.

"Je sais," soupira Bill, qui aurait pourtant aimé que cela le soit. "J'aurais aimé que ce qu'ils pensent ne compte pas, mais ils ont du pouvoir sur nous. Il faut qu'on obéisse ou alors ils nous enlèveront tout."

"Il n'y a pas que des mauvais côtés pourtant. Il y a des gens qui ont de l'importance, mais il y a aussi d'autres gens qui comprennent," dit-il, faisant un geste de la tête en direction de la cuisine. Il sourit légèrement à son frère et le serra un petit peu. "On peut recommencer à s'aimer comme si personne d'autre ne comptait. Alan et Charlie y arrivent et je sais que nous aussi on peut y arriver," dit-il, ayant vraiment l'air d'avoir de l'espoir pour la première fois depuis un très long moment, et d'être plus mature qu'il ne l'avait jamais été.

Bill sourit et resserra sa prise sur son frère, se pressant tout contre lui et savourant la chaleur de leur reconnexion. "Tout ira bien pour nous ?" demanda-il.

"Oui, tout ira bien pour nous," promit Tom.

~**~

Dans la cuisine, Charlie se penchait vers la porte pour écouter la conversation chuchotée et essayait de ne pas se montrer trop émotif face à ce qu'il entendait. Alan n'avait jamais perdu l'habitude de le charrier quant au fait qu'il ait la larmichette facile, et Charlie ne voulait pas que son frère gâche le moment en balançant des moqueries concernant son émotivité. Charlie essuya quelques larmes vagabondant sur ses joues du revers de sa manche et se tourna pour trouver Alan en train de feuilleter son carnet d'adresses, les sourcils froncés.

"Qu'est-ce que tu fais ?" demanda Charlie, venant se placer derrière son frère pour regarder par-dessus son épaule.

"Il y a encore une chose dont je dois m'occuper," dit Alan tandis que son doigt défilait le long de la liste des noms commençant par A dans son carnet listant ses confrères et ses patients. Au milieu de la liste son doigt s'arrêta et il saisit son téléphone dans sa poche.

Charlie saisit la main de son frère et l'arrêta avant qu'il ne puisse appuyer sur le bouton d'appel. "Alan, tu es conscient que ceci constitue une énorme entorse à ton code éthique, pas vrai ? Tu pourrais avoir des tas de problèmes s'il te dénonce à l'Association des Psychologues d'Allemagne," dit-il.

Alan se contenta d'avoir un sourire rassurant et de serrer légèrement la main de Charlie. "Ce n'est pas mon code éthique, Charlie. C'est le code éthique de l'Association des Psychologues d'Allemagne, et depuis quand est-ce qu'on écoute les règles des autres en ce qui concerne l'éthique, toi et moi ?" demanda-t-il.

Charlie soupira et lâcha sa main, le laissant composer le numéro. Alan porta le téléphone à son oreille et passa son bras autour de son frère. Il faisait pour Bill et Tom ce que quelqu'un aurait dû faire pour eux des années auparavant, et selon les codes éthiques d'Alan, il était clairement en train de faire ce qu'il fallait.

"Amsel," dit Alan quand on décrocha enfin. Il avait la voix dure et sérieuse. "Il faut que nous ayons une petite discussion, vous et moi."

 

FIN

 

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