CHAPITRE 8
Andreas marchait à travers l'école, le lundi, déterminé à trouver Bill et à expliquer pourquoi il n'avait pas appelé. Il avait le sentiment que les jumeaux Kaulitz n'avaient jamais été punis de toute leur vie, et il était un peu embarrassé. Quand il s'assit en français il scruta la classe. Il ne fut pas surpris de voir que Bill et Tom n'étaient pas encore là.
Cependant, il fut surpris de ne jamais les voir arriver.
Andreas sortit la tête basse quand la sonnerie retentit. Il se demandait où étaient les jumeaux. Il se sentait seul sans eux parce que depuis qu'il traînait souvent avec eux, il avait été catalogué comme monstre scolaire, lui aussi. Il s'en fichait, du moins, quand ils étaient avec lui.
Seul, pourtant, il avait du mal à s'en sortir.
Andreas venait juste de sortir quand il sentit une main sur son avant-bras. Il leva les yeux et vit une fille aux cheveux noirs qui lui souriait.
« Salut, » dit-elle, baissant la tête. « Je suis Sara, je suis assise derrière toi en biologie. »
« Oh, salut, » dit nerveusement Andreas. Il sentit ses joues devenir chaudes. « Je t'ai, um, jamais vue. »
« Tu es toujours en train de travailler avec ce Tom, » répondit Sara, pas méchamment. « Il est un peu bizarre. On va en bio ? »
Andreas regarda autour de lui une fois de plus. Il ne vit ni Bill ni Tom. « Ouais, ok. »
« J'aime bien tes nouveaux cheveux, » lui dit Sara. « Tu l'as fait quand ? »
« Bil-» Andreas s'arrêta. « Um, je l'ai fait ce week-end. »
« Cool. » Sara sourit. « Je pense pas, um, que Tom est là aujourd'hui alors peut-être que tu veux qu'on soit ensemble en bio ? »
« Peut-être, » dit doucement Andreas. Elle était la première fille qui lui parlait, et il avait presque oublié à quoi ça ressemblait de parler aux filles. Il le faisait tout le temps dans son ancienne école, avait même déjà eu quelques petites amies. Il ne pouvait pas s'arrêter de penser à Bill, cependant.
Sara était mignonne. Elle était beaucoup plus petite qu'Andreas, et avait des cheveux avec une frange qui lui tombaient au-delà des épaules. Ses yeux étaient verts et son sourire à croquer. Elle avait sur le nez un petit nuage de tâches de rousseur dues au soleil, sur un teint rose. Elle portait une jupe en jean et un court polo rayé. Elle était exactement le type d'Andreas.
« On y est, » dit-elle joyeusement, alors qu'ils entraient en classe, leurs épaules se frôlant. Andreas lui sourit et ils choisirent une table dans le fond. Alors qu'ils attendaient que le cours commence, ils discutèrent, et Andreas découvrit qu'ils avaient beaucoup de points communs.
A la dernière minute, Tom se glissa dans la classe et regarda autour de lui. Il repéra Andreas et Andreas se sentit immédiatement coupable. Il haussa lentement les épaules et Tom haussa juste les sourcils et s'assit à une table vide.
« Oops, » chuchota Sara, gloussant un peu. Andreas fit une grimace et baissa la tête. Il espérait vraiment que Tom ne dirait pas à Bill qu'il s'était assis avec cette fille Sara. Andreas savait que Tom n'était pas comme ça, mais il s'inquiétait quand même.
Quand le cours fut terminé, Andreas dit un rapide au revoir à Sara et courut à l'autre bout de la classe pour rattraper Tom. Il l'attrapa juste quand il sortit de la salle.
« Hey, » dit Andreas, hissant son sac sur ses épaules. « Quoi de neuf ? »
Tom haussa les épaules. « Nouvelle semaine. »
« Ouais, » répondit Andreas. « Vous êtes tous les deux là aujourd'hui ? »
« Yup, tu verras Bill plus tard… Hey, tu arrives à ce que Sara te parle, » dit Tom, souriant. « Ca fait une éternité que j'attends qu'elle vienne me parler. Tu as de la chance. »
Andreas haussa les sourcils et se demanda si Tom savait à propos de Bill et lui. « Ouais, elle est gentille. »
« Mignonne, aussi. Tu lui as demandé de sortir avec toi ? »
Andreas décida que non, Tom ne savait pas. « Non… Je la connais à peine, » dit doucement Andreas. « Qu'est-ce qu'elle a de si formidable ? »
« Aw, tu l'as vue, » dit Tom, secouant la tête. « Elle est carrément craquante. Tu veux venir après l'école ? On va au parc. »
Andreas eut un mouvement de recul. « Um, je peux pas. »
« Quoi ? » Tom leva les yeux, confus. « Pourquoi ? »
« Mon père m'a privé de sortie, » marmonna faiblement Andreas. « Pour une semaine. »
« Ca nous est arrivé une fois, » dit sympathiquement Tom. « Ca craint. Ca n'a pas duré, cependant. Je pense pas que maman est vraiment d'accord avec ce genre de choses. Gordon l'avait suggéré, ils sont souvent en désaccord. »
« Oh. »
« C'est pas grand-chose, » dit Tom, souriant. « Alors peut-être qu'on ira dans une semaine, d'accord ? »
Andreas hocha la tête. La sonnerie retentit, signalant que les élèves se trouvant toujours dans le couloir étaient en retard, et Andreas tressaillit. « Bien… on se voit demain. »
« Ne fais rien que je ne ferais pas, » répondit Tom alors qu'il s'éloignait à reculons, souriant. Andreas leva les yeux au ciel et fit demi-tour pour courir à son prochain cours, les maths. Il avait ce cours avec Bill, et son estomac papillonna légèrement.
Il était vraiment nerveux.
Alors qu'il entrait dans la salle de maths, il sentit quelqu'un lui taper l'épaule. C'était Bill.
« Salut, » dit Bill, souriant.
« Hey, » répondit doucement Andreas. « Ecoute, je suis désolé de ne pas t'avoir appelé. »
« Hein ? » Bill fronça les sourcils. « Quand ? »
« Tu m'as dit de t'appeler hier soir et je l'ai pas fait, » lui dit Andreas.
« Oh… D'accord. C'est ok ! Tom et moi on est allés faire ce truc, je n'avais pas remarqué. On avait ces cigarettes que Georg a eues et on est allés au parc pour les essayer dans notre genre de fort. C'était dégueulasse, mais cool dans le genre. Je pense que je voudrais essayer ça encore. Peut-être quand je serais plus vieux. Genre, quinze ans. » Bill sourit.
Andreas sourit en retour. « Ok, j'avais peur que tu sois énervé ou quelque chose. »
« Nah. Qu'est-ce que tu fais ce soir ? On devrait aller quelque part, » dit Bill.
« Ugh, » gémit Andreas. « En fait mon père m'a puni de sortie. Je peux aller nulle part pendant une semaine. »
« Ew, » murmura Bill. « Qu'est-ce que t'as fait ? »
« Ca, » dit Andreas, montrant ses cheveux.
Bill gloussa. « C'est stupide. Je t'appellerai. »
Andreas secoua la tête, faisant une grimace. « Je peux pas utiliser le téléphone. »
Bill fit un son frustré et tapa du pied. « Ok… Pour une semaine entière ? Qu'est-ce que je vais faire ? » Il fit de grands yeux à Andreas et le cœur d'Andreas se serra.
« Je ne sais pas, » marmonna Andreas, souriant. « Je te manquerai ? »
« Tu me manques déjà, » dit doucement Bill.
Le cœur d'Andreas manqua un battement. « Ouais ? »
Bill hocha la tête. « On trouvera bien quelque chose. »
Le professeur rappela la classe à l'ordre et Bill et Andreas se précipitèrent à leur siège. Andreas jubilait. Il manquait à Bill et Bill voulait être avec lui. Pendant tout le cours Bill continua à le regarder par-dessus son épaule et à sourire. A chaque fois, Andreas baissait la tête et rougissait.
Andreas rentra directement chez lui quand l'école fut finie. Son père n'était pas là mais Andreas s'assit et fit docilement ses devoirs, malgré tout. Il finit à l'heure du dîner et puis fila dans sa chambre pour s'allonger et se détendre.
Il s'ennuyait. Il n'y avait rien à faire à part s'allonger et penser. Il ne pensait qu'à Bill. Il continuait de voir son sourire rayonnant, encore et encore. Dans sa tête il entendait sa voix, forte et perçante, mais douce et délicate en même temps.
Andreas aimait toutes les versions de Bill, et il était juste fou sans lui. Son corps tout entier le démangeait et ses doigts tremblaient du besoin de toucher le visage de Bill. Ses lèvres étaient humides et désireuses de goûter les douces lèvres de Bill. S'il fermait les yeux il pouvait sentir Bill, et l'imperméable jaune était si clair dans son esprit.
Il y eut un faible tapement à la fenêtre d'Andreas. Il s'assit et regarda autour de lui, se demandant ce que ça pouvait être. Il marcha jusqu'à sa fenêtre et toucha la vitre froide. Elle ne cliquetait pas et il n'y avait pas de vent. Andreas chercha à travers l'obscurité extérieure, et regarda vers le bas.
Bill était debout là, et son bras était levé, sur le point de jeter une autre pierre vers la fenêtre d'Andreas. Andreas haleta et ouvrit la fenêtre.
« Qu'est-ce que tu fais ? » chuchota fort Andreas, sentant un sourire se former sur son visage.
« Je te sors de là, » répondit Bill. « Je t'avais bien dit qu'on trouverait quelque chose. Tu peux descendre ?”
Andreas regarda autour de lui. Il pouvait descendre. Il était tard et son père ne viendrait pas vérifier ce qu'il faisait, et faire le mur était vraiment la dernière chose venant d'Andreas à laquelle il pourrait s'attendre. S'il se faisait attraper il ne serait plus jamais autorisé à sortir de nouveau, mais Andreas mourrait d'envie de voir Bill.
« Attends, reste ici, » dit Andreas à Bill.
Bill hocha simplement la tête.
Andreas mit un sweat-shirt et resta immobile un moment. Il pourrait tranquillement filer par la porte de derrière, mais rerentrer en douce serait un bien plus gros problème. Son père était déjà couché et dormait comme une masse. Il y avait plus de chances qu'il ne se réveille pas mais si jamais il se réveillait...
Andreas décida qu'il s'en fichait. Il descendit les escaliers à pas de loup et fit le chemin jusqu'à la porte de derrière. L'ouvrant prudemment, essayant au maximum de ne faire aucun bruit, il se glissa dehors dans l'air froid de la nuit et marcha à travers la pelouse pour rejoindre Bill.
« Tu l'as fait, » dit doucement Bill, souriant.
« Je l'ai fait. J'arrive pas à croire que tu sois venu, » dit Andreas, de l'incrédulité dans la voix. « Je suis trop content que tu l'aies fait. »
« Moi aussi. » Bill glissa sa main froide dans celle d'Andreas et Andreas la serra en retour, s'approchant de Bill. Ils marchèrent en silence, balançant leurs bras connectés d'avant en arrière, jusqu'à ce qu'ils arrivent au parc. Ils s'assirent sur un banc et Bill trembla, se collant si près d'Andreas qu'il était presque sur ses genoux. Andreas enroula juste son bras autour de lui et frotta sa main de haut en bas du côté de Bill, le réchauffant.
« Brr, » chuchota Bill, souriant et embrassant la mâchoire d'Andreas. « La prochaine fois que je sors en douce pour te voir, on retourne chez moi. »
Andreas embrassa chastement les lèvres de Bill et ils se sourirent l'un contre l'autre, appréciant la chaleur. Il y avait un froid humide dans l'air. Bill frotta sa joue contre le visage d'Andreas et ronronna doucement. Andreas regarda attentivement Bill. Ses cheveux étaient décoiffés, tombant nonchalamment autour de son visage, et il ne portait pas de maquillage. Il sentait comme s'il sortait de la douche et Andreas remarqua qu'il portait un pantalon de pyjama.
« Où est ton frère ? » demanda Andreas. « Je pensais que vous viendriez ici ce soir. »
« Il est sortit avec une fille, » dit lugubrement Bill. « Comme d'habitude. »
« Donc tu t'es rabattu sur moi ? » taquina Andreas.
« Ouais, » répondit Bill, tirant la langue. Andreas rit et embrassa encore Bill, glissant sa main plus bas dans le dos de Bill et laissant ses doigts contre la petite bande de peau découverte. Bill haleta et entrouvrit les lèvres, sortant sa langue et l'enfonçant dans la bouche d'Andreas. Andreas suça la langue de Bill et le tira plus près, pressant sa paume à plat dans le dos de Bill et le caressant.
Bill balança ses jambes sur les genoux d'Andreas et l'embrassa avec plus de force. Andreas fit courir une main sur la cuisse de Bill et pressa son genou. Bill gloussa doucement et attrapa la main d'Andreas, entremêlant leurs doigts ensemble et frottant la paume d'Andreas avec son pouce, doucement. L'estomac d'Andreas papillonna et il se retira, hors d'haleine.
« Bill, » chuchota-t-il, étudiant le visage du garçon aux cheveux sombres d'un regard avide. Bill lui sourit en retour et embrassa les articulations d'Andreas.
« Hm ? » Bill pencha la tête et ses yeux marron brillaient.
Andreas ne savait pas quoi dire. Il était si incroyablement envoûté par Bill et voulait lui dire ça, mais il était trop timide. Au lieu de cela il embrassa juste le cou de Bill et Bill ronronna doucement, enroulant ses jambes autour de la taille d'Andreas.
« Restons ici pour toujours, » dit Bill.
Andreas hocha la tête. « Je resterai. »
Bill se balança d'avant en arrière, si léger sur les genoux d'Andreas. « Oui, on y retournera jamais. »
« Ils vont nous trouver. »
« Laisse-les essayer, je m'en fiche. Personne n'y fera attention si je m'en vais, » dit Bill. « On va juste s'enfuir quelque part. »
« Je pourrais jamais te rendre heureux, » dit honnêtement Andreas.
« Tu pourras, » insista doucement Bill. Il repoussa des cheveux des yeux d'Andreas et embrassa son nez. « Tu le fais. »
« Tu me connais à peine, » dit Andreas, souriant.
« Je m'en fiche, » répéta Bill. Il posa ses doigts autour du cou d'Andreas et le massa gentiment. Andreas ferma les yeux et pencha sa tête en arrière. Bill embrassa sa gorge, et Andreas rit sous la chatouille.
« On doit, cependant. Rentrer, » dit tristement Andreas. « Surtout toi, Tom va paniquer. »
« Tu penses ? » Bill se recula et enleva ses jambes d'Andreas, puis s'assit avec ses genoux repliés sur le banc. Andreas laissa une main sur le dos de Bill. « Je dois absolument me tirer d'ici. »
« Tu vas partir, » dit fermement Andreas.
« C'est tellement horrible à l'école, » murmura Bill. « Je sais pas encore combien je peux en supporter. »
Andreas fixa Bill et son cœur se brisa un peu. Un moment Bill avait été enthousiaste et dynamique, plein d'idées et de motivation. Maintenant il était abattu et découragé, renfermé.
« Bien, » dit lentement Andreas, tendant ses doigts sur la matière de la veste de Bill. « Tu vas partir d'ici. Très bientôt, » ajouta-t-il avec assurance. « Alors tu laisseras tout derrière et ce sera un énorme ‘‘Je vous emmerde tous'' que tu adresseras à tout le monde. »
Bill sourit. « Pas à tout le monde. »
Il se pencha en avant et embrassa gentiment Andreas, les yeux ouverts et fixes. Andreas frissonna et leurs mains se joignirent.
« Bill ? »
Ils levèrent les yeux et virent Tom déambulant vers eux, les mains enfoncées dans les poches. Bill lâcha la main d'Andreas et se leva, lui faisant un signe de main.
« Salut, Tomi, » dit-il vivement.
« Je pensais que tu serais peut-être ici, » dit Tom, souriant. Ses yeux tombèrent sur Andreas. « Et toi aussi ? Ton père a laissé tomber l'idée de te priver de sortie ? »
Andreas secoua la tête. « J'ai fait le mur. »
« Je l'ai délivré » dit Bill. « Où est ta copine ? »
« Elle était chiante, » répondit brièvement Tom.
« Connard, » grommela Bill.
Tom leva les yeux au ciel. « Qu'est-ce que vous faites ? »
On flirtait , pensa Andreas.
« Rien, » répondit faiblement Bill, se rasseyant. « Qu'est-ce qui t'as pris tant de temps ? »
Andreas haussa les sourcils. Bill avait attendu Tom ?
« J'ai marché, » dit Tom, sortant ses mains de ses poches et brandissant un paquet de cigarettes fermé. « Regarde, j'en ai rapportées. »
« Excellent ! » s'exclama Bill. « Je pensais que t'avais oublié. »
« Oh, vraiment ? » demanda espièglement Tom, poussant Bill dans l'épaule. Bill couina et tomba, son dos contre le banc. « Tu pensais que j'avais oublié ? »
« Temps mort ! » cria Bill, gloussant. « Je parie que t'as oublié le briquet, par contre. »
« Tu sais que j'ai toujours un briquet, » répondit Tom, exaspéré. Il se tourna vers Andreas et sourit. « Tu veux essayer avec nous ? »
Andreas fronça les sourcils. « Je pourrais probablement pas rentrer chez moi en puant comme ça. »
« Ouais, peut-être. » confirma Tom.
Bill donna un coup de coude à Andreas. « On peut le faire un autre soir. »
Andreas se leva et étira ses jambes. Elles étaient engourdies par sa position précédente. « Non, je devrais rentrer… Mon père a probablement déjà découvert que je suis parti. »
« Je suis désolé, » dit Bill d'une très petite voix.
« Non, ne le sois pas, » dit Andreas, souriant. « Je vous vois demain à l'école les mecs. »
« Bonne chance pour rentrer, » lui dit Tom, allumant spasmodiquement le briquet dans sa main.
Bill hocha la tête. « Bye. »
Andreas s'éloigna lentement, pensant que peut-être Bill le rattraperait. Il ne le fit pas, cependant. Il entendit les jumeaux commencer à rire et parler avec agitation, une conversation rapide qui n'avait de sens que pour eux. Andreas soupira et marcha tout le chemin jusqu'à chez lui.
Les lumières étaient toujours éteintes et tout était silencieux. Son père ne s'était pas réveillé. Andreas souhaita presque qu'il le soit, juste pour que quelqu'un fasse attention à lui. Il ouvrit la porte de derrière et entra, ne se souciant pas d'être silencieux. Quand il monta à sa chambre il s'allongea avec ses vêtements et sa veste, et ferma les yeux.
Il n'en voulait pas à Bill, il n'était pas énervé contre lui. Il comprenait que Tom était tout ce que Bill avait jamais eu, et vice-versa. Ce serait une dure routine à casser. Parfois Andreas avait l'impression qu'il faisait quelques progrès avec eux, mais alors il était durement ramené à l'étape précédente, comme si rien n'avait jamais compté. Comme si c'était inutile d'essayer d'être un troisième.
Il pouvait toujours sentir les lèvres froides de Bill sur lui, l'humidité était toujours là. Andreas se recroquevilla sur le côté et sourit, se remémorant comment Bill l'avait regardé quand il était venu le chercher à sa fenêtre. Il était pressé et excité, voulant être avec Andreas.
Andreas ne pouvait même pas être énervé contre Tom. Il appréciait vraiment Tom. Tom ne savait rien et après tout, les jumeaux avaient des plans pour ce soir. C'était Andreas lui-même qui s'était rajouté, pas Tom.
Il se tourna et s'allongea sur le dos, fixant le plafond. Tout à coup il se sentit étonnamment seul et c'était bien. C'était bon d'être seul. Il se sentit bien parce qu'il savait qu'il ne serait pas seul pour longtemps.
Quand il s'endormit finalement, il rêva de petits imperméables jaunes, d'étranges guitares, et de la voix de sa mère.
**
« Qu'est-ce que t'en penses ? »
Bill était debout devant Andreas à l'école plus tard dans la semaine, souriant. Andreas cligna et plissa les yeux, essayant de chercher la différence.
« Je sais pas, » dit doucement Andreas. « Qu'est-ce que je dois regarder ? »
Bill leva les yeux au ciel et ouvrit la bouche. Dedans il y avait une petite boule de métal brillante sur sa langue. Andreas haleta.
« Alors tu l'as fait ? » demanda-t-il. « Je peux pas croire que tu l'aies fait. »
« Ca fait deux, » dit fièrement Bill. « Un, » il désigna l'anneau sur son sourcil, « et deux. » Il tira la langue.
Andreas regarda autour de lui. Ils étaient dans un couloir bondé, et il y avait des gosses partout autour. Personne ne leur prêtait attention, cependant.
« C'est vraiment sexy, » murmura Andreas.
Bill sourit. « Content que tu le penses. »
« Tu veux sécher les maths ? » Andreas ne pouvait pas s'arrêter de fixer la bouche de Bill.
« Je veux… mais… je peux pas faire grand-chose, » dit Bill, reculant. Andreas pouvait entendre qu'il avait un petit zozotement maintenant, et c'était adorable. « Ca fait mal, tu sais. »
« Quand penses-tu que ça ne fera plus… mal ? » Andreas essayait d'avoir du tact, essayait de ne pas annoncer dans le couloir bondé qu'il mourrait d'envie de flirter avec Bill.
« Je sais pas, ils l'ont pas dit. Tom s'est fait piercer la lèvre ! Ca lui va vraiment bien. » Bill grimaça. « Il a mal aussi. »
« Vous y êtes allé quand ? »
« Hier après l'école. On avait économisé,” expliqua Bill alors qu'ils commençaient à marcher. “Je me ferais un tatouage bientôt, je m'en fiche. »
« Où ? Et quoi ? » Andreas posa sa main sur le dos de Bill alors qu'ils marchaient et puis la retira, pensant que c'était mieux ainsi. Pas devant tout le monde, pas encore.
« Derrière mon cou… je ne sais pas quoi, » dit Bill. « Qu'est-ce que t'en penses ? »
« Votre nom de groupe, » suggéra en plaisantant Andreas.
Bill rit. « C'est débile. Quoi qu'il en soit, je persuaderai ma mère de le dessiner. »
« Elle te laisserait le faire ? » Andreas était stupéfait.
« Elle m'a laissé faire ça, » dit Bill, tirant la langue. Quelques enfants le virent et se moquèrent de lui. Bill leva juste les yeux au ciel. Il portait une veste militaire verte, dont les manches étaient beaucoup trop longues, un pantalon en velours noir avec deux fermetures devant, et des baskets sales. Ses cheveux étaient séparés au milieu et pointaient en arrière, et son maquillage avait été appliqué rudement. « Ouais, séchons les maths. »
« Mais… qu'est-ce qu'on va faire ? » Andreas rougit.
« On pourrait toujours faire ce qu'on fait, » dit Bill, donnant un coup de coude à Andreas. « Juste… attention, tu comprends ? Peut-être qu'on devrait juste partir, c'est le dernier cours. »
« Et pour Tom ? »
« Quoi pour lui ? Allons-y, on avait le plus extraordinaire des repas hier soir. On a toujours les restes, » dit Bill, tirant la main d'Andreas. « Maman n'est pas à la maison, elle est partie en ville pour certains trucs d'art. Je cuisinerai pour toi, » ajouta-t-il doucement.
Andreas rit, fermant sa main sur celle de Bill et se moquant de qui pourrait voir. Il aimait Bill, si fort que ça faisait un peu mal. « Ok, et au fait. »
« Hm ? » Bill regarda par-dessus son épaule alors qu'il tirait Andreas à travers la foule. Andreas marcha un peu plus vite pour que son visage soit directement contre l'oreille de Bill.
« Je peux pas attendre pour t'embrasser que ta langue ne soit plus douloureuse. »
Bill fit un rire aigu et commença à aller plus vite, tirant Andreas en dehors du bâtiment. Quand ils furent à l'extérieur et qu'ils marchèrent jusque chez Bill, ils se tinrent la main tout le long.
FIN CHAPITRE 8