Chapitre 1
Le shooting de la vidéo s'était étalé toute la nuit, et le groupe était fatigué, mais pourtant vibrant d'excitation. Ils avaient rencontré un grand succès avec Durch den Monsun et Schrei , et leur nouvelle chanson, Rette Mich , avait toutes les chances de devenir en hit en un rien de temps.
Tom reposa sa guitare et se retint de bâiller. Il était soulagé qu'ils aient fini de tourner ce clip – ça avait été exténuant d'un point de vue physique et ça l'avait vidé sur le plan émotionnel. Sans parler du fait qu'il était presque deux heures du matin !
Il jeta un œil vers l'autre bout du studio, où son frère, Bill, parlait avec animation avec le bassiste du groupe, Georg. Tom secoua la tête. Aucun d'entre eux n'avait dormi durant les dernières vingt-quatre heures et pourtant voilà que Bill était là comme ça, radieux, débordant pour ainsi dire d'excitation. Tom parvint à sourire malgré sa fatigue et se dirigea vers lui.
Bill se tourna vers Tom tandis que ce dernier approchait, presque comme s'il avait senti Tom venir vers lui, et il lui sourit en retour. Ce n'était pas un banal petit sourire, ou le grand sourire complètement forcé qu'il arborait souvent pour les exécutifs du studio. C'était un énorme sourire estampillé Bill Kaulitz, qui irradiait à mille mètres, et c'était contagieux.
Tom réalisa qu'il s'était mis à sourire plus fort en regardant son petit frère, et il semblait qu'il ne puisse pas s'arrêter, malgré son épuisement. Ils avaient été en tournée, avaient tourné des clips, et répondu sans arrêt à des millions d'interviews, se trouvant constamment en contact avec les médias. C'était quelque chose que Tom n'avait pas anticipé quand ils avaient débuté. Il croyait alors que d'être dans un groupe ne serait que fun, jeux, argent, femmes et excès, mais à présent il connaissait la réalité.
Etre dans un groupe c'était beaucoup de boulot, et c'était quelque chose qu'il n'avait en toute honnêteté jamais envisagé ou désiré pour lui-même.
La main de Bill vint se poser sur son épaule, la serrant doucement, et il croisa son regard brillant. Il ne l'avait jamais désiré pour lui-même, mais il l'avait désiré pour Bill parce que ça avait toujours été et ça restait encore le plus grand rêve de son frère. Bien sûr, Tom aimait la musique ainsi que les voyages, mais ce qu'il aimait encore plus que tout ça était le sourire du visage de Bill et la fatigue satisfaisante et comblante que son frère retirait d'un jour de dur labeur.
\"Tu as trop d'énergie,\" dit Georg, et Tom réalisa qu'ils étaient en plein milieu d'une conversation – c'était juste que Tom n'avait pas fait attention. \"Mais ça serait sympa.\"
\"Qu'est-ce qui serait sympa ?\" demanda Tom, réprimant un nouveau bâillement.
\"David a dit qu'on pouvait aller en boîte !\" dit Bill, se hissant à répétition sur la pointe des pieds, sa main toujours posée sur l'épaule de Tom. \"Un after pour fêter la fin du tournage,\" ajouta-t-il.
\"Oh... vraiment ?\" dit Tom. Tout son corps était courbaturé et il avait l'impression d'être un cadavre ambulant, mais le simple regard dans les yeux de Bill l'empêcha se défiler. \"Okay,\" dit-il. \"Ouais, allons-y.\"
Le sourire de Bill s'élargit un peu plus et quelque chose d'étrange, de presque douloureux, se tordit dans le ventre de Tom. Il essaya de se débarrasser de cette sensation, mais tandis que Bill serrait son épaule et commençait à harceler Georg pour qu'il se joigne à eux, tout en yeux brillants et en longs cheveux de soie noirs, Tom réalisa que ce n'était pas quelque chose qu'il pouvait contrôler. Son cœur bondissait dans sa poitrine et il pouvait à peine supporter de regarder Bill trop intensément. Ca le faisait trembler.
\"Alors, on y va ?\" demanda Gustav, faisant irruption dans leur petit cercle. Bill sautilla et se tourna vers Tom, quelques-uns de ses cheveux venant se coller à ses lèvres luisantes.
\"T'es partant ?\"
Tom ne put que sourire en retour. \"Je t'ai déjà dit que oui. Mais comment ça se fait que tu sois aussi réveillé ?\"
Bill lui saisit le bras et se pencha tout prêt de lui, ses lèvres brillantes si proches de celles de Tom. \"C'est la caféine,\" chuchota-t-il, et Tom se trouva entraîné hors du bâtiment avant qu'il n'ait pu frissonner en réponse.
**
La boîte était bruyante, presque insupportablement, et Tom pouvait à peine s'entendre penser. Une jolie petite brune était pendue à son bras, lui murmurant des insanités à l'oreille en tirant sur ses dreads. Tom trouvait pourtant difficile de lui prêter attention, parce qu'il était pour ainsi dire entièrement focalisé sur quelque chose d'autre.
Bill était sur la piste de danse, sautant partout et dansant de cette drôle de manière si étrange qui n'appartenait qu'à lui. Son sourire était puissant et les gens bougeaient autour de lui, essayant de l'entraîner pour une danse, mais Bill était dans son monde et son sourire était plus éclatant que les lumières disco qui flashaient.
“J'ai adoré Schrei ,” chuchota la fille à son oreille. “Tu étais sexy. Oh, toi, et ton frère aussi. Mon Dieu, vous êtes vraiment très sexy tous les deux.”
Tom hocha la tête, se dégageant légèrement. Elle avait l'haleine chargée d'alcool et il était certain qu'elle avait au moins trois ans de plus que lui.
“Merci,” répondit Tom, en lui faisant un tout petit sourire.
“Et Monsun , mais…” Elle gloussa. “Tu devais avoir quoi, treize ans dans ce clip-là ?”
“Quinze,” répliqua Tom. Et il n'avait à présent qu'un an de plus, mais il avait déjà eu la sensation d'être bien plus âgé que ça au court des six derniers mois.
“Trop mignon,” dit la fille. “Tu veux qu'on sorte d'ici ?”
Tom ouvrit la bouche pour répliquer, mais il jeta de nouveau un coup d'œil vers la piste et vit Bill qui bougeait de lui-même, faisant courir ses mains dans ses cheveux, les yeux fermés. Il avait l'air complètement heureux, et le cœur de Tom se serra un petit peu.
“Je crois pas non,” dit Tom, rencontrant le regard de la fille. “Je dois me lever tôt, et…”
La fille fronça les sourcils, clairement déçue. “Allez, ça prendra pas longtemps…”
Tom grimaça à ce que cette phrase impliquait. “Ouais, ben, je sais pas. Donne-moi ton numéro, je t'appellerai.”
La fille leva les yeux au ciel. “Non, j'ai pas le temps de poireauter en attendant qu'un bébé rock star m'appelle,” dit-elle. Elle se pencha en avant et planta un baiser mouillé sur ses lèvres, et il haussa les sourcils. Quand elle se retira, il sentit un goût de whisky sur ses lèvres. “Et arrête de te prendre la tête comme ça.”
“Salut,” répondit bêtement Tom.
Il ne la regarda pas s'en aller, il se contenta de fixer son regard devant lui, sur son petit frère au milieu de la piste. Bill dansait à présent avec Gustav, ou alors Gustav essayait de donner une nouvelle bière à Bill tandis que celui-ci tentait de l'entraîner dans un slow. Tom sourit, sentant l'alcool se rependre dans tout son corps, le rendant encore plus somnolant, les yeux lourds.
Il prit une longue gorgée de sa vodka-Red Bull et rit à la pensée que la vodka remplissait bien son office, contrairement au Red Bull. Il se pencha en arrière dans son box, appuyant la tête contre le cuir froid, et il laissa cette sensation le submerger.
L'alcool fit que l'étrange sensation un peu douloureuse dans son ventre se radoucit un peu, se changeant en quelque chose de chaud. Il sentit qu'on s'asseyait à côté de lui et entendit le cuir crisser. Tournant la tête, il se retrouva nez-à-nez avec son frère et ils sourirent tous les deux.
\"T'es complètement déchiré,\" dit Bill, faisant se rencontrer leurs fronts. \"Où est ta nana ?\"
\"Juste ici,\" dit Tom, tirant sur une longue mèche des cheveux de Bill. Celui-ci lui tapa la main, son rire parvenant à s'entendre au-dessus des basses rugissantes.
\"Je vois que tu te lasses pas de cette blague,\" dit Bill. Tom essaya de rire mais sa tête bouscula légèrement vers l'avant et leurs nez se cognèrent doucement. \"Oh, Tomi. Il va falloir qu'on te mette au lit. Quel lit tu veux ? Si tu veux je peux aller te rechercher cette fille...\"
Tom secoua rapidement la tête, ses dreadlocks venant leur fouetter les joues. \"Il faut que je sorte,\" dit-il. \"Pour dessoûler un peu.\"
\"Très bien,\" dit Bill en se levant. \"Allons fumer une clope.\"
Tom se leva, chancelant, et se saisit d'un bout du t-shirt doux et serré de Bill. Il le suivit vers la sortie, trébuchant sur son jean et frissonnant lorsque ses articulations caressaient le dos nu de Bill. Sa peau était plus douce que le t-shirt. Ce dernier était un vintage, plus vieux que Bill, et Tom en étira le dos tandis qu'ils marchaient.
L'air froid le frappa de plein fouet, au point qu'il faillit rentrer dans un mur. Les lumières de la rue se reflétaient dans les cheveux de Bill et donnaient l'impression que ses yeux étaient deux pierres d'ambre. Tom eut une révélation, mais elle s'évanouit lorsque Bill lui colla une cigarette entre les lèvres.
Il ne se rappelait de rien, mais inspira et laissa la nicotine envahir ses poumons.
**
“Putain j'ai faim,” marmonna Bill, la bouche pleine de frites. Il attrapa son coca et prit une longue gorgée, laissant aussitôt échapper un rot, ce qui le fit rire.
Tom leva les yeux vers son frère et prit une des frites du plat, qu'il mit dans sa bouche. Bill lui tapa sur la main.
“Commande-toi les tiennes !” plaisanta Bill.
“Comme si tu allais manger tout ça,” dit Tom en levant les yeux au ciel. Les jumeaux étaient assis sur un lit dans leur chambre d'hôtel, littéralement cernés par la bouffe. Bill avait commandé l'intégralité du menu du room-service, en revendiquant, “Je suis une rock star, je peux me le permettre maintenant !” et envoyant ainsi une longue commande à traiter aux pauvres gens qui trimaient en cuisine.
Il était presque cinq heures du matin à présent, et le Red Bull de Tom avait enfin fini par se manifester, mais la vodka avait pratiquement été éliminée de son système. Il se sentait douloureusement conscient de tout ce qui se passait, et il ne tournait plus qu'à la caféine maintenant – une sorte de sensation de réveil artificiel, qu'il n'avait jamais vraiment aimée.
“Qu'est-ce qu'on regarde après ?” demanda Bill, avalant la dernière gorgée de son coca. “Je sais ! On pourrait genre se payer un porno marrant. Tu aimes ça, pas vrai ?”
L'estomac de Tom se retourna. “Nan, faisons autre chose.”
“Tout ce que tu veux,” dit Bill d'un air aguicheur. Il saisit un sandwich au steak et l'étudia de près. “Je sais même pas ce que c'est que ce truc.”
Tom sourit. “C'est un steak, idiot. Mais en sandwich.”
Bill hocha la tête, appréciateur. “Géant.”
“Un traitement de rock star rien que pour toi.”
“Sans blague.” Bill prit une bouchée avec hésitation et fit la grimace. “Ugh, dégueu, je déteste. Tomi,” dit-il après avoir repoussé l'offensant sandwich. “Comment ça se fait que tu sois pas allé avec cette fille ? Je t'ai vu avec elle… Elle se jetait littéralement sur toi.”
“'Sais pas, je le sentais pas,” dit Tom. “J'étais fatigué.”
Bill prit appui contre la tête de lit et sembla penseur. “Oh, je vois.”
Tom se saisit du sandwich mis de côté et en prit une bouchée bruyante, faisant rire Bill de ce rire aigu qui ne pouvait que vouloir dire qu'il était un peu éméché. \"Qu'est-ce que tu regardes ?\" demanda Tom, la bouche à moitié pleine.
Bill fit semblant de vomir et se rallongea dans les coussins moelleux. Il changea de chaîne et passa sur une pub exécrable qui vantait les mérites d'un vélo d'appartement qui avait plutôt l'air d'un instrument de torture.
\"Je vois...\" Bill baissa le son et se blottit sur le côté, regardant Tom. \"Tomi.\"
\"J'ai toujours su que c'était toi le plus malin de nous deux,\" taquina Tom. Bill sourit et dégagea une douce mèche de cheveux de son visage, ses paupières se fermant de sommeil. L'estomac de Tom se tortilla plaisamment et il se pencha en avant pour toucher les joues chaudes et rosies de son frère. Le sourire de Bill se fit tout petit et un doux son de contentement s'échappa de ses lèvres.
Bill bougea, sa tête tombant en avant, et sa respiration s'approfondit. Il s'était endormi, et la main de Tom était bloquée entre la chaude joue de Bill et l'oreiller.
La sensation si plaisante dans son ventre devint soudainement tranchante et effrayante, et Tom retira sa main, tombant presque du lit. Il fixa Bill, roulé en boule, si petit et doux et parfait, et il prit deux profondes inspirations avant de jurer.
Il était amoureux.
De son frère.
Il était amoureux de Bill et il n'y avait pas moyen de le nier. Bill soupira de nouveau de contentement dans son sommeil et Tom eut mal aux bras sous l'envie qui le saisit de le prendre contre lui.
Tout en lui le faisait souffrir en vérité, et il se roula en boule à l'autre côté du lit, la télévision émettant de la lumière en faisant apparaître d'étranges ombres sur le mur, et il pensa qu'il pourrait aussi bien mourir plutôt que de supporter cette sensation.
**
Tom se réveilla bien trop tôt au son d'une alarme rugissante, et il roula sur le dos, bloqué dans les couvertures. Il avait mal à la tête, mal au dos, et mal au bras qui était écrasé sous le corps de son frère. Bill se pencha au dessus de lui, frappant le réveil afin de faire cesser le bruit tonitruant, et il écrasa ensuite Tom de son corps.
"Tu es doux et moelleux," coassa Bill, câlinant Tom, son souffle chaude et humide contre le cou de Tom.
Les sensations se rappelèrent si vite à Tom qu'il se tordit et repoussa Bill de sur lui.
“Pas moyen,” répliqua rapidement Tom, les oreilles chaudes. “Doux et moelleux ? Va te faire foutre, Bill !”
Bill rit. “Ouais, bon, bien sûr que non, mais tu fais un bon oreiller.”
Tom soupira. Il n'était pas étrange pour eux de se réveiller dans le même lit. Quand ils étaient plus jeunes, ils partageaient souvent leurs lits et ces derniers temps, alors qu'ils étaient de plus en plus souvent loin de chez eux, ils avaient assimilé le fait de dormir dans le même lit à un moyen de trouver du réconfort. Tom savait qu'ils finiraient bien par arrêter un de ces jours, mais pas dans un futur proche, aussi avait-il décidé de ne pas trop s'inquiéter à propos de ça.
Bill laissa échapper un long bâillement, son visage se tordant et son corps s'étirant sur toute la longueur du lit. Il se laissa ensuite retomber dans les draps, ses cheveux doux s'étalant sur le tissu, et il eut un petit soupir de parfait contentement, du genre que Tom n'avait pas entendu depuis un bon moment. Les yeux de Tom étaient inexorablement attirés vers la lisse surface de peau exposée que présentait le ventre de Bill, là où son t-shirt serré s'était un peu relevé. Depuis quand Bill portait-il des fringues à moitié trop petites ? Depuis quand les cheveux de Bill étaient-ils plus longs et plus doux ? Depuis quand même ce bon vieil eyeliner faisait paraître les yeux de son frère si grands que Tom pouvait s'y perdre ?
Bill s'étira de nouveau et sourit.
“Qu'est-ce qui te rend si content ?” demanda Tom. Ses yeux se glissèrent vers le visage de Bill, essayant désespérément d'arrêter de fixer le nombril de son frère.
Bill haussa une épaule. Leurs yeux étaient au même niveau, Tom était venu s'étendre à côté de lui et il sentit qu'il commençait de nouveau à se détendre. “Rien de particulier, je suppose,” finit par répondre Bill. “C'est juste que… c'est tellement cool que nos vies aillent dans cette direction, tu vois ? J'ai trop hâte de voir comment le clip va rendre.”
Tom hocha vaguement la tête. “Ouais, c'est cool. J'ai hâte qu'on reparte en tournée, c'était la meilleure partie.”
“Mm, ouais,” dit doucement Bill. “T'as toujours l'air si bon quand tu es sur scène.”
“Ah oui ?” La voix de Tom avait un peu couiné.
“Oui. Et c'est juste que je… Bon sang, j'adore toute cette énergie,” dit Bill. Il bâilla de nouveau et se blottit contre Tom, les visages séparés de quelques centimètres. “C'est addictif.”
Bill eut un sourire si doux que Tom eut la sensation qu'on lui arrachait le ventre, et il ne sut que faire à part se pencher en avant et l'embrasser.
Bill haleta contre les lèvres de Tom et durant un bref instant, un parfait instant, leurs bouches restèrent l'une contre l'autre. Tom pensa qu'il allait perdre la tête quand il sentit la main de Bill venir toucher son épaule. Il voulait que leurs bouches s'ouvrent et pouvoir sentir la chaleur douce et humide de celle de Bill, mais il n'en eut pas l'occasion.
La main de Bill était venue sur son épaule pour le repousser. Et lorsque Tom croisa le regard de son frère, il pensa qu'il allait vomir. Bill n'avait pas l'air en colère, il n'avait pas l'air dégoûté. C'était pire.
Bill avait l'air triste.
Il s'essuya la bouche, s'asseyant en fronçant les sourcils. Tom essaya de dire quelque chose, mais il ne pouvait pas. Il fixait Bill, les yeux suppliants qu'il le pardonne, mais Bill se contenta de détourner la tête.
"Bill... Je..."
"Pourquoi t'as fait ça ?" demanda Bill, les mains enfoncées dans les draps.
"Je sais pas," dit Tom. "J'ai juste... J'ai juste... putain." Tom se mordit la lèvre, se sentant tout à la fois tout froid et tout chaud. "C'est parce que je..."
Bill se tourna, faisant face à Tom, et il secoua la tête. "Peut-être qu'on ne devrait plus partager notre chambre."
"Bill, je -"
"Ne dis rien de stupide," dit Bill. "Je suis pas fâché contre toi, alors fais pas ça."
Tom hocha la tête et regarda Bill se lever, saisissant son sac pour l'emmener dans la salle de bain. Bill allait se changer, dans la salle de bain. Bill ne pouvait plus faire suffisamment confiance à Tom pour se changer devant lui. Tom avait tout foutu en l'air, et pourquoi ?
Pourquoi Tom ressentait-il ça pour son propre frère ? Pourquoi le sourire de Bill lui avait-il fait vouloir tant ? Pourquoi ?
C'était tellement mal. Tom essaya de sentir à quel point c'était mal, d'être amoureux de son frère, mais la seule chose qui lui parut mal, c'était que Bill n'était pas là avec lui, dans ses bras.
***
Bill ne croisa pas son regard de toute la journée, durant aucune des interviews, et quand ils revinrent à l'hôtel il se jeta dans la chambre de Georg et Gustav.
Tom ne savait pas quoi penser ou faire. Il se rendit dans la chambre qu'il partageait avec Bill à peine vingt-quatre heures plus tôt, et fut frappé par le vide de la pièce. La chambre de Georg et Gustav était juste à côté, il pouvait entendre l'activité qui y régnait. Juste des voix, quelques discussions, un rire de temps à autres. Rien de très excitant. Le pire était que Tom entendait la voix de Bill raisonner au travers du mur, et ça le tuait.
Comment avait-il réussi à tout gâcher en un seul petit instant ? Pourquoi n'avait-il pas pu s'en empêcher ?
Comment avait-il pu être aussi stupide ?
Tom s'assit sur son lit et fixa le mur pendant plusieurs minutes. Il était fatigué, mais pas du genre de fatigue qui lui permettrait de dormir. Il était juste fatigué, fatigué de se sentir si mal. Il avait été mal toute la journée, non-stop.
Il fit venir le room service et alluma la télévision, zappant afin de trouver quelque chose à regarder. Tout ce qu'il put trouver fut une version mal doublée de Nuits blanches à Seattle. Pourtant il détestait ce film ; ça le faisait flipper, cette femme qui avait l'air d'une stalkeuse, il n'aimait pas ça. Mais c'était un des films préférés de Bill et il avait été obligé de le regarder une fois ou deux. “C'est pas flippant, c'est romantique,” marmonna Tom, se souvenant des arguments de Bill. “Peu importe.”
Tom ne savait apparemment pas faire la part entre le flippant et le romantique, de toutes façons.
Il s'allongea sur le lit et mangea son dîner quand on le lui apporta, regardant le film en dormant à moitié. Ca ne prit pas longtemps avant qu'il ne sombre dans un sommeil profond et sans rêve, encore tout habillé.
**
Tom s'éveilla au son de la porte qui s'ouvrait et il se tourna pour voir la douce lumière qui émanait du couloir. Une silhouette longue et étirée se dessinait dans la lumière et il cligna deux fois des yeux tandis que l'ombre traversait la chambre, la porte se refermant avec un petit clic.
Dans le noir, Tom put entendre Bill jurer lorsqu'il se cogna dans la table de chevet. Il entendit le doux murmure du tissu lorsque Bill fut en train de retirer son t-shirt et son pantalon. Il put entendre et sentir les draps être retirés ainsi que le plus petit des soupirs lorsque le lit se creusa sous le petit corps de Bill.
Tom avait du coton dans les oreilles et ses yeux n'arrivaient pas à s'ajuster à l'obscurité, alors que déjà ils se refermaient de sommeil. Bill roula tout près de Tom, ses mains venant arranger les dreads de Tom sur l'oreiller pour qu'elles ne se mettent pas en un tas inconfortable.
"Bill," chuchota Tom, mais les doigts de Bill se pressèrent contre ses lèvres, le faisant taire. Tom ouvrit les yeux dans le noir, incapable de voir Bill, mais il pouvait sentir les yeux de son frère sur lui. Il pouvait sentir Bill partout sur lui, même si seul le bout de ses doigts le touchait vraiment.
Mais ensuite Bill s'était pressé sur lui, ses bras enroulés autour de Tom, le tenant fort. Ca n'était pas un pardon, mais plutôt une étrange acceptation de ce qui s'était passé. Ce n'était pas du tout sexuel, et Tom comprit que Bill n'excusait pas ce qui s'était passé.
Bill aimait Tom, aussi jamais ne le rejetterait-il ou refuserait-il de le toucher, quoi qu'il arrive. Pas même si Tom l'embrassait ou le désirait ou faisait de son mieux pour ruiner ce qu'ils avaient. Le câlin indiquait à Tom que jamais Bill ne le laisserait.
Le cœur de Tom en éclata de joie, mais cela fit aussi se serrer tout son corps sous la pression d'un désir d'une puissance qu'il n'avait jamais ressentie auparavant. Bien que l'étreinte calmante et aimante de Bill l'engloutissait, elle ne pouvait faire cesser la douleur en son cœur.
Il était baisé.
Mais Bill le tint jusqu'au matin.
FIN CHAPITRE 1