CHAPITRE 7


Seize ans.



Janvier 2006.

Les vacances.

Le ski.

Pour la première fois.



La voiture zigzaguait en même temps que la route serpentait en lacet sur la côte de la montagne française.



Simone était toute joyeuse, les joues un peu roses, et entraînait les garçons à chanter avec elles des chansons d'enfants, que Tom répugnait particulièrement.

Bill et Gordon s'en donnaient à cœur joie, mais Tom préférait résolument regarder le paysage dehors, sa tête dodelinant au gré des accrocs de la route chaotique.

Ses paupières étaient de plus en plus lourdes, et la buée qu'il produisait par sa respiration de plus en plus lente l'empêchait de voir clairement la neige.

Le nuit commençait déjà à tomber, et Tom se souvenait de la douce couleur qui avait emplit le ciel avant qu'il ne s'endorme.



Ensuite, c'est Bill qui se souvient.

Qui se souvient de ce virage ou le corps de Tom a basculé sur lui, sa joue écrasée contre son épaule, et surtout, surtout sa main juste entre ses jambes.

Se souvient de Tom qui grogne, dérangé dans son sommeil, et sa main qui par automatisme cherche à se raccrocher quelque part.

Le haut de la cuisse de Bill ?



Bill décida que Tom devait trouver cet endroit chaud et confortable.

Il décida aussi de se pencher vers son visage, et de l'observer un moment.

« Ne l'embête pas, ton pauvre frère… »

« Maman », dit Bill, sa voix divaguant, comme il muait « laisse moi et continu à chanter faux ». Il releva la tête pour voir les sourcils de sa mère se froncer tandis que Gordon rit doucement. Il lui lança un sourire franc qui la fit fondre et elle reprit ses cantiques des plus ennuyeuses.

‘Trop faciles, les parents' pensa-t-il avant de reporter son attention sur son jumeau endormit.



Lorsqu'il le vit ainsi assoupit, contre lui, il se dit que finalement, il le laisserait dormir, juste pour prolonger cette sensation d'être le protecteur.

Mais la tentation l'emporta.

Trop envie de l'embêter.



Il remit une de ses mèches derrières son oreilles puis plaça sa main au niveau du nez de Tom.



Bill avait changé encore. Peut être pire qu'avant.

Ses cheveux avaient considérablement poussés, et il adoptait une coiffure des plus étranges. Déjà à leurs quinze ans il avait décidé de les faire pousser.

Tom quan t à lui gardait ses habituelles dreadlocks, qui avaient bien poussées, en prenant soin avec vigueur.



C'est donc son nez que Bill prit en otage entre son pouce et son index, l'obligeant d'abord à respirer par la bouche, puis le faisant grogner dans son sommeil.

Tom remua, essayant de se dégager de l'emprise de son cadet, mollement, endormit.



Le chanteur rigola doucement, puis tira affectueusement sur une des dreadlocks blondes qui pendait dans le vide, échappée du bonnet beige de Tom.

Celui-ci grogna et se redressa en frissonnant.

Il ouvrit un œil vitreux et lança un regard noir à son jumeau avant de demander:

« Ca fait combien de temps que je dors? »

« Ca fait... » Dit Gordon en regardant sa montre.

« Cinq minutes mon Tom »



Les yeux embués de Tom se posèrent sur Bill, et le sourire de celui-ci disparut aussitôt.

Ils ne s'adressèrent pas la parole de tout le voyage.



//



Le soir, ils arrivèrent dans l'agréable petit chalet de location, et mirent plus d'une heure à s'installer. A vrai dire les jumeaux s'étaient disputés fort pour savoir qui dormirait dans le lit du haut, car ils avaient à faire à des lits superposés.

Tom finit par hurler un "va te faire foutre" qui cloua le bec à tout le chalet. Tom avait crié si fort que ses oreilles sifflaient. Il lui sembla même que toute la montagne s'était tue, impressionnée que Tom Kaulitz ait perdu son calme légendaire.



Il regarda les joues de Bill rougir un instant, puis enfila sa doudoune et ses bottes avant de s'en aller.

Lorsque Simone osa parler, elle eut comme réponse un simple claquement de porte.



A peine dehors, Tom claqua des dents.

Il fit le tour du petit village assez longtemps pour revenir lorsque tout le monde 'dormait'.

Il avait bien remarqué la lumière sous la porte des parents qui s'éteignit lorsqu'il referma la porte d'entrée.

Il les entendit chuchoter dans le silence pesant, puis il décida de se déplier le canapé de la salle principal.

Celui-ci n'avait vraiment pas l'air confortable. Tant pis. Il ferait avec.



Il savait que Bill l'attendrait. Aussi ne fut il pas surpris de sentir son regard peser dans son dos lorsqu'il vint se déshabiller dans la chambre.

Il rougit lorsqu'il changea de boxer, sachant que Bill n'en perdait pas une miette.

Il l'entendit, quand il coupa son souffle alors que Tom abaissait son boxer.

Il sourit malgré lui à ce moment, embarqua sa couette et s'en alla.

Le lendemain fut journée de ski intensive.

Simone et Gordon s'étaient prit par la main et roulez jeunesses.

Du coup, les jumeaux se retrouvaient seuls face aux dangers si pesant… du tire-fesse.



Rien que par le nom, cet engin avait longuement fasciné Bill, mais en le voyant, il avait clairement fait comprendre a quiconque qu'il n'approcherait même pas l'engin.

Tom tentait de contenir son fou rire devant les mimiques de son frère, mais quand enfin l'engin arriva a lui, et qu'il le vit paniquer, attraper la branche comme une liane et se laisser emporter en hurlant comme une fille, la joue collée a la tige, il ne put s'empêcher d'exploser de rire, et lorsque se fut son tour, il s'étala magistralement a l'arrivée, incapable de se défaire de son tire-fesse, il se planta dans la bute de neige prévue a cette effet.

Et son jumeau riait à gorge déployée, un peu a charge de revanche.



Ils skièrent de ci, de la, Tom réussit même une piste bleue.

Il commençait a oublier sa rogne envers Bill, et l'encourageait a le suivre du plus qu'il le pouvait, mais Bill avait une peur incroyable des précipices formés par les pistes rouges et noires autour d'eux.



Pourtant.

Bill transpirait, ses joues, le bout de son nez et de ses oreilles étaient rouges vives, il haletait, il se donnait à fond.

Ça se voyait tellement.

Et Tom, ça l'attendrissait.



Il voyait bien à quel point son petit frère voulait lui montrer qu'il y arrivait.

Quand ils arrivèrent à la fin du parcours, ils eurent le choix entre une piste noire suivit d'une verte pour descendre, ou bien les télésièges, qui eux-mêmes les mèneraient a une dernière piste verte.



« Télésièges », hurla presque l'androgyne, a bout de nerfs.

Tom approuva, mais encore une fois, lorsqu'ils virent ce qui les attendait, ils ne purent s'empêcher de s'agripper l'un à l'autre.

Bill avisait sérieusement la machine, essayant de se rassurer en constatant que personne ne tombait, ses mains gantées enfouies dans les abysses de la doudoune bleue marine de son frère.

Le dreadé quant a lui eu l'idée totalement farfelue de faire la piste noire, sur les fesses, ou sans les skis, au choix.



« Allez les mômes, quand le siège arrivent, pliez les genoux » grogna un homme bourru entouré d'une immense barbe foisonnante qui remuait grossièrement lorsqu'il parlait.

D'ailleurs les deux adolescents le regardèrent de travers, car celui-ci avait baragouiné ce qui ressemblait à un patois français.

« Qu'est ce qu'il a dit ? » demanda Bill en grelottant.

Tom haussa les épaules, se demandant ce qui allait se passer maintenant qu'ils étaient sur l'espèce de tapis en caoutchouc.

Le siège de devant s'éloignait inexorablement et le leur ne semblait pas venir.

Ses yeux glissèrent sur l'affreuse pente face à lui, et une grimace tordit les traits encore fins de son visage quand il s'imagina glisser du tapis et débouler la piste en ratant son asseoiement.

Une pression sur son bras le fit revenir à la blanche réalité, et lorsque l'homme grogna un « attention » qu'ils comprirent parfaitement et qu'il vit face a lui le siège arriver, il laissa échapper un petit couinement d'excitation mêlé a de l'appréhension.



Bill à coté, connaissait parfaitement ce couinement, mais à chaque fois c'était la même chose, ça le faisait se tordre de rire, et cette fois ci n'échappa pas.

A son plus grand dépit.

Car le siège percuta l'arrière de ses genoux, et désarçonné par son fou rire, il manqua de glisser, et il aurait sûrement déboulé la pente… si Tom ne l'avait pas attrapé, hissé, et assuré sur le siège en cuir confortable.

Son cœur battait a tout rompre, il s'imaginait encore ce qu'il serait devenu sans le bras sur de son jumeau.

Sans son jumeau.

Encore.



Il se sentit soudain très furieux, contre Tom, mais surtout contre lui-même.

« J'aurais pu me débrouiller seul », cracha t il en tournant la tête vers la montagne.

Le dreadé ouvrit de grands yeux, interloqué. Il venait de sauver plus ou moins son frère, et celui-ci lui criait dessus ?

« Mais… »

« Y'a rien à dire, j'en ai marre que tu sois toujours sur mon dos, je suis plus un bébé, encore moins maintenant bordel Tom »

Un gros silence s'installa entre eux, Tom hébété, et Bill lançant des éclairs dans le vide, tandis que le siège mettait une distance toujours plus grande entre le sol et lui.



Lorsque le blond s'en rendit compte ses doigts se resserrèrent lentement sur la barre en fer.

« Bill.. »

« J'n'ai plus rien à te dire Tom »

Cela fendait le cœur du guitariste, d'autant plus qu'il sentait l'appréhension, la peur s'enrouler un peu plus à chaque centimètre d'avancée.

« Bill s'il te plaît » en murmurant cela, il ferma les yeux, essayant de se rassurer, mais comme pour l'avion, il savait qu'il n'y avait que Bill pour réussir ce genre de tour de magie.

L'androgyne consentit enfin à accorder son attention à son frère qui semblait fondre dans sa doudoune, le teint pâle.

« Ça va ? »

Tom secoua fébrilement la tête de façon négative.



Lorsque le brun comprit, il fut tenté un instant de réconforter son aîné, puis un sentiment un peu plus fort pointa en lui comme un cheval de troie.

« Tu as besoin de quelque chose ? »

Il sentait ce sadisme l'envahir en force, il voulait entendre Tom dire qu'il avait besoin de lui, il voulait le sentir, le voir dépendant de lui, être le plus grand, encore une fois, juste une fois, une seule petite fois…

Tom commençait à trembler, et Bill jubilait que ce ne soit pas de froid.

« Dis le »

Il vit les yeux de son frère s'ouvrir lentement, son incompréhension peinte a même son visage. Il n'arrivait pas à arrêter.

« Dis moi ce que tu veux Tom »

Et il donna un coup en arrière pour faire balancer le siège.

Il avait un peu la crainte du vide aussi, mais il était bien trop grisé par le pouvoir.

Tom couina et referma les yeux.

« S'il te plait Bill arrêtes, j'ai peur ».

C'était encore plus jouissif.

Soudain l'appareil s'arrêta, secouant le siège un peu trop violement car Tom s'agrippa très fort a la barre en fer, devinant ses jointures livide sous ses épais gants de ski.

Les leurs pendaient dans le vide en même temps que le télésiège se balançait doucement d'avant en arrière.

« S'il te plait Bill, s'il te plait » haletait Tom, mais le brun était juste plongé dans une sorte d'insatiable brouillard de sadisme, et il continuait a faire bouger le support, se sentant jubiler plus la peau de son frère rejoignait la couleur de la poudreuse.



Il ricana, insolent, mais tout ça fondit en même temps que les halètements urgents de Tom atteignaient ses oreilles.

La réalité l'insurgea, Tom hyper ventilait.

« Oh Tom, arrêtes, calmes toi ! »

Il se rapprocha de son jumeau en prenant soin de ne pas faire trop tanguer le siège, et lorsque enfin il arrive à lui, il le serre dans ses bras aussi fort que les doudounes le lui permettent.

« Viens la… »

Il l'enserre, le protège, et directement ce sentiment de fierté revient.

Il décide que ce sentiment il le hait, et qu'il le gardera pour lui, enfouit quelque part la ou son jumeau ne pourra pas rentrer.

Parce que malgré lui il aime ça, il aime voir son frère dans la souffrance, parce qu'il a besoin de lui et lui demande son aide.

D'ailleurs il remarque encore une fois que Tom n'éprouve pas le moindre doute a faire appel a lui.

Encore une différence entre eux.

Comme Tom plongé dans les méandres de son écharpe se calme, la machine reprend sa marche.



Lorsqu'ils descendent sans un mot ni un regard pour l'autre, ils entendent clairement un couple de personnes âgées qui parlent un mélange d'allemand et de français.

La dame arbore deux magnifiques skis vert fluos qui font loucher Bill, et l'homme possède un bonnet rouge qui cache mal son front dégarni.

Et la dame chuchote a son mari « Et bien, ils ont eu l'air de bien s'amuser les deux amoureux » en les regardant avec un air bienveillant.





Les jumeaux préférèrent alors rentrer au chalet.

Trop d'émotions pour la journée.

« Deux ».

Oui.

C'est vrai que maintenant Bill ne prenait plus que deux sucres dans son café.

Avant, quand il riait encore de ses boutons dans le dos, parce qu'il trouvait ça original d'aimer ses propres boutons, il se foutait pas mal du nombre de sucre dans le café tant que cela modérait l'amertume du liquide.



Il mettait jusqu'à cinq sucres.

Parce que Bill aimait le sucre.

Il l'aimait.



Maintenant, il aimait le regard que les gens avaient pour lui, et s'il ne pesait pas chacun de ses aliments sur une balance en argent, en revanche il culpabilisait de se goinfrer de friandises en tout genre et se privait méchamment aux repas du soir en prétextant l'absence de faim.

Et chaque kilo que Bill ne prenait pas, Tom le gagnait.

Son visage s'était légèrement arrondit, et ce n'était pas pour lui déplaire.



Il revient dans la chambre avec les deux tasses, concentré pour ne pas faire tomber de café.

Il tend sa tasse à Bill et se pose à coté de lui sur le lit du bas.

Le lit grince comme il s'y assoit, brisant le silence pesant.

L'un des deux aurait tellement de chose à demander à son aîné, l'autre a juste oublié comment son frère s'est comporté. Ou l'a pardonné. Peut être qu'il veut juste ne pas savoir ce qu'il c'est passé.



Mais au lieu de ça, ils regardent par leur fenêtre les innombrables petits points noirs sur le flanc de la montagne qui descendent à plus ou moins vive allure.

« Les parents arrivent dans longtemps ».

Ça sonne comme une affirmation, mais surtout comme une justification.

Bill pose sa tasse par terre, remonte ses mains sur ses genoux nus, et regarde ses doigts un court instant.

Il voudrait quelque chose mais n'arrive pas à se décider.

Montrer a nouveau à son jumeau qu'il a besoin de lui.

Etre faible.

Etre lui-même.



« Tu sais », la voix du blond est chaude, comme s'il se souvenait de quelque chose d'agréable. Bill le regarde, et remarque qu'il a les yeux plissés, et un petit sourire ourle ses lèvres. « Quand cette vieille nous a prit pour un couple, j'ai vraiment cru que j'allais me pisser dessus ». Il tourne le tête vers son petit frère et lui lance « je me demande bien lequel de nous deux ressemble tant a une fille » et il lui pince le coude.

Tom a horreur qu'on lui pince le coude, c'est pour ça qu'il le fait aux autres, il les devance en quelque sorte, et il gagne ainsi la bataille avant même qu'elle n'ai commencé.



Bill le gronde et sur la défensive se laisse aller contre les énormes coussins du lit, tirant sur les dreads de son frère pour l'amener a lui, sous les plaintes de celui-ci.

Elles sont encore humides de la douche chaude qu'ils se sont accordés en rentrant.



« Je ne suis pas une fille » susurre t il alors que Tom se hisse par-dessus lui un peu à la manière d'un ours, pense Bill.

« Tu en a les lubies » sourit il. Et ils savent que ce n'est pas faux.

Le brun tire un peu plus sur la dread, approchant le visage du blond du sien.

« Ah oui, lesquelles ? » répond Bill en louchant légèrement sur la lèvres percée de Tom.

Le guitariste sourit un peu plus et se penche pour venir frotter du bout de son nez la joue de son frère dont le duvet ne manque pas de se dresser à son passage.

« Hm, je n'sais pas, des choses comme… » Son nez passe sur le front de l'androgyne et ses lèvres frôlent ses paupières. « …lisser tes cheveux et… ».

Bill fronce les sourcils, « Georg le fait aussi ! ».

« Georg joue la fille parce qu'il n'arrive pas à en avoir », « et toi tu te fais les ongles ».

Le brun retint un rire en même temps qu'il frissonnait comme le nez de son frère glissait le long de son cou, son souffle balayant doucement sa peau réactive.

« Et puis tu regardes les garçons aussi… »

« Toi aussi ! »

« Moins que toi, et je ne les reluques pas moi »

« Comme tu mens »

Tom souffla fort sur la peau de Bill et celui-ci ne dit plus rien.

« Tu te maquilles, tu t'habille serré, et surtout… »

Le bout du nez de Tom remonta très lentement jusqu'aux lèvres de son jumeau, et il ferma les yeux un instant, se délectant de pouvoir enfin les toucher, et ne se retint pas plus d'y déposer un baiser très léger.

Bill avait fermé les yeux lui aussi et les garda encore après, appréciant encore l'instant comme d'un rayon de soleil hivernal.

« … surtout, tu embrasses ton frère… »

Le brun rouvrit les yeux et murmura quelque chose dont Tom n'était pas sur, mais qui lui fit manquer plus d'un battement en quelques secondes.



Les mains de Bill se posèrent juste après sur ses hanches et Tom sentit sa nuque s'engourdir alors que les doigts pressaient sa peau pour attirer son bassin jusqu'à celui du brun.

« Bill… »

« Les parents arrivent dans longtemps » répéta le chanteur d'une voix incroyablement rauque.

Tom ferma les yeux et se laissa aller contre son frère, posant sans réfléchir sa bouche contre la sienne, le laissant lui mordre le piercing puis lécher ses lèvres dans une sorte de douce envie brumeuse.

Une des mains moites de Bill quitta sa hanche pour glisser directement dans son boxer à l'arrière, et d'un geste presque trop indécent pour qu'il soit de Bill, il attrapa le globe ferme et pressa si fort que le corps de Tom se contorsionna légèrement et leurs lèvres s'écrasèrent un peu plus.

L'autre main remonta fébrilement, caressant avec une douceur sensationnelle le flanc du guitariste pour remonter le large tee-shirt, et Tom lui-même se mit a rouler lentement son bassin en soupirant d'une aise qu'il n'avait pas l'habitude de connaître dans ses moments intimes.

Il semblait juste… prisonnier du brouillard de la dernière fois, sauf que la il savait qu'il allait y étouffer.

Il sentit Bill gémir au plus profond de sa bouche alors que leurs langues jouaient déjà, et il trouva cela si bon qu'il se frotta plus fort encore, jusqu'à ce que Bill les oblige a se détacher l'un de l'autre pour retirer le tee-shirt de son jumeau.

« On fait quelque chose de m… »

« On a rien à prouver Tom » souffla l'androgyne en l'attrapant par la nuque pour l'embrasser toujours plus fort. Il se laissa aller en arrière sur le lit en donnant une impulsion de son bassin qui leurs fit tourner la tête.

Tom appuya d'un coup sec sur les épaules de son frère et se recula, séparant leurs lèvres dans un ‘pop' sonore.

« Okay » souffla t il, « Bill, je garde mon boxer ». Leurs jambes nues se frôlaient dans la plus douce des caresses, celles du chanteur un peu plus rugueuses par les nombreux passages de la lame de rasoir bic sous la douche.

« Non », trancha Bill en se redressant sur ses coudes pour embrasser a nouveau son jumeau.

Celui-ci força a nouveau sur ses épaules, leurs arrachant un même gémissement.

« Si, et enlèves ton tee-shirt ».

Il allait passer ses mains sous le tissus serré du haut du brun quand Bill lui attrapa les poignets et l'attira une nouvelle fois jusqu'à lui, emprisonnant ses lèvres entre ses dents pour le mordre plutôt fort. Tom poussa un petit cri de douleur, mais le cadet ne le lâcha pas pour autant.

Il le poussa, le poussa pour le faire descendre du lit jusqu'à s'étaler par terre sur la moquette tiède et rêche, et le surplomber à son tour, les lèvres du guitariste toujours otages de ses dents.

Quand il eut enfin le contrôle , Bill consentit à libérer ses prisonnières, caressant du bout des doigts la peau palpitante du cou de son aîné.

« Non. »

Tom fronça les sourcils, se demandant si Bill projetait vraiment de l'avoir entièrement nu sous lui. Et quelle vision étrange ce fut soudain pour lui-même.

Mais après tout, qu'est ce qui n'était pas étrange dans cette situation ?

L'angoisse et l'appréhension rendaient tout plus improbable et extraordinaire, notamment lorsque tout en lui souriant, Bill, son Bill, le petit Billy en short qui essayait de grimper dans les bottes en caoutchouc de Opa, le petit Billy barbouillé du rouge à lèvre à maman, qui lui courait après pour le « peindre comme maman est peintue », le petit ‘Bill Ka' que le gros Fritz coursait a l'école, le petit Billounet qui se faisait baiser les pommettes et tirer les joues par Oma, le petit Bill Kaulitz leader de Devillish, le petit Bill qui l'embrassa après un tour de manège trop éprouvant…, glissa ses mains ornées de longs ongles le long de son corps jusqu'à la limite de son sous-vêtement qu'il abaissa avec une lenteur provocatrice.

Le blond regardait son frère interrogateur, mais n'osait, n'arrivait juste pas à faire le moindre geste pour l'en empêcher. Et ce fut presque un soulagement pour son corps lorsque Bill l'eut tout à fait dénudé, mais il ne s'en sentit que plus mal à l'aise lorsque agenouillé par-dessus lui, le brun l'observa d'un air rêveur.



Quand est-ce que ce scénario a-t-il prit cette tournure ?

Depuis quand est-ce que Tom était ainsi plié à son frère ?

Après tout, n'était-ce pas lui, le dur a cuire à l'école ?

Le dragueur du groupe ?

Le manipulateur de son entourage ?



Bien sur, et quelle couverture. Couverture qui ne servait juste a rien face à Bill, car même s'il voulait ne pas y penser, Tom savait pertinemment que c'était lui le faible entre eux deux. Lui l'accro. Lui le soumis, celui qui réclame la tendresse, et Bill celui qui donne. Au fond, s'il ne voulait pas y penser, c'est parce qu'il s'en rendait bien compte, autant qu'il voyait comme son frère tentait d'en profiter depuis cette histoire a l'installation dans l'appartement. Parce que certes Bill n'était pas bête, mais Tom ne l'était pas plus.



Alors tout les deux maniaient l'autre.

Mais n'était-ce pas dans le même but ?

Juste pour pouvoir attraper ce brouillard sucré qu'ils fondaient lorsqu'ils se touchaient…



Bill se rallongea de tout son long contre son frère qui lui fit les gros yeux comme leurs deux sexes tendus entrèrent en contact.

« Bill vraiment tu ne peux pas faire… », Mais il ne pouvait même pas finir sa phrase.

Alors il ferma les yeux, en soupirant, et laissa son petit frère se frotter contre lui, se glissant peu a peu jusqu'entre ses jambes, faisant se heurter leurs bassins, s'aboucher leurs ventres, et puis s'entremêler leurs doigts et s'effleurer leurs lèvres, voler les papillons et tourner la terre…

Même la personne la plus fermée d'esprit en les ayant aperçu ainsi a la fenetre du chalet n'aurait pu en y réfléchissant les trouver déplacés.

C'est ce que pensait Bill. Tom ne pouvait pas être plus beau qu'entre ses mains, nu et pleins de plaisir, de tendresse après laquelle il courait depuis un bon laps de temps maintenant.

Tom lui ne pensait a rien, juste à ce qu'il était, là, sous son frère, à cambrer son dos pour plus de contact, à enfoncer ses doigts et ses doigts de pieds dans la moquette qui irritait sa peau rougie à présent couverte de sueur.

C'était bon, très, trop, mais quelque chose était dérangeant et l'empêchait de planer comme il l'aurait pu.

Le statut de Bill.

Ou bien ses vêtements.





L'androgyne finit par se plonger dans le cou de son jumeau pour l'y embrasser, y soupirer alors qu'il donnait de véritables accoups, c'était sexuelle cette fois et personne ne pouvait plus le nier.

Tom passa ses bras autour des épaules du brun et gémit, tentant malgré tout de freiner cet acte incestueux, vraiment trop.

« Non Bill, non » mais lui-même n'écoutait plus ses propres suppliques, juste les soupirs rauques du chanteur et son corps qui lui hurlait son bien-être. Son corps qui suivait le mouvement imposé, son corps qui trahissait sa conscience…

Au bout d'un certain temps où le cadet semblait prit d'une frénésie dévastatrice qui le faisait mordre et griffer doucement son jumeau qui paraissait en prendre un réel plaisir, le brun se redressa, et l'embrassa avec fureur, une de ses mains venant saisir l'arrière du genou du blond, le caressant un peu plus.

« Putain, Tom, mon Tomi » articula t il entre deux baisers.

Envolée l'angoisse d'être surpris, la gêne d'être le seul nu, l'appréhension de l'inceste, juste cette bulle, putain de bulle que retrouva le guitariste de ce matin-là, quand ils avaient encore quinze ans, dans sa chambre.



Au moment où il se sentit venir, Tom repoussa son frère de telle façon à prendre à son tour le dessus, et, les doigts enfouis et crispés dans le tee-shirt de Bill, le visage contre son torse, les jambes pliées, le corps tendu par le coït, les yeux plissés débordant de larmes de plaisir, et la bouche entrouverte en un cri silencieux, il jouit sur le ventre du brun, qui n'eut qu'a baisser les yeux vers ce spectacle pour atteindre lui aussi le bout du chemin. Bill haleta une dernière fois avant de se cambrer à son tour pour finir totalement détendu, les bras en croix, la respiration saccadée couvrant a peine celle de son frère.

« Bordel » souffla t il, émergeant lentement des restes de son orgasme, « c'est pareil que cette fois la », « tu t'en souviens ?... » « Aussi… Ouah ».

Le dreadé se contenta de sourire et d'hocher la tête, resserrant son étreinte sur son frère.

Au bout de quelques instant, le brun se redressa, entraînant avec lui son jumeau encore entouré par les brumes délicieusement acidulée de leur précèdent acte.

« J'ai bien trop chaud », murmura t il.

« Tomi » miaula le chanteur en lui griffant doucement le dos, « j'ai envie de chocolat… »

Il ronronna doucement.

Tom ouvrit les yeux, pensant a nouveau que Bill n'aimait pas le chocolat, mais cet instant ressemblait trop a celui de l'année dernière, et comme l'année dernière il préféra ne pas se formaliser de ce détail.

Il se leva en tremblotant légèrement, ayant soudainement froid en quittant la chaleur du corps de son jumeau.

Alors qu'il s'habillait de son boxer et de son tee-shirt, ils entendirent la porte d'entrer grincer et les voix adultes résonner dans le chalet.

Il réprima un frisson et se tourna le regard noir, vers son frère qui lui lança un clin d'œil, l'air de vouloir dire ‘avec des si on referait le monde', lui intimant de ne pas s'en faire et que ce qui était fait était fait, point barre.



//



Le lendemain, à l'aube, les jumeaux avaient décidé de sortir tôt pour profiter un peu de la ville sans qu'une multitude de gens ne viennent parasiter leur visite.

A leur retour, leur mère parut très surprise, mais, bien sûr, elle ne savait pas quel agréable moment romantique les deux frères avaient pu passer, assis sur un banc face à la montagne et au lever du soleil.

Ici, ils pouvaient bien être moufle dans la moufle, personne ne les regarderaient, alors, oui, ils étaient aller en profiter un peu, avant que les vacances ne soient finis.

Imaginez une seconde, le paysage montagneux, le soleil se levant au gré d'une légère brise qui vous fasse frissonner, sans les gargouillis du ventre de la ville derrière. Rien que vous.

Ç'avait été bizarre, Tom n'osait pas vraiment regarder son frère lorsque celui-ci attrapa doucement sa main, sur le banc.

A vrai dire, avec le groupe et tout ça, il n'avait pas pour habitude d'avoir de relation profonde, et il n'était de toute façon pas sur d'en vouloir. Après tout, quelle autre personne que Bill pouvait être vraiment celle qu'il recherchait, la personne qui le connaisse comme il la connaîtrait, la personne qui lui donnerait ce dont il aurait besoin sans avoir besoin de faire d'effort, idem dans l'autre sens…



Tom se souviendra de ça pendant longtemps.

Il se souviendra aussi du soir même.

Ils étaient sortit pour aller dans au moins un des restaurant du village, pour profiter cette fois des spécialités montagnardes.

Tom se souviendra bien de cette petite radio qui passait de vieilles chansons sereines et calmes qui lui donnaient envie de dormir.

Il se souviendra du feu crépitant dans la cheminée. De l'ambiance orangée et opiacée de la salle. De la douce conversation des gens, français la plupart.

Il se souviendra de Gordon parlant très bien français.

Il se souviendra du bonheur de sa mère.

Il se souviendra du confort, et du goût absolument merveilleux du plat dont il aura repris jusqu'à la nausée.



Mais il se souviendra surtout de la main sur la sienne, douce et chaude, comme une caresse, et le sourire malicieux sur le visage de son frère, ses yeux presque amoureux où dansait le reflet des flammes dorées, et son pied bougeant légèrement contre le sien…

Une soirée parfaite, qui se prolongea dans le lit du haut, où les jumeaux s'endormirent les doigts entrelacés, le même souffle, et les mêmes rêves.

FIN CHAPITRE 7

 

 

 

 

 

 

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