Chapitre 12.



« Laisse-toi faire aller. »

Georg tentait tant bien que mal de convaincre Tom de se faire soigner. Mais son ami ne tenait pas en place. Il voulait se lever tout le temps, il criait des ordres à personne en particulier, il avait la main vissée sur son téléphone portable, au cas où. Il était incontrôlable.

Le pompier urgentiste qui était arrivé sur les lieux ne s'en sortait pas. Tom bougeait tellement qu'il était incapable de voir si la blessure était grave ou non. Mais vu l'agitation de son patient, ça ne devait pas être bien méchant.

« Bon tu t'assois deux minutes et après tu pourras bouger ok ? »

Le ton de Georg était ferme et sans appel. Tom se renfrogna mais obéit. Il s'assit à l'arrière du camion rouge et se laissa ausculter.

« La balle est ressortie directement, elle a simplement traversé la chair. »

Tom rigola.

« Simplement ? »

Le médecin rougit un peu.

« Désolé, enfin ça aurait pu être bien pire. Je ne sais pas si ce type a fait exprès de tirer là ou pas mais si elle était passée à travers votre cœur cette balle aurait fait bien plus de dégâts. »

Tom frissonna un peu. Il avait été tellement inconscient de sa propre sécurité. Tout ce qu'il voulait c'était sauver Bill.

Bill...

Il recommençait à s'agiter mais le médecin le tenait fermement.

« Bon il faut aller à l'hôpital pour recoudre ça. »
« Quoi ? » s'indigna le blond. « J'ai pas le temps, j'ai un job à faire ! »
« Tom, sois raisonnable un peu, ça ne prendra pas longtemps. » dit Georg le plus calmement possible.
« Bill a été enlevé !! Comment veux-tu que je sois raisonnable ? »

Il était énervé. On le forçait à rester là à ne rien faire, on voulait l'emmener à l'hôpital ça allait prendre un temps fou et pendant ce temps Bill était peut-être en train de mourir.

« Tom tu vas bien ? »

Gustav venait d'arriver.

« Mouai. »
« Tu files à l'hôpital.... »
« Mais... »
« Et tu discutes pas. » ordonna-t-il.

Le regard de Tom était noir mais il se rassit.

« On va tout faire pour le retrouver d'accord ? Mais en attendant tu te fais soigner, on te tiendra au courant dès qu'il y a du nouveau. »

Tom n'était pas du tout d'accord, mais il n'avait pas vraiment d'autre option.
Il se laissa donc conduire à l'hôpital. Il apprit pendant le trajet que ses collègues avaient perdu de vue la voiture de Lisa. Il n'était même pas étonné, il était persuadé que ça se passerait comme ça.

Une fois arrivé des médecins s'occupèrent de lui immédiatement. En temps normal il n'aurait jamais accepté de passer devant des personnes qui attendaient depuis plusieurs heures. Mais là il s'en foutait royalement.
Il s'allongea sur le lit et ferma les yeux pendant qu'on s'occupait de lui.

Il revivait une journée d'horreur, pour la deuxième fois de sa vie.

[...]

Il ouvrit difficilement les yeux une demi heure plus tard.

« Hey ça va ? »

Georg s'approcha de lui et le dévisagea avec inquiétude.

« Ouai. Il faut que je me lève, je dois aller chercher Bill. »

Il se redressa sur son lit et sauta sur ses pieds. Il chancela, sa tête tournait, il se retint comme il put et se rassit.

« Ils n'y sont pas allés de main morte sur les calmants. »
« J'avais dit que je n'en voulais pas ! » s'indigna Tom.
« Ouai, et ils t'auraient laissé morfler pendant trois jours. Il faut que tu te reposes encore quelques heures. »

Le dreadé blêmit.

« Quelques... quelques heures ? Mais Bill n'a pas quelques heures ok ? »

A ce moment là la porte s'ouvrit empêchant Georg de répliquer.

« Et pourtant tu n'es pas en état d'aller le chercher dans l'immédiat. »

Gustav venait de rentrer. Tom leva les yeux au ciel. Son chef était devin ou quoi ?

« Alors tu rentres chez toi et tu reviens plus tard. »
« Hors de question. »

Le commissaire s'était attendu à une telle réponse.

« D'accord, tu vas te reposer un peu dans la salle de détente au poste et dès que les effets des sédatifs se sont dissipés tu réintègres l'équipe ça te va ? »

Ca n'était pas ce qu'il voulait mais Tom savait qu'il n'obtiendrait rien de plus. Et puis ça le rendait malade de penser ça mais il n'était même pas capable de rester debout plus de deux minutes, il allait plus les ralentir qu'autre chose.

« Bien, mais dès que j'ai récupéré je ne dormirai plus avant d'avoir mis la main sur cette ordure. »
« Ca me va. »

Tom se releva et se retint un peu à Georg pour rester droit. Il allait dormir une toute petite heure et après il retrouverait Bill. Oui c'était un bon plan.

[...]

Quand Tom rouvrit les yeux la boule qu'il avait au fond de la gorge n'avait pas disparu, bien au contraire. Et en plus de ça il avait l'impression qu'un camion lui était passé sur la tête.
Il risqua un coup d'œil à sa montre et poussa un cri.

« Bordel pourquoi personne ne m'a réveillé ? »

Il se leva et enfila son immense sweat posé sur la chaise à côté.
Il déboula quelques secondes plus tard dans le bureau de Georg, personne. Il le trouva finalement dans la salle de conférence un portable à chaque oreille et faisant les cent pas dans la pièce.

« Ah Tom. »
« On a des nouvelles ? »
« Toujours pas. »

Il se replongea dans les deux conversations qu'il suivait en même temps. Cette scène parvint à faire sourire le blond, qui disait que les hommes étaient incapables de faire deux choses à la fois ?

Mais il n'avait pas le temps de réfléchir à ce genre de considérations métaphysiques. Il était pratiquement seize heures, il avait passé une bonne partie de l'après-midi à dormir. Une immense vague de culpabilité le submergea. Comment avait-il pu dormir tranquillement installé sur un canapé pas confortable alors que Bill était en danger.
Il repéra l'un des collègues qui s'occupait aussi de l'affaire.

« Nicholas ? Bordel ils sont passés où ? Y a plus personne dans ce commissariat ou quoi ? Et pourquoi personne ne m'a réveillé ? J'avais dit que je voulais être sur cette affaire. »
« Respire deux secondes pour le laisser répondre à tes questions. » rigola Georg derrière lui.

Tom se retourna et le fusilla du regard. C'était de sa faute s'il avait dormi aussi longtemps.

« Tu étais claqué, ils t'ont donné une bonne dose de calmants tu aurais été incapable de garder les yeux ouverts trois minutes si on t'avait réveillé. Et pour ton information personnelle personne n'est là parce que tout le monde est à la recherche de Bill, et accessoirement occupé à tenter d'arrêter le tueur le plus sanguinaire de ces dix dernières années. »

Le dreadé se sentit un peu honteux. Il criait sur tout le monde alors qu'apparemment tous les policiers avaient été appelés en renfort sur cette histoire. Le commissaire avait dû laisser le minimum d'agents possible pour s'occuper des affaires courantes.

« Ok. Je veux les rejoindre, il s'est passé quoi pendant mon absence ? »
« Je viens d'avoir les dernières infos, on a quatre équipes qui patrouillent dans toute la ville à la recherche de la voiture ou de témoins l'ayant aperçu, son signalement a été placardé partout, le message passe en boucle à la télé. On a des hommes qui fouillent tous les endroits où l'on sait que ce type ou sa sœur ont mis les pieds pour voir s'ils n'y sont pas retournés depuis ou s'il n'y a pas un indice qui nous aurait échappé. Le juge est en train de demander à l'opérateur de Bill s'il peut nous aider à le localiser, on ne sait pas s'il a encore son portable sur lui mais on peut tenter, il faut juste qu'il l'utilise. Je sais que c'est très peu probable mais on ne veut perdre aucune chance. Et pour finir trois équipes ratissent le quartier où on a perdu leur trace pour essayer de déterminer dans quelle direction ils sont partis. Je crois qu'on fait notre maximum. »

Tom acquiesça. Il était toujours énervé parce que lui était là à ne rien faire mais il devait bien avouer qu'ils faisaient du bon boulot.

« Où est-ce que je peux aller pour me rendre utile ? »

Gustav apparut à ce moment là au bout du couloir. Tom sourit, son chef arrivait toujours quand on avait besoin de lui. Il commençait sérieusement à croire qu'il avait vraiment des pouvoirs surnaturels comme le pensait Bill. A la pensée du brun perdu quelque part son cœur se serra. Mais il devait dépasser ça pour être plus efficace et le retrouver au plus vite.

« Tu vas rester ici au cas où du nouveau survienne pour que tu puisses partir le plus vite possible sur les lieux et puis j'ai besoin de toi en attendant. »
« Pour faire quoi ? »
« Les notes de Bill, il y en a des pages pleines et je pense que l'on peut trouver des indices sur l'endroit où ils sont allés là dedans mais je dois bien avouer qu'on n'y comprend pas grand chose. »
« Et vous pensez que moi j'arriverai à déchiffrer tout ça ? »

Il ne put s'empêcher de rigoler un peu. Il ne comprenait jamais plus de la moitié des choses que l'androgyne lui racontait. Et il en notait des encore plus complexes.

« Notre psychiatre se penche là dessus depuis des heures et il n'arrive pas à bien tout cerner, tu es resté avec lui depuis le début, tu étais là à chaque question qu'il a posé et à chaque fois qu'il a rencontré quelqu'un tu pourras sûrement l'aider à comprendre certaines choses. »

Il haussa les épaules, ça pouvait se tenter après tout. Il n'allait pas rester là à ne rien faire jusqu'à ce qu'on lui dise qu'on avait retrouvé le corps de Bill sans vie jeté quelque part dans une ruelle sombre.

Il frissonna à cette pensée. Plus jamais il ne prendrait de calmants, il préférait souffrir, ces trucs le faisaient s'imaginer des choses horribles.

Il rejoignit son bureau où le psychiatre était plongé dans un épais dossier, des dizaines de feuilles éparpillées partout autour de lui.

« Besoin d'aide peut-être ? »

Il l'accueillit avec le sourire. Il avait beau être diplômé d'une grande université Bill avait ses propres codes et ses propres abréviations et il n'avait pas suivi l'affaire en détails, il se sentait un peu perdu.

Pendant l'heure qui suivit Tom fit ce qu'il put pour trouver les réponses dans sa mémoire, le psy interprétait les indications de Bill, Tom lui expliquait les faits. Ca lui permettait de comprendre ce que Bill avait voulu dire.

Le dreadé posa sa tête sur ses bras pour tenter de se concentrer. Il sentait encore les effets des médicaments dans son sang. Ca l'abrutissait, il se sentait faible et fatigué. Mais il ne devait pas, il devait lutter pour continuer de travailler.

[...]

Bill frissonna. Il avait froid, il était même gelé. Ses vêtements étaient humides, il était assis par terre sur le béton glacial, sa veste trempée le refroidissait encore d'avantage.
Il faisait sombre, très sombre, il ne voyait pas ce qu'il se passait dans cette immense pièce, il ne savait même pas où il était. Il avait juste froid.
Et il avait peur.

Soudain un bruit sourd se fit entendre. Il sursauta, se recroquevillant encore plus sur lui-même, cachant son visage dans ses mains. Il entendit des pas, l'homme s'approchait de lui. Il était terrifié.

« Alors on fait moins le malin hein ? »

Bill ne répondit pas, les sons restaient coincés au fond de sa gorge. Il sentait la présence de l'homme tout autour de lui, il était paralysé.

« Allez viens là. »

Il lui attrapa fermement le bras et le remit debout.

« Maintenant on va rire. »

Un éclair de terreur traversa le regard du brun. Il vit le reflet d'une lame en acier se lever et fendre l'air pour s'abattre sur lui.

« Non ! »

Tom ouvrit les yeux brutalement et se redressa sur la chaise.

« Tom ! »

Le psychiatre le secouait pour le réveiller.

« Ca va ? »

Le dreadé était totalement désorienté. Il mit plusieurs secondes avant de tout remettre dans la la réalité.

« Euh ouai ... je crois. »

Il transpirait et sa respiration était très rapide mais il allait mieux. Il ne put s'empêcher de rigoler. Le médecin le regardait, plutôt dubitatif. Ce changement de comportement brutal le laissait perplexe.

Georg entra dans la pièce au même moment et il se trouva face à un Tom apeuré et hilare.

« Désolé, c'est nerveux. »

Georg interrogea le psychiatre du regard.

« Cauchemars... »
« Oh... »

Il observa Tom un instant et finit par sourire.

« Ouai, je crois que les mauvais rêves ça te retourne le cerveau ! »
« Non mais c'est juste... enfin la dernière fois c'était Bill qui faisait un cauchemar. Et maintenant... »
« Ca va aller ok ? »

Tom acquiesça, bien qu'il ne fut pas vraiment convaincu.

« Tu devrais dormir un peu, on repartira au commissariat ce soir, mais là t'es dans un état pitoyable, tu n'arriveras à rien si tu ne dors pas quelques heures d'accord ? »
« Non ! »

La réponse était sans appel.

« Je vais bien, c'est juste que ces calmants sont en train de m'achever. Mais ça va. Je suis parfaitement réveillé là. »

Georg haussa un sourcil, pas spécialement convaincu. Mais il le laissa faire, de toute façon il était persuadé que rien ne pourrait obliger Tom à dormir en ce moment. Il baissa les bras en signe d'abandon et disparut dans le couloir.

Tom se frotta les yeux et se leva pour aller chercher un café. Il n'aimait pas vraiment ça mais là il en avait besoin.
La culpabilité le reprit. Jamais il n'aurait pensé dormir pendant que Bill était entre la vie et la mort mais le stress, l'angoisse et les calmants qu'on lui avait donnés à l'hôpital avaient eu raison de lui, deux fois.

Il revint dans le bureau une tasse de café bouillant et absolument infecte dans les mains. Le psychiatre était toujours concentré. Il se surprit à lui en vouloir. Après tout il l'avait laissé s'endormir et à cause de lui il avait fait ce rêve stupide.

Il secoua la tête, c'était lui qui était stupide. Ce mec n'y était pour rien, il tentait de faire son job, et Tom devait faire le sien.
Il parcourut la pièce du regard et son attention se porta sur l'immense carte du centre ville que le brun avait placardé sur un mur. Des gommettes avaient été rajoutées depuis la dernière fois qu'il avait regardé ce plan attentivement. Des cercles noirs étaient tracés et ils se rejoignait en une zone de plus en plus réduite.

Il remarqua une gommette d'une autre couleur. Il s'approcha pour voir à quoi elle correspondait. Il reconnut le nom de la rue de l'appartement de Lisa. Le point vert était situé sur la bordure d'un des cercles. Une autre pastille verte était également collée pour indiquer le garde meuble où ils avaient failli l'attraper.
Tom fronça les sourcils et réfléchit intensément. Il n'était pas sûr que cette histoire de « cercle où le tueur se sentait en sécurité » soit très fiable. Mais Bill semblait y croire, alors il allait lui faire confiance.

Il attrapa la feuille autocollante avec les gommettes et en plaça une dans la rue où l'homme travaillait. Il ne put s'empêcher de frissonner. Elle était en plein dans la zone délimitée par les différents cercles.
Il en prit une autre et la plaça pour symboliser son ancien appartement, ça collait aussi. Il en positionna enfin une dernière sur la maison où il vivait depuis à peine quelques jours. Elle tomba elle aussi en plein dans le cercle.

Il prit un marqueur est entreprit de rejoindre toutes les pastilles vertes. Il se souvenait vaguement des explications de Bill à ce sujet. L'homme tuait près de chez lui parce qu'il se sentait en sécurité. Là il avait besoin de toute sa concentration pour parvenir à s'en sortir alors qu'il avait la moitié de la police de la ville à sa poursuite et un otage entre les mains.

Les traits ainsi tracés recoupaient parfaitement les cercles déjà présents et un quartier précis se dégagea. La zone étaient encore relativement vaste, une quinzaine de rue et des tas d'immeubles et de maisons concernés mais c'était déjà un début.
Il le sentait, l'homme se cachait quelque part là dedans.

« Je crois qu'on tient quelque chose. » dit-il au psychiatre qui se débattait toujours avec ses feuilles.

A ce moment là la porte du bureau s'ouvrit à la volée sur un Georg excité.

« Il faut que tu viennes voir ça ! »
« J'ai quelque chose à te montrer. » répondit le blond.
« On n'a pas le temps, tu me montreras plus tard. »

Tom le suivit sans se faire prier. Ca avait l'air vraiment important. Ils traversèrent les bâtiments pratiquement en courant et grimpèrent quelques escaliers pour se retrouver au centre d'appel de la police.
Le commissaire était penché devant un ordinateur un casque sur les oreilles.

« Je crois que Bill tente de nous appeler. »
« Quoi ? »

Il arracha pratiquement le casque de la tête de l'opératrice et le mit. Mais il n'entendit rien. Le silence absolu.
Il s'était tellement attendu à l'entendre parler qu'il ressentit une immense déception.

« C'est son numéro. Il a appelé une première fois mais à peine l'opératrice a-t-elle parlé que ça a raccroché. On a cru à une mauvaise blague. Mais il a rappelé et raccroché presque aussi vite. »
« Finalement je me suis dit que peut-être il ne voulait pas que je parle alors quand j'ai décroché la quatrième fois je n'ai rien dit et le coup de fil s'est prolongé. C'est là que j'ai noté le numéro et que j'ai demandé si on le connaissait. » continua l'opératrice.
« Il ne doit pas être seul, si on parle le son va s'entendre c'est sûrement pour ça qu'il a raccroché à chaque fois, pour ne pas que ce type remarque qu'il tentait de nous appeler. » finit d'expliquer Gustav.

Tom était partagé entre le bonheur de savoir que Bill essayait d'entrer en contact avec eux et la peur d'imaginer dans quel état il pouvait être.

« Il est en train de perdre toute faculté de réflexion là. Vous aviez raison il n'a même pas pensé que Bill pouvait avoir un téléphone sur lui. » dit le dreadé.

Ca le rassurait mais il se souvenait de ce que Bill avait dit. S'il perdait le contrôle il ferait des erreurs mais il contrôlerait encore moins ses pulsions.
Il avait laissé Bill avec un téléphone mais il pouvait aussi bien être pris dans un élan de rage et le tuer.

« On va essayer de trianguler l'appel mais pour ça il faut qu'il reste en communication suffisamment longtemps. »
« Il le sait. » dit Tom. « Une fois qu'il sera sûr qu'on l'a repéré il va nous laisser le temps de le localiser. »

Il parlait avec assurance parce que qu'il voulait que ça se passe comme ça. Mais rien n'était moins sûr.
Le téléphone sonna à nouveau les faisant tous sursauter. L'opératrice décrocha.

A l'autre bout de la ligne, le silence. Un informaticien pianotait à une vitesse folle des choses sur le clavier de l'ordinateur.

« Allez, encore un peu. »

Il allait aussi vite qu'il pouvait, faisant une course contre la montre pour trouver où était Bill avant que celui-ci ne soit obligé de raccrocher.

« Et merde. Il a coupé. »
« Il doit essayer de faire ça sans se faire voir, il ne faut pas qu'il se fasse prendre. »

Mais il rappela aussi tôt.

« Je vais repartir de la dernière zone que j'avais. »

Le technicien reprit son travail aussi rapidement qu'il le pouvait.

« Trop tard. »

Cette fois l'appel avait duré moins de dix secondes.

« Il prend trop de risques.... » lâcha Tom sans le vouloir.

Bill devait appeler à chaque fois qu'il le pouvait même si c'était un peu trop dangereux. Il le connaissait trop bien, parfois son sens du danger était un peu brouillé.

« Je repars de la dernière zone à chaque fois mais à ce rythme là il va nous falloir une bonne dizaine d'appels. »
« Attendez ! »

Tom s'avança vers le mur où là aussi un immense plan de la ville était accroché. Il prit un stylo et retraça avec le plus de précision possible la zone qu'il avait déterminée quelques minutes plus tôt.

« J'ai pas le temps de vous expliquer pourquoi mais la prochaine fois qu'il appelle essayez de le localiser là dedans ok ? »

L'informaticien se tourna vers le commissaire, l'interrogeant du regard. Il hocha la tête.

« Bien. »

Il rentra les coordonnées géographiques dans l'ordinateur et attendit un nouvel appel.

Il ne tarda pas à arriver. Cette fois le périmètre de la recherche était beaucoup plus précis, il ne fallut que quelques secondes pour qu'un point rouge clignote sur l'écran.

« Je l'ai ! »

Tom se retint de crier. Il le savait. Même quand Bill n'était pas là il parvenait quand même à les aider.

« On a une adresse. »

Le commissaire la nota rapidement et sortit de la pièce, Tom et Georg sur les talons.

« Allez on y va. »

[...]

La voiture filait sur les grandes avenues de la ville qui sombraient peu à peu dans l'obscurité. Les gyrophares éclairaient les murs des vieux bâtiments et le bruit de la sirène transperçait l'air calme de cette fin de journée.

Pendant que Gustav roulait Tom réfléchissait à un plan. Ils n'avaient pas encore décidé ce qu'ils allaient faire, ils allaient déjà repérer les lieux et après ils aviseraient. La difficulté étant bien évidemment de faire cesser ça tout en gardant Bill en vie.

Personne ne le formulait à haute voix mais si dans le feu de l'action l'homme ou sa cousine venait à être être blessé, ou tué, personne ne s'en plaindrait. Ils avaient même tous secrètement envie d'être la personne qui leur logerait une balle en plein cœur, particulièrement Tom qui ne supporterait pas de reperdre une personne proche dans de telles circonstances.

« Ca va aller ok ? »

Le commissaire jeta un coup d'œil dans le rétroviseur et tenta de rassurer Tom d'un regard. Le blond hocha le tête. Ce soir il avait envie de lui faire confiance, tout comme il faisait confiance à Bill. Il avait promis, il ne se ferait pas tuer aujourd'hui.

Ils parvinrent enfin au but. C'était un immeuble barricadé par des planches en bois. Il allait être démoli. Enfin si on en jugeait par le panneau blanc sur la porte il aurait déjà dû l'être depuis plus de deux ans.
C'était sûrement un bâtiment abandonné qui servait de squat aux jeunes fauchés de la capitale.
Ils ne savaient pas vraiment comme leur homme avait connu cet endroit mais il avait dû y faire des séjours réguliers pour l'utiliser comme refuge.

« C'est trop grand on ne peut pas savoir où ils sont et si on entre on se fera forcément remarquer, ça doit grincer furieusement là dedans. » dit Tom, résigné.
« Il va pourtant falloir qu'on trouve une solution. »

Et comme quelqu'un les avaient entendu le téléphone du commissaire sonna.

« C'est le poste. »

Il décrocha et mit sur haut-parleur.

« Bill a rappelé, plusieurs fois et des temps extrêmement courts, comme s'il essayait d'attirer notre attention. »
« Il va sûrement essayer de nous parler, mais il n'aura le droit qu'à une seule chance, il veut qu'on l'entende. » répondit Tom comme si c'était évident.

Il avait suffisamment travaillé avec Bill pour savoir comment il fonctionnait.

« Bien, je reste en ligne vous me faites entendre le moindre de ses appels compris ? »
« Bien monsieur. »

Le silence s'installa seulement brisé par leurs respirations.

Et soudain un déclic se fit entendre. Bill venait de rappeler.

« Pourquoi vous ne vous enfuyez pas ? »

Tom mit une main sur sa bouche pour s'empêcher de crier de joie. C'était la voix de Bill, il était en vie.

« Ta gueule. »
« Partez, personne ne sait où vous êtes. Sortez de la ville et tentez votre chance vers l'est. Une fois que vous aurez passé la frontière on ne retrouvera plus votre trace avant un bon bout de temps et vous aurez le temps de sortir de l'Europe et de vous cacher quelque part pour tout recommencer. »
« Ta gueule j'ai dit ! »

L'homme avait haussé le ton.

« Ben je sais pas alors faites quelque chose, on va pas rester dans cette pièce toute sombre pendant le restant de nos jours hein. Ca caille dans ce sous-sol. Et pourquoi le sous-sol d'ailleurs ? Tu regardes trop de films ! »

Si la situation n'avait pas été aussi grave Tom aurait rigolé. Même dans les pires moments l'androgyne savait garder son sang-froid.

« Ils sont en bas. » dit Gustav. « Le bâtiment n'est pas très grand, si on descend les escaliers on devrait tomber sur eux. »

A l'autre bout du téléphone la conversation reprit.

« Non parce que franchement, plus tu restes ici plus ils auront de chance de te trouver. Enfin bon, c'est un conseil quoi. »

Tom leva les yeux au ciel, il ne put s'empêcher de sourire. Ce mec était trop barge. Il risquait sa vie à tout moment et il continuait à faire de l'humour.

« Et qu'est-ce que tu vas faire de moi franchement ? Je mets un peu d'eyeliner et je porte des bottes à talons mais je suis un mec. Je crois pas que ce soit trop ton truc. »
« Putain tu vas la fermer oui ! »
« Ok, ok. Il faut pas s'énerver. »

A l'intérieur de la voiture face à l'immeuble Gustav est Georg étaient tout simplement en train d'halluciner, ils ne connaissaient pas Bill aussi bien que le dreadé et découvrir qu'il était capable de garder aussi bien son sang-froid les laissait pleins d'admiration.

« Il est pas bien ton mec Tom, il faut qu'il se fasse soigner ! »
« Hey ! Je te permets pas il essaie de gagner du temps pour nous là. »

Il lui sourit et ne réalisa qu'après avoir croiser le regard de Gustav que Georg venait de dire qu'il sortait avec Bill devant son patron. Ce n'était pas très malin. Mais il ne devait pas penser à ça, il leur fallait un plan.

« Regarde il commence à faire nuit, c'est le moment où jamais de t'enfuir. »

« Il voit l'extérieur ! » s'écria Tom. « Il n'y a que deux fenêtres tout en bas du bâtiment. »
« On doit lui faire comprendre qu'on est là et qu'on va bientôt intervenir. Il faut qu'il continue d'attirer son attention. »

Tom réfléchissait à toute vitesse. Il mit les mains dans les poches de son immense veste et sentit une carte en carton.
Il la sortit. C'était la carte de visite du restaurant où il avait emmené Bill la veille.

« J'ai une idée ! »

Il farfouilla encore un peu dans ses poches et en trouva sans problème deux autres. Il avait l'habitude de prendre toujours les publicités des endroits où il allait manger même s'il connaissait l'adresse par cœur

« Je reviens dans deux minutes. »
« Tu vas faire quoi ? » lui demande Georg intrigué.
« Montrer à Bill qu'on l'a retrouvé. »

Il traversa la route en courant et reprit une démarche normale une fois arrivé devant l'immeuble. Il repéra très rapidement les deux fenêtres qui sortaient de terre. Il marcha lentement et laissa tomber la première carte contre la vitre. Elle n'était pas très grande mais il espérait que ça suffisait. Il continua et laissa tomber la deuxième face à l'autre fenêtre. Et puis il se pencha, faisant mine de refaire son lacet et posa la troisième le plus en évidence possible, collée contre la vitre.

Il espérait sincèrement que Bill les remarquerait et reconnaitrait le nom de restaurant. Mais il avait une bonne intuition à ce sujet.

Il retourna à la voiture rapidement et rentra.

« Ca devrait être bon. »
« Reste plus qu'à prier pour que Bill comprenne le message et continue de nous donner des infos sur la situation en forçant ce type à se focaliser sur lui plutôt que sur une arrivée imminente de la police. » dit Georg.

Gustav augmenta le volume du haut-parleur de son téléphone et ils entendirent la voix de Bill.

« Bon on va parler un peu tous les deux. »
« Je ne veux pas te parler, je t'ai dit de la fermer ! »

Tom sourit.

« Je crois qu'il a parfaitement compris. »

Il aperçut la bouche de Gustav s'étirer elle aussi en un léger sourire. Il sentit un fol espoir s'insinuer en lui, et si son chef proposait tout simplement à Bill de rester ? Il l'aimait bien et c'était un bon élément pour lui. Avec une proposition de boulot à Berlin peut-être que Bill n'aurait plus de raisons de repartir ?
Il secoua la tête, ce n'était pas le moment de penser à tout ça. Il fallait sortir le brun de là d'abord. Le reste ils aviseraient plus tard.

« Arrête, je suis sûr que tu as des choses à dire, je le sens. Tu sais quoi ? On va demander à ta cousine d'aller devant la porte, elle surveillera que personne ne rentre et on va discuter. »
« Et de quoi tu veux qu'on parle, j'ai juste envie de te tuer là. »
« Mais tu ne le feras pas, parce que ce n'est pas ce qui t'attires. Tu ne voulais pas les tuer toutes ces femmes hein ? »
« Ferme la. »
« Je sais que tu ne voulais pas le faire, mais tu n'avais pas le choix, elles avaient refusé. Comment est-ce que tu aurais pu les laisser partir ? »

Un long silence suivit.

« Qu'est-ce que tu en sais ? »
« Je te l'ai dit, je comprends beaucoup de choses, et je te comprends. On n'a rien d'autre à faire là de toute façon, fais sortir ta cousine et on va parler. »

« Ca marchera jamais. » dit Tom. « Il croit quoi qu'avec deux pauvres phrases il va réussir à le convaincre ? »
« Tu sais je pense que ce mec se sent seul et incompris de tous, si Bill parvint à lui faire croire que lui peut l'écouter il fera ce qu'il dit. »
« Mouai... »

« Bien ok, mais pas longtemps. Lisa va m'attendre devant la porte. »
« Mais. »
« J'ai dit, va m'attendre devant la porte, et ferme bien surtout. »
« D'accord. »

« J'hallucine ! » lâcha Tom.

Georg rigola.

« Après tout ce temps tu n'es toujours pas au courant que Bill obtient toujours ce qu'il veut ? »
« Et en attendant il a réussi à les séparer. On peut récupérer Lisa sans faire trop de bruit et après on ne sera face qu'à une seule personne. Il est bon ce petit, il est bon. »

Le commissaire se parlait à lui-même, plutôt impressionné par la facilité qu'avait Bill pour diriger le comportement des gens. Il semblait déceler ce que l'autre voulait et le lui donner pour ensuite pouvoir le faire agir comme il le voulait C'était une technique imparable.

« Bien maintenant on est deux, tu vois il ne se passe rien de mal. »
« Tu as dit que tu comprenais. Pourquoi ? »

La voix de l'homme était toujours aussi dure.

« Parce que tu cherches quelqu'un à aimer, tout le monde cherche ça. »

L'homme ne répondit pas.

« Je sais très bien ce que sais, croire que quelqu'un est fait pour vous et puis cette personne vous rejette, ça fait mal, ça met en colère. »
« Elles n'ont pas le droit de me repousser ! » explosa-t-il enfin.

Gustav hocha lentement la tête.

« Il tente de le faire craquer, s'il lâche prise on aura beaucoup plus de chances de terminer tout ça dans le calme. On va lancer une opération, il faut arrêter Lisa en silence. Deux équipes vont bientôt partir. Préparez vous à intervenir, ça ne va pas tarder » ordonna-t-il dans la radio branchée à côté du volant.

Ils focalisèrent à nouveau leur attention sur le dialogue entre Bill et l'homme.

« Elles étaient belles » continua Bill sur un ton doux et compatissant « elles étaient très jolies, intelligentes, gentilles avec tout le monde. Des femmes parfaites. »
« Elles m'ont fait croire que je leur plaisais ! Et dès que je m'approchais d'elles elles me repoussaient ! Elles n'avaient pas le droit ! »

Un claquement très bruyant se fit entendre. Apparemment une chaise ou quelque chose d'autre venait d'atterrir contre un mur.

« On va y aller, j'ai pas envie qu'il retourne sa colère contre Bill. L'avantage est qu'il a totalement oublié sa cousine, ça devrait se passer sans trop de problèmes. » dit Gustav en vérifiant son arme.

« Alors tu les a tuées, tu n'avais pas le choix, tu ne pouvaient pas les laisser en vie après qu'elles t'aient fait ça. Elles n'étaient pas parfaites finalement. »
« Non, non ! Elles étaient sournoises, vénales ! »
« Et tu voulais une femme sans défaut, une épouse modèle. »
« Je voulais quelqu'un de bien ! »
« C'est pour ça que tu n'utilisais pas toutes les pièces dans les maisons et les appartements où tu as vécu, c'était leur endroit réservé. »
« Une épouse fait la cuisine, elle fait le ménage, les lessives. Je ne pouvais pas entrer dans la cuisine, non, impossible. » sa voix était saccadée, il se parlait à lui-même plus qu'à Bill. Il était en train de rentrer dans une crise de folie.

« On bouge maintenant ! » ordonna Gustav.

Tom bondit hors de la voiture et ils traversèrent la route avec les autres policiers. Il ne put s'empêcher de penser que Bill avait une fois de plus trouver l'une des réponses à ses questions. L'homme n'utilisait que la chambre et la salle de bain parce que les autres pièces étaient pour sa future femme.
Encore un qui avait une vision très égalitaire du couple.

Ils passèrent dans un trou fait à même les planches qui bloquaient l'entrée. L'espace était étroit mais avec un peu de souplesse c'était faisable. Une fois à l'intérieur ils avancèrent le plus silencieusement possible.

Ils descendirent les marches en béton et se retrouvèrent très vite à l'étage inférieur. L'homme qui dirigeait l'équipe d'assaut donna ses ordres en faisant des gestes précis que seuls lui et son équipe comprenaient. Ils arrivèrent dans le coude que formait le couloir qui les mènerait tout droit à la dernière pièce du bâtiment et donc à Bill.

Tom se surprit à prier de toutes ses forces pour que tout se déroule bien.

L'action se passa extrêmement rapidement, il n'eut pas le temps de réaliser que déjà trois policiers revenaient en arrière avec Lisa, une main sur sa bouche pour l'empêcher de crier.
Ils remontèrent les escaliers avec elle et disparurent à l'étage pour l'enfermer dans le camion en attendant de la transférer au commissariat.
Cette fois elle ne pourrait plus nier.

Tom souffla, la première étape venait d'être franchie. Il ne restait plus qu'à enfoncer la porte et à délivrer Bill sans que personne ne meure, rectification, sans que le brun ne meure, l'autre il s'en foutait.

Ils arrivèrent bientôt face à l'épaisse porte. Ils tendirent l'oreille et perçurent quelques bruits, des voix étouffées, mais rien d'autre.
Si Bill avait reçu le message il avait dû s'arranger pour se déplacer et mettre l'homme dos à celle-ci. Et le connaissant il y était parfaitement parvenu.

Le policier compta jusqu'à trois et il enfonça brutalement la porte. Tous les autres flics pénétrèrent à l'intérieur, bondissant sur l'homme, le désarmant d'un coup de pied bien placé et le plaquèrent contre le mur. Ses poignets furent très vite retenus par des menottes et Tom se précipita à l'intérieur pour retrouver Bill.

Il était debout, souriant mais affaibli. Il accourut vers lui.

« Putain Bill ! Bill ça va ? Tu vas bien ? Dis moi quelque chose. »

Le brun esquissa un léger sourire et hocha la tête. Tom n'en pouvait plus, il se jeta dans ses bras et le serra contre lui aussi fort qu'il le pouvait.

« Putain, putain, putain... » répétait-il sans s'arrêter.

Il n'arrivait pas à réaliser qu'il l'avait enfin retrouvé, qu'il allait bien. Il était totalement ailleurs, il sentait juste le cœur de Bill battre fort dans sa poitrine et ça lui suffisait.

« Tom, tu m'étouffes un peu là. »

Tom le lâcha à contre-cœur et Bill rigola.

« Je vais bien, je te jure. »
« Je t'avais demandé de ne plus me refaire un truc pareil ! »

Mais son ton n'était pas méchant, il n'arrivait pas à lui faire de reproches, pas dans cette situation.

« Je suis toujours en vie, je tiens toujours mes promesses je te l'avais dit, c'est le plus important non ? »

Il lui lança un regard tout mignon et tendre et le dreadé ne put s'empêcher de le reprendre dans ses bras. Bien sûr qu'il se foutait de tout le reste, Bill était là, contre lui et en vie, le reste importait peu.

Il finit par se retourner vers ses collègues, il les avait laissés faire tout le sale boulot. Il ne savait même pas exactement ce qu'il s'était passé, si l'homme avait été blessé, s'il avait opposé une résistance ou non.

La scène qu'il vit le surprit un peu. L'homme marchait, encadré par tous les policiers de la brigade, il était un peu amoché au visage à cause du choc de l'arrestation mais il allait plutôt bien. Ce qui le surprit était le petit sourire que l'on pouvait voir sur ses lèvres.

« Il va pas bien ce type ? Il est content d'être enfin arrêté ou quoi ? Dans ce cas il aurait pu se rendre dès le début ça nous aurait évité pas mal de problèmes. »

Il entendit le rire cristallin de Bill s'élever dans la pièce à présent pratiquement vide et il se retourna vers lui.

« Je lui ai fait comprendre que des dizaines de femmes seraient impressionnées par son palmarès et qu'elles lui enverraient des tas de lettres pour discuter avec lui. Je lui ai aussi dit que ces femmes ne voulaient qu'une chose, le rencontrer dans des parloirs et se marier avec lui pour le soutenir dans cette épreuve. »

Tom écarquilla les yeux.

« Quoi ? »
« Il est persuadé qu'il va trouver la femme de sa vie en étant en prison c'est tout. » dit Bill fier de lui.

Tom éclata de rire. Le stress avait été trop grand et imaginer que l'homme s'était rendu sans résistance parce que des femmes allaient à tout prix vouloir se marier avec « le tueur en série le plus célèbre d'Allemagne » l'avait entrainé dans un fou rire incontrôlable.

Le monde était dingue pensa-t-il. Mais à cet instant précis il n'en avait plus rien à faire. Il prit la main de Bill et il l'emmena hors de cette pièce et de toutes les horreurs qu'elle représentait.
Ses collègues semblaient avoir compris qu'ils voulaient rester tous les deux et après s'être assurés que Bill allait bien ils les laissèrent se retrouver.

Georg ne put s'empêcher de prendre Bill dans ses bras.

« Heureusement que t'es encore en vie, je n'avais pas spécialement envie de récupérer Tom dans le même état que la dernière fois. Merci. » lui souffla-t-il à l'oreille.

Le blond l'entendit mais ne releva pas. Georg avait raison.

« Tu dois aller à l'hôpital ptit gars d'accord ? Et après je pense que tu pourras prendre des vacances bien méritées. »

Il relâcha Bill de son étreinte et s'éloigna pour rejoindre ses collègues en leur lançant un immense sourire.
L'androgyne se rapprocha de Tom.

« On va à l'hôpital à pied ? J'ai besoin de marcher. »
« Mais c'est à plus de trois kilomètres ! »
« Justement. »

Tom ne put résister au sourire de Bill et il accepta. Il détestait marcher mais il n'était pas en état de lui refuser quelque chose.

Ils se promenèrent de longues minutes en silence, se repassant en boucle les derniers évènements de la journée. Ils avaient encore du mal à réaliser que tout était fini. Ils avaient tellement attendu ce moment, y parvenir tournait une page de leur vie et finalement ils n'étaient plus tout à fait sûrs d'avoir envie de passer à autre chose.

« On l'a eu. » dit finalement Bill, brisant le silence.
« Ouai, on l'a eu. » répéta Tom.

Bill s'arrêta sur le trottoir.

« J'en reviens pas, il va finir en prison, c'est fini, c'est fini. »
« C'est fini. » répéta Tom.
« C'est vraiment fini ? » demanda Bill en relevant les yeux vers Tom.

Le blond acquiesça et alors Bill se jeta dans ses bras et se mit à pleurer sans pouvoir s'arrêter. Tom ne comprit pas immédiatement ce qu'il se passait mais il le serra toujours plus fort, lui caressant le dos en lui murmurant des paroles réconfortantes.
Il relâchait simplement la pression. Il avait dû tenir moralement pendant ces longues heures passées avec cet homme, il avait dû prendre sur lui pour garder son sang froid et ses idées au clair. Il était fatigué, il était las de tout ça, et il craquait tout simplement.

Tom ne savait plus s'ils étaient là depuis des minutes ou des heures. Il avait perdu tous ses repères depuis longtemps.
Finalement les sanglots de Bill se calmèrent et il finit pas se détacher de Tom.

« Je crois que j'avais besoin de souffler un peu. » dit-il le visage encore rempli de larmes.

Tom lui sourit et passa ses pouces sous ses yeux pour effacer les traces de maquillage qui coulait sur ses joues.

« Je t'ai toujours trouvé joli en raton-laveur de toute façon. »

Bill rigola un peu et essuya ses dernières larmes.
Leurs regards se croisèrent à nouveau. Bill avança son visage lentement, grappillant centimètre par centimètre. Tom n'y tenait plus, il combla l'espace qui les séparait et ses lèvres fondirent sur la bouche du brun. Ils gémirent, retrouvant cette sensation perdue depuis seulement quelques heures mais qui leur avait semblé être une éternité. Bill passa ses mains dans la nuque du dreadé pour approfondir le baiser et la langue de Tom se fraya un chemin jusqu'à celle de Bill.
Il retrouva la sensation de son piercing, de sa bouche sur la sienne, de leurs langues liées. Il en avait tellement besoin à cet instant.

Ils étaient en plein milieu d'un trottoir d'une avenue bondée mais ils n'y pensaient même pas. Ils voulaient juste oublier tout ce qu'ils avaient vécu et pour cela ils avaient besoin de se sentir.

Le baiser dura un moment délicieusement long et ils finirent par se séparer le souffle court et les yeux brillants.

« Au fait, très bien trouvée l'idée de la carte du restaurant... »

Tom sourit.

« Comme quoi je fais des choses bien parfois. »

Ils s'embrassèrent une dernière fois et ils reprirent leur marche vers l'hôpital en souriant et main dans la main. Ils n'avaient pas envie de se lâcher une seule seconde, ils voulaient être ensemble, collés, à jamais, parce qu'ils en avaient besoin.

[...]

Bill tira sur la fermeture éclair de son grand sac.

« Voilà, je crois que je n'ai rien oublié. »

Tom était assis sur la chaise derrière son bureau, il le regardait sans vraiment le voir. Il n'arrivait pas.

« Je... je crois qu'on devrait y aller, on va être en retard. »

Tom soupira et se leva sans un mot. Il mit sa veste, attrapa l'immense valise de Bill pendant que le brun se débattait avec ses deux sacs et son sac à main et ils sortirent du bureau. Tom marchait devant, toujours sans parler. Il ne pouvait pas.

Ils montèrent dans la voiture du dreadé après avoir mis les affaires de Bill dans le coffre et ils roulèrent en direction de la gare. Tom avait la gorge nouée, il ne réalisait toujours pas ce qu'il se passait. Il était totalement ailleurs.
Le trafic était fluide, pourquoi ? D'habitude il y avait toujours des embouteillages partout, ils auraient mis deux fois plus de temps pour faire le trajet et ils auraient peut-être raté le départ du train mais là non. Ils roulaient, encore et toujours.

Tom repensa aux derniers jours. C'était passé si vite. Ils étaient retournés chez lui après que Bill ait été gardé une journée en observation et ils s'étaient jetés l'un sur l'autre. Ils avaient fait l'amour dans chaque recoin de l'appartement de Tom, se donnant toujours plus de plaisir. Aucun d'eux n'avaient conscience de ce qui allait se passer après, ils ne voulaient pas y penser.

Ils étaient en vacances forcées pendant deux semaines. Deux semaines pendant lesquelles ils ne firent absolument rien, à part manger, faire l'amour, dormir, faire l'amour, sortir se balader, faire l'amour. Deux semaines magiques.

Et puis le dernier week-end était arrivé et avec lui ce qu'ils redoutaient tous les deux et qu'ils avaient pris bien soin de dissimuler au fin fond de leurs pensées.
Ils devaient reprendre leur vie. Tom dans son commissariat, avec ses collègues, ses nouvelles affaires et ses anciens dossiers qui s'empilaient toujours sur son bureau et Bill chez lui, avec ses amis, son métier, sa vie.

Cela s'était fait sans aucune discussion, sans paroles, Bill s'était levé ce dimanche matin et il avait fait ses valises, lentement, sous le regard triste de Tom. Il l'avait conduit au commissariat pour qu'il puisse récupérer les affaires qu'il avait laissées là bas et toujours sans aucun mot échangé le dreadé était en train de le conduire à la gare.

Au bout de la rue le bâtiment commença à se dessiner. Tom n'avait jamais autant haï un endroit qu'à cet instant. Il aurait voulu qu'un ouragan vienne tout détruire.
Il se gara sur le parking et sortit les valises du coffre. Ils marchèrent en silence vers le hall et Bill repéra la voie où il devait se rendre sur les panneaux d'affichage.

Tom ne savait même pas pourquoi il l'avait accompagné. Depuis le début de cette journée il faisait n'importe quoi. Il laissait Bill ranger ses affaires, il l'aidait à partir, il l'avait conduit ici. C'était absolument n'importe quoi, du grand et du beau n'importe quoi. Mais il ne savait pas quoi faire d'autre. Alors il faisait ce que Bill attendait de lui. Il l'aidait et il l'accompagnait.

Le train était déjà à quai, Bill hissa sa valise à l'intérieur du wagon et Tom lui passa les autres sacs. Bill les rangea dans l'espace prévu à cet effet et il revient se mettre devant la porte.
Tom était là, une marche en dessous de lui.

« Euh.. je veux dire... à bientôt. » dit timidement Bill.

Tom releva les yeux vers lui.

« A bientôt. »

Bill descendit la petite marche et se mit à côté de Tom. Il s'avança doucement vers lui et le serra dans ses bras. Tom avait mal, il ne voulait pas de ça mais il ne put s'empêcher de répondre à cette étreinte. Il respira l'odeur de ses cheveux à pleins poumons, il imprima les formes de sa taille et grava toutes ses sensations dans sa mémoire à tout jamais.

« On se reverra rapidement j'espère. »

Tom acquiesça. Il n'avait pas le cœur à parler.
Bill prit son visage entre ses mains et il posa délicatement ses lèvres sur celles du dreadé. Le baiser resta en surface, léger et plein de tendresse. Il ne dura que quelques secondes, il les fit souffrir mais ils en avaient besoin.

Et puis l'androgyne s'écarta, fit un dernier signe à Tom et monta dans le wagon sans se retourner. Il ne voulait pas que le blond voit ses yeux se remplir de larmes, et Tom ne voulait pas que Bill ressente que ses entrailles se déchirer peu à peu.

Le contrôleur siffla un coup fort et les portes se fermèrent. Le blond releva les yeux vers le train et il aperçut Bill assis de l'autre côté de la fenêtre. Il ne contrôlait plus ses gestes, sa main se leva et se posa sur le verre. Celle de Bill suivit.

Et le train démarra.

Tom eut une désagréable sensation, il avait toujours trouvé les séparations sur les quais d'une gare ridicules et totalement pathétiques. Ca faisait filme Hollywoodiens de base et c'était trop cliché pour lui. Mais là il se foutait de tout et de ce que les autres pouvaient penser, il voulait juste garder Bill encore un peu pour lui.

Il marcha à côté du train et puis la vitesse augmenta, Tom courrait maintenant et il ne sut pourquoi mais une boule monta du fin fond de lui-même et il cria.

« Reste ! Je t'aime ! Reste ! Bill ! »

Bill pleurait maintenant sans retenue, toujours la main posée sur la vitre. Il esquissa un faible sourire et Tom put lire sur ses lèvres « je t'aime aussi » avant que le train n'accélère encore et que Tom dut le laisser filer au loin restant au bout du quai déconnecté et choqué.

[...]

Il ne savait pas depuis combien de temps il était là, seul, les yeux perdus dans le vague. Mais il sentit une main derrière lui. Il se retourna, c'était Georg.

« On va manger un morceau ? »
« J'ai pas faim. »
« Ok. »

Georg le prit par le bras et l'entraina en dehors de la gare. Il n'avait pas eu de mal à le trouver, Bill devait partir aujourd'hui et après avoir fait le tour de quelques voies il avait repéré son ami qui semblait immobile face aux rails.

« Je te ramène chez toi. »
« Je suis venu en voiture. »
« Je te ramène chez toi et je reviendrai chercher ta voiture. » recommença Georg.

Tom ne voulait pas de ça, mais il n'avait pas la force de répliquer. Ils montèrent dans la voiture et démarrèrent laissant la gare derrière eux. Georg finit par briser le silence.

« Je savais qu'il allait te casser. » dit-il.

Tom releva les yeux vers lui et pour la première fois de la journée un faible sourire prit place sur ses lèvres.

« Il ne m'a pas cassé, il m'a réparé. »

Georg ne comprenait pas. Il voyait son ami triste et abattu à côté de lui, comment pouvait-il être réparé comme il le disait ?
Et puis il perçut une petite lueur au fond de ses yeux, une lueur qui était réapparue quand Bill avait débarqué en ville, une lueur qui était toujours présente même si elle était très lointaine. Et là il comprit. Bill l'avait forcé à s'ouvrir et à redonner sa confiance à quelqu'un. Il l'avait fait retomber amoureux, chose que le dreadé s'interdisait depuis trop longtemps.
Alors oui, peut-être qu'il l'avait réparé finalement.



[...]



Andréas arrêta le moteur de sa toute nouvelle voiture de sport noire. Il avait pris un crédit sur environ les deux cent cinquante prochaines années pour se la payer mais il y tenait. Il avait même inventé une toute nouvelle expression pour justifier son achat, « nouvelle voiture pour une nouvelle vie ».

Parce que oui il changeait de vie. Il avait décidé de tout plaquer pour enfin tenter sa chance et réaliser ses rêves. Il déménageait, direction Berlin, la capitale, lieux de tous les possibles.

« Putain, je le sens de plus en plus mal. »

Andréas rigola, plus ils se rapprochaient et plus Bill devenait chiant.

« Tu l'as déjà dit, et ça va aller, aies confiance pour une fois. »

Bill soupira mais se tut. Oui, il fallait qu'il y croit, après tout il s'était lancé, il n'allait pas faire marche arrière maintenant.

Un jour Andréas était venu chez lui les yeux brillants et l'excitation peinte sur son visage, le brun n'avait pas eu besoin de fouiller bien loin pour découvrir que son ami lui réservait l'une de ses surprises dont il avait le secret.
Il avait décidé de devenir comédien et pour cela il s'était inscrit dans une prestigieuse école de théâtre à Berlin. Et bien évidemment il voulait que Bill parte avec lui.

C'était une idée tellement dingue que Bill avait éclaté de rire. Eux ? Déménager à Berlin ? Pour de vrai ? C'était totalement irréalisable. Mais Andréas avait déjà pensé à tout et il avait des arguments contre chaque objection de Bill.
L'androgyne pouvait demander un poste dans n'importe quelle ville du pays il l'obtiendrait. L'affaire du tueur en série avait été très médiatisée et Bill était devenu un policier très respecté dans le métier. Il ne serait pas seul vu qu'ils partaient à deux. Et en plus il y avait Tom.

Et c'était bien le but de la manœuvre.

Ils ne s'étaient pas reparlés depuis le jour où Bill avait quitté Berlin, laissant l'homme qu'il aimait sur le quai dans un scène digne d'un grand film romantique.
Aucun d'eux n'avaient eu le courage d'appeler, d'envoyer un mail ni de faire le voyage jusqu'à l'autre. C'était trop dur, cela remuait trop de souvenirs et entrainerait trop de questions.

Ils avaient besoin de temps. Et ce temps ils se l'étaient accordés.

Deux mois s'étaient écoulés depuis ce fameux jour. Deux mois pendant lesquels chacun avait tenté de reprendre sa vie et ses habitudes. N'oubliant pas ce qu'ils avaient vécu mais s'en servant comme une force dans leur relation avec les autres.
Ils avaient tellement évolué pendant ces quelques semaines passées ensemble, ils avaient changé, et ils ne voulaient pas redevenir les personnes qu'ils étaient avant.

« Je crois que c'est cette rue. »

La voix d'Andréas sortit Bill de ses pensées. Il reconnut sans peine l'immeuble de Tom et son cœur se serra.
Quand Andréas lui avait proposé de venir il avait mis un certain temps à se décider et puis ils'était lancé. Il avait pris le temps de réfléchir à tout ça, et il espérait que Tom l'ait fait aussi. Il s'était posé la bonne question, que voulait-il réellement ? Et la réponse lui était apparu de façon si évidente qu'il s'était senti idiot de ne pas avoir sauté le pas avant.

Il voulait Tom. Peu importe où, peu importe comment, il le voulait tout simplement.

« Dépose moi là. »

Andréas arrêta la voiture sur le côté de la route et coupa le moteur. Bill sortit et déchargea ses valises, les mêmes que Tom l'avait vu fermer avant qu'il ne reparte.
Il était chargé au maximum, il avait emporté toutes ses affaires, et il y en avait beaucoup. Après quelques minutes d'efforts tous ses bagages étaient sur le trottoir.

« Tu ne veux vraiment pas que je vienne, au moins pour t'aider avec ça ? »
« Ca ira, j'ai besoin de le faire seul. »

Son ami acquiesça.

« Je t'appelle si jamais j'ai besoin que tu viennes me chercher. » dit Bill.
« J'espère que tu ne le feras pas. »

Andréas lui fit un clin d'œil, redémarra la voiture et s'éloigna. Il avait prit un petit appartement quelques rues plus loin, si jamais Bill avait besoin il pourrait venir habiter avec lui, la collocation serait drôle. Mais Bill espérait qu'il dormirait ailleurs que chez son ami ce soir.

Il déplaça ses valises une à une devant la porte de l'immeuble et attendit. Il ne voulait pas appuyer sur l'interphone. Un quart d'heure plus tard une dame sortir finalement et Bill bloqua la porte avec l'un de ses sacs. S'en suivit un drôle de manège. Il bougeait ses bagages un par un, remerciant le ciel qu'il y ait un ascenseur dans cet immeuble. Une fois tout rentré à l'intérieur il appuya sur l'étage de Tom, il arriva enfin et il put voir cette porte qui lui faisait tant peur face à lui.

Il passa les dix minutes suivantes à sortir toutes ses valises et nombreux sacs de l'ascenseur et à les mettre devant la porte de l'appartement de Tom.

Quand il eut enfin fini il souffla un grand coup. Il se regarda dans un petit miroir, repassa un coup de brillant à lèvres et se recoiffa un peu pour se donner un air un peu plus présentable.
Et il appuya sur la sonnette.

Cette fois il y était.

Il entendit des pas à l'intérieur et le verrou s'ouvrit. Et puis Tom apparut, ses dreads relevées et attachées avec un gros élastique, il portait un bas de survêtement large qui tombait sur ses hanches fines et un débardeur exceptionnellement près du corps.

« Salut. » dit Bill avec le plus d'assurance dont il disposait, c'est-à-dire pas beaucoup.

La bouche de Tom s'ouvrit, et se referma.
Bill décida de prendre les devants. Il attrapa une valise et un sac et il entra dans l'appartement.

« J'ai besoin de la moitié de ton armoire, d'un placard à chaussures et d'une étagère entière dans la salle de bain. »

Il se retourna vers Tom qui n'avait toujours pas bougé, bloqué devant la porte ouverte.

« Et tu peux m'aider à porter mes valises si tu veux. » rigola-t-il.

Tom réagit enfin et regarda Bill, encore sous le choc et puis il regarda à nouveau la porte et le tas de valises qui se trouvait devant.

« Tu peux rester bloqué là mais je ne disparaitrai pas cette fois. » dit Bill en souriant.

Un sourire de plus en plus grand se dessina sur le visage de Tom au fur et à mesure qu'il réalisait la situation. Il éclata finalement de rire, face à un Bill un peu perdu.

« Il y a un problème. » dit le blond.

L'angoisse remonta dans le ventre de Bill. Et si Tom ne voulait plus de lui ? Et s'il était passé à autre chose ? Et s'il voulait qu'il reparte ?

« Tes fringues ne rentreront jamais dans la moitié de mon armoire, il va t'en falloir une pour toi tout seul. »

Bill courut se jeter sur le dreadé sans réfléchir et il plaqua violemment sa bouche sur la sienne. Leur baiser étaient tout sauf tendre, il était plein d'envie, de colère et de rage, plein de bonheur, de passion et de frustration. Ils se réappartenaient enfin.
Et putain que c'était bon.

Ils ne pensaient plus à rien, ils avaient oublié les derniers mois et tout le reste. Ils se foutaient de tout. Ils étaient enfin là, ensemble.

Ils passèrent le reste de la journée à faire l'amour partout où il le pouvait, abandonnant totalement les valises de Bill sur le palier.
Ils retrouvèrent le plaisir qu'ils avaient eu toutes les autres fois, décuplé par leur retrouvailles et surtout ils n'avaient plus cette épée de Damoclès au dessus de leurs têtes. Bill était revenu, et il allait rester.

La nuit était tombée sur Berlin, ils étaient allongé sur le tapis, qui avait besoin d'un petit lavage maintenant, une couverture posée sur eux.

« Alors c'est quoi la prochaine étape maintenant ? » demanda Tom en passant lentement sa main dans les cheveux de l'androgyne.
« Je veux savoir ce que Georg est en train de raconter de compromettant sur toi à Andy. »

Le dreadé écarquilla les yeux.

« Tu les as laissés ensemble ? »

Bill hocha la tête en rigolant.

« Ils devaient se retrouver cet après-midi, Andréas m'a dit qu'ils avaient des tas de choses à se dire. »
« Mon Dieu je ne veux pas savoir ça ! »

Tom se passa la main sur les yeux et ils rigolèrent. Ca faisait tellement de bien se saisir sa chance et d'être heureux. Ils l'avaient mérité.

« Et il faut que j'aille voir ton commissaire pour qu'il me prenne dans son équipe. »

Tom sourit.

« Il ne devrait pas y avoir de problème, il te l'a dit avant de partir, il te réintègre quand tu le veux. Et puis apparemment on a besoin d'un genre de.... » il fit une tête étrange « flic-psy ou quelque chose du style, tu connais ? »

Bill le tapa gentiment.

« Avoue que sans mes compétences vous êtes totalement largués. »

Et Tom éclata de rire. Leur lutte se poursuivit toute la nuit, entre taquinerie et sexe. C'était comme ça qu'ils avaient toujours fonctionné après tout, sauf que là il y avait de l'amour en plus.

Quelques heures plus tard le téléphone de Tom sonna, les tirant tous les deux du sommeil.

« Allô ? » répondit Tom d'une voix endormie.
« Ramène toi on a un cadavre. »

Le blond gémit.

« Je dors là ! »
« Rien à faire, j'ai besoin de toi, et ramène la mec qui dort à côté de toi, on a besoin de lui aussi. » dit Georg en rigolant et il raccrocha.

Tom grogna.

« On doit aller bosser. »
« Mmh... Je suis pas encore intégré. »
« Ben apparemment si. »
« Je hais ce job. » se plaignit Bill.

Il voulait dormir, avec Tom et pas aller courir derrière un criminel. Et d'ailleurs depuis quand on pouvait travailler sans avoir été embauché.

Il sentit les lèvres de Tom dans son cou.

« Mais moi tu m'aimes ? »

Bill sourit.

« Ouai je t'aime. »
« Moi aussi. » répondit-il en l'embrassant doucement. « Alors tu bouges tes sublimes fesses et tu viens bosser avec moi. »

Bill ouvrit les yeux. Finalement il avait bien envie de chasser un tueur, parce qu'il ne serait plus le seul à le faire.

« D'accord. » concéda-t-il enfin « mais je veux avoir une discussion avec Andy avant, je veux savoir ce qu'il a appris. » rigola Bill.

Tom cria.

« Jamais ! Tu fais ça je te tue ! »
« Je te tuerai avant... » dit malicieusement le brun. « D'ailleurs dès ce soir, je vais te tuer dans la chambre, et je te tuerai encore dans la salle de bain... et puis peut-être aussi dans la cuisine. »

Tom sourit perversement.

« Heureusement que j'ai plus de vie qu'un chat alors ! »
« En effet.. » répondit Bill en rigolant.
« Espèce de tueur en série... »
« Pareil. »

Ils rigolèrent et s'embrassèrent une dernière fois avant de se lever pour une journée de travail et pour toutes celles d'après.

FIN

 

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