Chapitre 11

T om entend la portière arrière s'ouvrir puis se refermer. Il regarde automatiquement dans son rétroviseur. Son fameux client a une casquette vissée sur la tête. Il ne voit pas encore son visage mais la casquette, il la reconnaît immédiatement.

- Sors.

L e ton du dreadeux est catégorique et froid. Bill en baisse un peu plus le visage durant un instant avant d'enfin le relever pour croiser le regard du blond dans le rétroviseur. Et là Tom a comme un blocage. Il voit le vrai visage de Bill. Pas le visage maquillé d'il y a quelques jours. L'androgyne est fatigué, on voit bien que quelque-chose ne va pas. Tom est prêt à parier que le brun a maigri alors qu'il était déjà mince pour sa taille. Mais il essaye de ne pas se démonter.

- Sors Bill.

- Tom... S'il-te-plait...

L a voix du styliste est cassée et son ton est suppliant. Le cœur de Tom s'accélère.

- Si c'est encore pour te foutre de moi...

- Non ! Je veux juste... Parler, rien d'autre. Je te demande simplement de m'écouter, rien de plus.

T om détache son regard de celui de Bill pour regarder la rue. Il semble réfléchir et se dit qu'il doit être trop gentil. Ou trop amoureux. Il glisse ses mains sur le volant et soupire.

- Je t'emmène où ?

B ill est surpris mais un très léger sourire étire ses lèvres.

- Roule, n'importe où. Tant que tu m'écoutes.

T om démarre la voiture et s'engage dans la rue. Il ne dit rien pour le moment et Bill non plus. Le dreadeux regarde par quelques coups d'œil dans son rétroviseur comment réagit le brun. Ce dernier regarde par la fenêtre, comme avant. Aucun mot n'est échangé durant quelques minutes.

- Tu as vu la nouvelle collection ? , finit par lâcher le styliste.

- Oui. En même temps, je ne risque pas de la rater vu toutes les affiches de la ville.

- J'avoue. Et tu en penses quoi ?

- Je ne trouve pas normal que tu en retire tout le mérite en sachant que tu as tout piqué sur moi. J'aurai dû toucher un pourcentage.

C ette remarque a pour effet de faire rire l'androgyne. Un rire sincère. Tom ne peut s'empêcher de sourire en l'entendant. Cela fait si longtemps qu'il n'a plus vu un Bill aussi vrai. Le silence s'installe à nouveau. Tom continue de rouler dans les rues de sa ville. Il ne veut pas engager la conversation. Rien que de savoir Bill à l'arrière de sa voiture le rend nerveux. Il a peur de se faire avoir à nouveau. Il a surtout peur de replonger. Ses sentiments sont toujours bien présents.

- Tu me manques Tom...

- Arrêtes ça Bill.

- Je ne te mens pas Tom ! Tu crois vraiment que j'aurai fait tout ça si c'était pour me foutre de toi ?!

T om ne rajoute rien. Au fond de lui, il sait que Bill a raison, qu'il ne ment pas. Mais voilà, il a été blessé et pas qu'un peu. Et la blessure est toujours présente. Il entend à nouveau les paroles de Bill, lui disant qu'il n'avait fait ça que pour le remercier de l'avoir sauvé. Les mots font toujours mal.

- Je suis désolé pour tout ce que j'ai dit ce jour-là. J'ai été con. Je me suis laissé avoir par ce rôle que je me donnais. Et le pire, c'est que j'ai blessé la personne qui compte le plus pour moi.

C ette fois-ci, les mots le touchent. Tom se sent encore plus nerveux. Il essaye de rester concentré sur la route et évite le plus possible de croiser le regard de Bill dans le rétroviseur. Il serait capable de s'arrêter, d'aller à l'arrière de son taxi pour embrasser Bill. Mais il doit éviter de penser à tout ça. Il doit juste rouler et amener Bill à un endroit. Il ne fait qu'écouter le styliste qui reprend la parole.

- Ce soir-là, quand tu m'as repoussé alors que j'étais venu jusqu'à chez toi, j'étais bouleversé. Je ne voulais pas que tu me laisses. Tu étais mon point de repère Tom. Alors je me suis renfermé pour me consacrer à quelque-chose, cette collection. Je l'ai faite en ne pensant qu'à toi. Tu es mon inspiration Tom. Sans toi je ne peux rien faire.

C es mots touchent toujours le dreadeux mais il s'empêche de répondre quelque-chose. Il ose tout de même regarder dans le rétroviseur et croise les yeux chocolat de l'androgyne. Son regard est criant de vérité. Bill a retiré son masque et se dévoile vraiment au chauffeur. Tom en est troublé et détache son regard pour s'occuper de la route.

- Tu te souviens quand j'ai commencé à changer ? , demande le styliste.

- Oui.

- C'était quand ?

- Après ton premier voyage à Paris quand je travaillais pour toi.

- J'avais donc raison. Tu es la seule personne à voir le moindre changement chez moi. Tu es le seul à faire attention à moi, comme cette fameuse nuit où tu m'as sauvé.

T om ne sait pas quoi répondre. Enfin si, une question lui brûle les lèvres mais il ne sait pas si Bill lui répondra. Alors il préfère se taire mais il se rappelle du regard du brun. Il est sincère.

- Pourquoi avoir changé dans ce cas ?

B ill baisse automatiquement le visage et se met à jouer avec ses doigts. Le dreadeux attend une réponse.

- Parce-que j'avais peur. Je me suis forgé une carapace. En fait, j'ai eu peur de mes sentiments pour toi. Quand je suis allé à Paris, je me suis lié d'amitié avec un créateur de mode. Mais il m'a mis en garde. Si je veux continuer mon métier, continuer à être connu, je ne dois pas m'attacher. Encore moins à mon personnel.

T om se gare alors sur le bas-côté. Sans vraiment savoir comment ni pourquoi, il vient d'arriver à l'un de ses endroits préférés. Il s'est arrêté près d'un parc qui est très peu fréquenté. Il aime venir se ressourcer ici. Fumer une cigarette tout en s'asseyant sous un arbre. Le dreadeux finit par se retourner pour enfin faire face à Bill. Il est toujours aussi magnifique.

- Et alors ? , réplique le chauffeur. T'en penses quoi de ce conseil ?

- Je... Il avait tord. Je préfère laisser tomber ma carrière et vivre avec quelqu'un qui m'apprécie pour ce que je suis réellement. J'ai juste été suffisamment con pour avoir blessé cette personne et l'avoir perdue.

T om soupire légèrement et finit par sortir du taxi. Il s'adosse à son véhicule et se met à fumer une cigarette. Il ne sait pas quoi penser de tout ça. Bill a l'air sincère mais Tom ne veut plus souffrir inutilement. Il tire une taffe et expire doucement la fumée de cigarette. La portière arrière de son taxi s'ouvre pour laisser apparaître le styliste. Il a retiré sa casquette et Tom le trouve toujours aussi beau avec les cheveux lisses.

- Et toi ? Ton boulot ça va ? Et ton ami Georg ?

T om finit de fumer sa cigarette et l'écrase par terre. Il soupire légèrement et fixe le sol.

- Tu veux vraiment savoir ce qu'il se passe dans ma vie ?

I l marque une légère pause pour tourner le visage vers Bill. Il enfonce ses mains dans ses poches et fixe le brun.

- Ou tu veux savoir ce que je pense de tes déclarations ?

B ill baisse automatiquement le visage. Il a peur de se faire rejeter à nouveau. Il a peur que Tom lui balance ses quatre vérités et s'en aille. Il sent alors les doigts du dreadeux sur son menton pour lui relever le visage. L'androgyne 'n'ose pas le regarder durant quelques secondes mais finit par planter ses yeux dans les siens. Après tout, il doit faire face à ses conneries et assumer.

- Ce que tu m'as dis ce jour-là m'a vraiment blessé Bill.

- Je sais. Je suis désolé et... , commence le styliste.

- C'est à moi de parler Bill , le coupe le chauffeur. Je t'ai écouté, c'est à toi de le faire maintenant.

L e brun ne fait qu'hocher la tête en se pinçant les lèvres. Après tout, c'est au tour de Tom de s'exprimer sur le sujet.

- Ce jour-là, tu m'as comme anéanti Bill. J'avais de vrais sentiments pour toi et quand tu m'as dit ça... Je ne t'ai pas baisé Bill, je t'ai fait l'amour. Et toi, tu m'as dit ça comme ça... Alors je n'ai pas voulu me faire avoir une nouvelle fois et je t'ai repoussé. Avec énormément de mal je t'assure.

B ill baisse à nouveau le visage mais Tom le retient en lui caressant la joue. Le brun en ferme les yeux. La chaleur qui émane de la main du blond lui fait tellement de bien.

- Ça fait un mois que je me sens vide Bill, qu'il me manque quelque-chose. Je n'ai fait que penser à toi. J'ai lu tes interviews. J'avais les yeux rivés sur l'écran de télévision pendant le défilé, attendant de te voir toi. Je n'en reviens toujours pas de ce que tu as fait, cette collection.

B ill ouvre enfin les yeux pour les planter dans ceux de Tom. Il ne dit toujours rien, attendant que le dreadeux finisse.

- Mais je ne veux pas risquer de me rapprocher pour finalement me heurter à ce rôle si abject que tu as construit. Je ne peux pas me permettre d'en souffrir à nouveau.

T om lève sa main libre pour la poser sur l'autre joue du brun. Bill attrape les poignets du dreadeux et les entoure de ses mains.

- Fais-moi confiance Tom. J'ai fait la plus grosse erreur de ma vie en te blessant et en te laissant partir. Tu me manques Tom. Reviens moi.

T om sait alors que Bill pense le moindre de ces mots. Ses pouces caressent les joues de l'androgyne avec extrêmement de douceur. Mais avant, il doit vraiment être sûr de tout.

- Dis-le-moi Bill. Prouve-moi que ce que l'on ressent est vrai et...

- Je t'aime Tom , le coupe le brun.

L e chauffeur en ouvre les yeux de surprise. Il ne pensait pas que Bill prononcerait ces mots si importants. Le dreadeux rapproche son visage de celui de Bill et pose son front contre celui du styliste.

- J'espère que ce que tu dis est vrai et que tu y crois. Parce-que je suis amoureux de toi Bill Kaulitz.

E t avant que l'androgyne ne puisse dire quoi que ce soit, Tom pose ses lèvres sur celles de Bill. Le baiser est tout d'abord timide et traduit un nouvel échange entre eux. Tom continue de caresser les joues du brun et l'une de ses mains glisse dans la nuque de Bill. Leurs lèvres se cherchent, se caressent. Le baiser s'approfondit enfin. La langue du brun vient timidement à la rencontre de celle de Tom. Le baiser qu'ils échangent est rempli de douceur et d'amour. Bill colle son corps à celui du blond, entourant la taille de ce dernier de ses bras. Les deux jeunes hommes en frissonnent de bonheur. Ils ont attendu ce moment depuis si longtemps. Ils ont tous les deux soufferts de ce mois de séparation mais aujourd'hui ils sont enfin ensembles. Le baiser se termine par quelques frôlements de lèvres, puis un chuchotement.

- Viens chez moi , murmure Bill.

T om plante ses yeux dans ceux du brun et lui sourit légèrement. Comment refuser ? Mais avant, Tom aimerait faire quelque-chose d'autre. Ils remontent tous les deux dans le taxi, Bill à l'avant. Leurs mains sont liées comme pour se rassurer que tout est vrai. Le dreadeux se gare devant l'immeuble de Georg. Bill l'interroge du regard mais Tom ne lui dit rien. Quand Georg ouvre la porte, il a le droit de se retrouver avec son meilleur ami dans les bras lui murmurant des mercis. Georg hallucine encore plus en voyant le célèbre styliste chez lui. Mais Tom ne lui laisse pas le temps de plus comprendre qu'il est déjà reparti avec le brun pour aller chez ce dernier.

D eux corps qui se fondent l'un dans l'autre. Un trop plein d'amour à évacuer. Un amour incommensurable. Les coups de rein du blond se font plus rapides alors que le brun réclame un nouveau baiser. Leurs gestes sont coordonnés. Un léger sourire entre deux halètements. Des 'je t'aime' à n'en plus finir. Ils n'en peuvent plus, leurs corps sont recouverts de sueur mais ils continuent encore et encore à se prouver leur amour. Un cri, suivi d'un deuxième cri de plaisir. Le corps de Tom retombe mollement sur celui de Bill qui l'entoure de ses bras. Un nouveau baiser est échangé.

- Reprends ton boulot auprès de moi Tom.

- Oh et en plus du salaire, j'aurai le droit aux faveurs du patron ?

B ill en sourit légèrement. Il embrasse rapidement les lèvres du dreadeux.

- C'est d'accord , répond Tom. Et je devrais te conduire où ? , demande-t-il tout en butinant le cou de son amant.

- Tu conduis déjà mon cœur, et ça me suffit amplement.

U n sourire, un baiser, un amour. Et c'est tout ce qui compte.

FIN CHAPITRE 11

 

drive my heart menu

 

NAVHAUT