CHAPITRE 5
Andreas, Bill et Tom rentraient chez eux après l'école, un vendredi, bavardant avec entrain des plans de l'après midi. Ils s'apprêtaient à aller à la maison des jumeaux, à manger un morceau, et puis à aller traîner au magasin de disque. Ca commençait à devenir quelque chose d'habituel. Andreas était rapidement devenu ami avec Mr Kaufmann, le propriétaire du magasin de disque.
Aussi, Tom, Bill et Andreas devenaient inséparables.
« J'en ai mis une dans ses cheveux, » dit Tom, éternuant. « Une boulette de papier dans ses cheveux de sorcière. »
« Elle l'a mérité, » répondit Bill, debout sur l'arrière du skate de Tom. Il portait un pantalon noir avec un jean déchiré par-dessus, une longue chemise verte à manche avec une veste violette en velours, et environ une dizaine de colliers. Il avait des bottes de neige, et un peu du maquillage le plus lourd qu'Andreas ne lui avait jamais vu porter aux yeux. Sur sa tête était perché un petit chapeau en feutre. « Elle faisait vraiment sa salope avec toi, Andreas. »
« Je m'en fiche, » dit Andreas, haussant les épaules. Il trottinait doucement à côté d'eux, appréciant l'exercice. Il n'avait pas couru depuis la dernière fois qu'il avait joué au foot. « C'était marrant, quand même. Je me demande si elle est toujours dans ses cheveux. »
« J'espère qu'elle a levé les bras et l'a sentie, » dit Tom. « C'était vachement gluant. »
« Ew, » couina Bill, directement dans l'oreille de Tom. Il avait ses mains sur la taille de Tom. Andreas était toujours choqué d'à quel point ils étaient proches. Ca semblait normal, enfin, du moins pour eux.
« Putain, je meurs de faim, » annonça Tom.
« Tu viens juste de manger un énorme paquet de chips ! » dit Bill.
« C'était presque rien, » dit Tom, fronçant les sourcils. « J'espère qu'on a des restes d'hier soir. »
« Qu'est-ce que vous avez mangé ? » Demanda Andreas. Son ventre commença à gargouiller.
« Des lasagnes, » répondirent les jumeaux.
« Ca a l'air bon… » Andreas ralentit. Plus haut, quelques boîtes aux lettres plus loin, se trouvait un groupe de gamins de l'école. Ils observaient les trois garçons. Bill sauta du skate et ralentit. « On devrait pas faire demi-tour ? » dit doucement Andreas.
Bill garda la tête haute. « Non. »
Tom s'arrêta et retourna sa planche. « Bill, attends. »
« Ce sont les monstres, » déclara méchamment un des garçons les plus grands. « Qui est leur ami ? »
« Fermez votre gueule, » leur dit Tom, calmement.
« Oooh, » répondit un autre. « Un skateur, un homo, et un punk. »
Andreas haussa les sourcils. Il supposa que c'était lui le punk.
« Venez, » dit le premier jeune. « On vous laisse passer. »
« Bien sûr. » Sourit un troisième. « Nous ne voulons pas d'ennuis. »
Bill doubla Andreas et Tom et commença à marcher vers les garçons. Tom grogna doucement et jeta un regard à Andreas. Andreas fronça les sourcils. Il commençait à se sentir nerveux.
Un des garçons, appuyé sur une boîte aux lettres, ne quittait pas Bill des yeux. Quand Bill approcha d'eux, Andreas poussa un soupir de soulagement. Il ne semblait pas que quoi que ce soit allait arriver.
« Pourquoi tu ressembles à un monstre ? » demanda méchamment un des garçons à Bill.
Bill lui fit un doigt d'honneur, son majeur levé pendant quelques instants alors qu'il le dépassait. « Putain, » murmura Tom. Andreas le regarda.
« Sale petite merde, » dit le plus grand garçon, et il saisit Bill. Il le poussa contre le trottoir et le tint fermement par le col. Andreas se mordit fort la lèvre. Il ne voulait pas regarder mais il ne pouvait également pas détacher son regard. Près de lui, Tom était figé.
Les garçons poussèrent Bill jusqu'à une boîte aux lettres ouverte et lui enfoncèrent la tête dedans. Andreas regardait le trottoir quand il entendit les cris étranglés de Bill. Il ne pouvait pas regarder d'avantage.
« Putain mais arrêtez ! » hurla finalement Tom, courant droit sur le groupe. Un garçon costaud repoussa facilement Tom et Tom tomba en arrière, balançant rageusement ses poings. « Dégagez vos foutues mains de lui ! »
Andreas resta en arrière, regardant la bagarre qui se déroulait sous ses yeux. Il se sentait comme accroché au sol, complètement inutile. Le garçon costaud retenait Tom pendant que les autres claquaient le couvercle de la boîte aux lettres à plusieurs reprises sur le cou de Bill. Bill ne luttait même plus. Il ne faisait aucun bruit.
« Laissez -le, enculés, » hurla Tom d'une voix si coléreuse et passionnée qu'Andreas crut qu'il pleurait. Ce n'était pourtant pas le cas, bien que son visage soit écarlate et que son expression soit la plus furieuse et la plus désespérée qu'Andreas ait jamais vue chez qui que ce soit.
« Très bien, » dit le garçon qui retenait les bras de Bill. « Laissez-le partir, vous avez entendu le monstre. »
Ils filèrent tous et Bill tomba par terre, le visage dans l'herbe. Le gros garçon poussa Tom avec plus de force et Tom tomba en arrière, atterrissant sur son épaule.
Avant que quelqu'un ait pu faire quoi que ce soit, le groupe de garçons s'était éloigné.
Andreas courut vers les jumeaux et resta debout à côté d'eux, ne sachant pas quoi faire. Tom se leva, semblant sur le point de cogner la première personne qu'il verrait. Il posa les yeux sur Andreas. « C'était quoi. »
« Je ne sais pas, » fut tout ce que dit Andreas. Ils se tournèrent tous les deux et Tom se laissa tomber près de Bill.
« Bill, » chuchota Tom. « Bill, ça va, ils sont partis. »
« Va-t-en, » dit Bill d'une petite voix.
Andreas s'agenouilla avec Tom. « Bill ? »
Bill leva le regard. Son visage était rouge et sa joue saignait. Il pleurait beaucoup, tremblant, les yeux écarquillés et brillants. Tom le releva et passa un bras autour de lui. « Rentrons à la maison, » marmonna-t-il.
Bill hocha la tête et regarda Andreas. Cela lui brisa complètement le coeur. Ils marchèrent lentement et en silence jusqu'à la maison des Kaulitz. Bill reniflait et pleurait légèrement, sa tête enfoncée dans l'épaule de Tom et ses mains agrippées à la taille de Tom. Tom paraissait tellement énervé. Tout ce qu'Andreas pouvait faire était de suivre derrière eux, portant le skate de Tom et le sac de Bill.
Quand ils entrèrent dans la maison, Bill courut directement à sa chambre. Tom donna un coup de poing dans le canapé et Andreas plia ses bras, fixant le sol.
« Où sont vos parents ? » demanda-t-il doucement.
Tom haussa les épaules et s'assit, regardant droit devant lui. « Et ce n'était même pas le pire qui soit arrivé, » dit-il d'un ton plat.
Andreas hocha lentement la tête. « Ca va aller pour lui ? »
« Il faut lui laisser quelques minutes seul. Putain,” marmonna Tom. “Je ne pouvais même pas faire quelque chose parce que ce connard… putain. »
« Pourquoi ils lui font ça ? » Andreas ne comprenait pas vraiment. Bill était étrange, mais ce dont il venait juste d'être témoin était vraiment violent.
« Ils nous détestent, » répondit Tom. « Putain, c'est juste qu'ils nous détestent. J'ai aussi ma part, mais c'est Bill qui s'en prend le plus.”
“Je pige pas,” dit honnêtement Andreas.
Tom leva le regard, surpris. « Vraiment. Ben, t'es genre, le seul qui pige pas. » Il s'allongea sur le dos et donna des coups de pieds dans le vide. « Je déteste quand ils me retiennent. »
« Je ne sais pas si tu aurais pu faire quoi que ce soit. »
« J'aurais pu essayer, » dit Tom. « Putain, je déteste quand les gens touchent à Bill. C'est mon frère. Personne ne peut le toucher. J'ai envie de les tuer pour l'avoir touché. »
Andreas ne savait pas quoi dire à ça. « Tu devrais pas aller t'assurer de son état ? »
« Si, on devrait. » Tom se pencha en avant et se releva, soupirant. « Maman va m'exploser. » »
Ils montèrent les escaliers et Tom frappa à l'autre porte. « Bill, on entre. »
Il n'y eut pas de réponse. Tom ouvrit la porte et il faisait sombre à l'intérieur. Andreas le suivit, restant derrière lui parce qu'il n'était pas sûr d'être invité. La dernière chose qu'il souhaitait était de rendre Bill encore plus mal à l'aise.
Andreas n'y voyait pas grand-chose, mais il pouvait voir que la chambre était propre. Il n'y avait rien par terre. Il y avait peu de posters sur le mur, un de Nena et un autre de David Bowie. Il y avait des habits qui dépassaient de l'armoire.
Au milieu de la chambre se trouvait un lit, et Bill était assis dessus, affalé et tremblant.
« Bill, » dit Tom, s'asseyant immédiatement à côté de son frère et caressant son dos. Bill leva le regard et vit Andreas.
« Tu es encore là, » dit-il doucement.
« Evidemment, tu veux que je parte ? » demanda nerveusement Andreas.
« Non. A moins que tu le veuilles. »
« Putain, je vais les tuer, » dit Tom avec colère. « La prochaine fois que je les vois… je vais les buter. »
« Ne le fais pas, » dit Bill, posant une main sur le genou de Tom. « Ils vont te tuer. »
« J'essaierai. »
« Tomi, non. »
Tom fronça les sourcils. « Quand je les verrai à l'école demain - »
« Ne fais rien, » dit Bill, reniflant. Il commença à pleurer encore plus fort, enfonçant son visage dans ses mains. Le saignement s'était arrêté. Andreas remarqua la formation d'un gros bleu sous sa mâchoire. Bill semblait toujours incroyable, cependant. Andreas pensait tout le temps qu'il était beau.
« Je vais aller chercher de la glace, » dit Tom à Bill. « Ne bouge pas. »
« Ok. »
Tom quitta la chambre et Andreas s'assit sur le bord du lit. « Tu es sûr que tu vas bien ? » demanda t-il.
« Putain je peux pas croire qu'ils m'aient vu pleurer, » fut tout ce que dit Bill, fixant le lit avec des yeux vides. « Putain ça fait bien mal mais je m'en fiche. Je veux juste qu'ils ne sachent pas qu'ils peuvent me faire pleurer. »
« Et aussi ils n'auront pas d'ennuis pour ça, » dit faiblement Andreas. Il avait été ami avec des enfants comme ça. Ces gamins se tiraient de toutes les situations.
« Je m'en fiche, » dit Bill. « J'espère que Tom ne va rien essayer. Il ne gagnera pas. »
« Je ne pense pas que tu puisses l'empêcher d'essayer, » répondit Andreas. « Il est vraiment fou de rage. »
« C'est toujours comme ça que ça se passe, » dit Bill, les larmes coulant librement sur ses joues. « Pourquoi tu t'es assis avec moi ce jour-là ? Comment tu peux même vouloir être ami avec moi ? T'as pas vu ça ? Et tu vois toutes les merdes qu'ils me font au bahut. Tu dois être tordu, sans vouloir t'offenser. »
Andreas secoua la tête. « Je ne le suis vraiment pas du tout. »
« Pourquoi, alors ? » Bill semblait complètement misérable. « Tu pourrais être ami avec n'importe qui si tu voulais, ça se voit. »
« Je sais. »
Bill gémit. « Je ne te comprends pas. »
« Ok. » dit prudemment Andreas. « Si je voulais être ami avec quelqu'un d'autre… Je le serais. »
« Je ne te crois pas. » Bill eut un sanglot et renifla. « Tu vas vite nous laisser tomber. »
« Je ne te laisserai pas tomber, » dit Andreas. « Ni Tom. Mais surtout toi, je ne te laisserai pas. »
« Conneries. »
Andreas soupira légèrement. Bill avait des problèmes de confiance et Andreas ne l'en blâmait pas. Andreas aurait aimé pouvoir offrir plus de réconfort. Il aurait aimé pouvoir dire à Bill à quel point il le trouvait génial, et à quel point il le poussait à vivre plus fort. Mais est-ce que Bill se fichait de savoir qu'il était la seule et unique chose à laquelle Andreas pouvait penser ?
Bill s'allongea et remonta ses genoux. « Je suis désolé, » dit-il, fatigué. « Je suis juste déprimé. »
« Je comprends. » Andreas regarda finalement Bill. Bill était toujours tremblant, et son visage était noir de saleté, de larmes, et de sang. Un autre bleu se formait sous son œil droit. « Je les tuerais aussi, si tu me le disais. »
Bill sourit un peu. « J'ai le pouvoir. »
Andreas rit doucement et Tom revint dans la chambre, tenant tout un bac à glaçons. « Putain, je n'ai pas réussi à trouver un sac où les mettre. Maman est à la maison, au fait. »
« Depuis tout le temps ? »
« Ouais. » Tom donna le plat à Bill et Bill fit une grimace.
Andreas se leva. « Il est tard, je dois y aller. »
« J'aurais bien aimé que tu ne doives pas partir, » dit doucement Bill.
Tom haussa les épaules. « A demain. » Il se tourna vers Bill et toucha son visage. Bill tressaillit et appuya son front sur l'épaule de Tom.
« Bye, » dit Andreas, sur le pas de la porte. Bill lança un dernier regard par-dessus l'épaule de Tom avant qu'il ne ferme la porte.
Andreas descendit les escaliers, un lourd poids sur les épaules. Il voulait juste être dans sa chambre et s'allonger jusqu'à s'endormir. Pourtant, il avait le sentiment qu'il serait dur de s'endormir, après ce dont il avait été témoin. Il ne pouvait pas se sortir Bill de la tête, l'image de lui pleurant était gravé dans son esprit pour toujours.
Il garda les poings serrés sur tout le trajet du retour.
***
Andreas fixa avec des yeux vides le bureau inoccupé dans la classe de français le jour suivant. Tom était arrivé en retard, après que le professeur ait commencé, donc Andreas n'avait pas encore eu l'occasion de lui parler. Il espérait que Bill allait bien. Il ne lui reprochait pas de ne pas venir à l'école, mais il était tout de même inquiet.
Tom avait sa tête enfouie dans ses bras repliés. Il ne faisait pas son cirque habituel, ne provoquait aucun trouble ni de dérangeait la classe, Bill n'était là pour le regarder par-dessus son épaule toutes les deux minutes. Ca rendait Andreas nerveux. Tom semblait aussi n'avoir pas dormi depuis un an. Il avait des cernes sous les yeux et ses cheveux tombaient mollement autour de son visage. Il portait les mêmes habits qu'hier, remarqua Andreas.
Andreas regarda droit devant lui et essaya de rester attentif. Le cours était bientôt fini. Il fit docilement son travail, prit des notes, et écouta la prof jusqu'à ce que la sonnerie retentisse.
Tom se leva lentement et saisit ses livres, puis commença à s'éloigner sans même jeter un regard à Andreas. Andreas se mit derrière lui et marcha.
« Hey, » dit Andreas.
Tom leva rapidement les yeux. « Oh, salut. »
Andreas fronça les sourcils. « Qu'est-ce qui se passe ? »
« Bill est resté à la maison. »
« Je m'en suis douté… Il va bien ? »
« Ca ira mieux, » répondit doucement Tom. Ils marchèrent lentement jusqu'au hall, une foule de gens autour d'eux. Andreas n'avait jamais été si suspicieux et paranoïaque, en traversant le hall de l'école. Il avait l'impression qu'ils allaient tous leur tomber dessus.
« Dure nuit ? » Andreas regarda Tom.
« Ouais, on a veillé et parlé toute la nuit. On est allés au vieux cinéma et on s'est assis… Il était vraiment déprimé, » marmonna Tom. « L'a pleuré presque toute la nuit. Alors il est resté à la maison. »
Ils arrivèrent au casier de Tom et Bill. Tom l'ouvrit et posa quelques livres dedans. « J'aimerai mieux qu'ils balancent plutôt toute leur merde sur moi, » dit Tom, presque dans un souffle. Andreas dut se pencher pour l'entendre. « Bill ne mérite pas ça. Il ne peut pas supporter ça. Je devrais sécher le reste des cours et aller traîner avec lui. »
« Je viendrai, si tu veux, » proposa Andreas, sachant que c'était une mauvaise idée. Il voulait vraiment voir Bill, cependant.
Tom fit un sourire de travers. « Ouais, ok. On pourrait lui amener à manger. »
« Comment on fait pour sécher juste comme ça ? » Andreas sentit ses joues rougir. « On sort simplement ? »
Tom hocha la tête, sortant son sac de son casier. « C'est tout. Allons-y. »
« Pas de skate aujourd'hui ? » Demanda Andreas pendant qu'ils commençaient à marcher.
« Pas de skate, » répondit faiblement Tom. « C'est pour ça que j'étais en retard. »
Ils tournèrent le coin et se retrouvèrent dans le dernier couloir avant de pouvoir s'échapper quand Andreas vit le groupe de garçons du jour d'avant. Il ralentit. « Tom. »
« Quoi ? » Tom continua de marcher. Andreas le suivit, appréhendant. Quand ils furent devant les garçons, l'un d'eux vit Tom et s'approcha.
« Hey, » dit-il fortement.
Tom continua à marcher.
« Hey, » répéta le garçon, marchant devant Tom et lui touchant l'épaule. Tom ralentit et le fixa, ses poings se serrant.
« C'est quoi ton problème ? » répondit Tom d'un ton égal.
« Du calme. On veut juste demander, » dit le garçon, souriant en coin. « Comment va Bill ? »
D'une manière ou d'une autre Andreas sut, à ce moment, saisir brutalement Tom parce que Tom bondit rageusement en avant. Andreas l'attrapa par le dos de sa chemise et maintint fermement ses bras.
« Putain, tu ne parles plus de lui, » dit rageusement Tom au garçon, qui était en train de rire. « Va te faire foutre, d'accord ? Va te faire foutre, va te faire foutre, va te faire foutre . »
« Arrête, » dit doucement Andreas. « Rappelle-toi ce qu'a dit Bill. »
Tom lutta encore un peu. Les autres garçons du groupe rirent cruellement. « Putain, je vous tuerai si vous le touchez encore, » leur dit Tom, sa voix basse et ses yeux noirs. « Je le jure. »
« Oooh, » dit l'un d'eux, levant les yeux au ciel.
Tom fit un bruit étranglé et cracha sur la chaussure du garçon. Le garçon s'éloigna, en colère, et se moqua de lui. « Restez loin de lui, » dit Tom, sa voix presque cassée. « Faites-moi ce que vous voulez mais pas lui . Compris ? »
Andreas tira Tom en arrière. « Viens. »
Le groupe de garçons rit juste et repartit. Celui qui avait tenu Bill le jour d'avant jeta un regard en arrière et Andreas lui fit un doigt d'honneur, se surprenant lui-même. Le gros garçon le fixa puis retourna avec ses amis. Andreas réalisa qu'il venait juste de sceller son propre destin en tant que monstre de l'école.
Tom sembla se relaxer alors Andreas le relâcha. Il regarda attentivement Tom, se demandant ce qui aurait pu arriver s'il il n'avait pas été là pour retenir Tom. Il se serait battu contre eux pour Bill, Andreas le savait très bien, et ce ne se serait pas bien terminé. Andreas savait que Tom ne s'en souciait pas.
« Tu vas bien ? » lui demanda Andreas.
Tom hocha la tête, comme abasourdi. « Allons-y, je ne peux pas rester dans ce merdier une seconde de plus. »
Les deux garçons sortirent de l'école. Ils étaient à mi-chemin de la maison des Kaulitz avant qu'Andreas ne réalise qu'il ne s'était même pas inquiété quant au fait de se faire attraper. Pas une fois.
***
Le film hurlait dans la télévision du salon. Andreas et Bill étaient en train de paresser chez Bill un vendredi soir, vautrés sur le canapé et mangeant des casses croûtes. Tom répétait avec Georg et Gustav chez Georg et Bill avait choisi de ne pas y aller, se plaignant d'un mal de gorge.
Simone déambula dans le salon et sourit à Bill et Andreas. « Vous voulez autre chose les garçons ? »
« Maman, arrête de nous goinfrer, » dit Bill, roulant sur le dos « Je ne peux plus rien avaler. »
« Qu'est-ce que vous proposez ? » demanda Andreas. Bill lui balança un coussin.
« Sandwichs ? Cookies ? Fruits ? Tout ce que tu veux, » répondit Simone. « Enfin, du moment qu'on en a. »
« Ugh, » gémit Bill. « Non, désolé, j'ai besoin d'une pause. Va-t-en, maman. »
Simone rit et tapa gentiment Bill sur la tête. « Andreas, est-ce que tu veux quelque chose ? »
« Non, ça va, merci, » dit Andreas, souriant. Simone embrassa le haut de la tête de Bill et puis ébouriffa les cheveux d'Andreas. Andreas se dégagea, mais sourit.
« Bonne nuit, les garçons, » leur dit-elle. « A demain. »
Bill s'affala un peu plus sur le canapé et regarda Andreas. « Tu as vraiment faim ? »
« Je peux toujours manger, » dit honnêtement Andreas. « Mais ça va pour le moment.
« Désolé pour elle, » dit Bill, faisant une grimace.
« Ne le sois pas. »
Bill ramena ses genoux à sa poitrine et massa l'arrière de son cou. Il était toujours un peu blessé depuis la semaine précédente. Andreas lui jeta un coup d'œil. Bill portait un jean et un T-shirt bleu qui disait « Wildcats » sur le devant avec de grands chiffres. Ses cheveux étaient plats et il ne portait aucun maquillage. Ses pieds étaient nus.
Andreas ne l'avait jamais vu aussi au naturel, et cela fit un peu se serrer son coeur.
« Je pense que je veux me faire piercer la langue, » dit Bill, tapant en rythme sur son ventre. « Je ne sais pas. »
« Ouch, » répondit Andreas. « Ca ne vas pas faire foirer ton chant ? »
« Peut-être. »
« Tes parents te laisseront faire ? »
« Ils m'ont laissé faire ça, » dit Bill, souriant et tirant sur l'anneau sur son sourcil. « Je ne pense pas qu'ils s'en soucieraient… »
« Comment va ta gorge, au fait ? » Demanda Andreas, se souvenant pourquoi Bill était chez lui.
Bill sourit doucement. « Elle ne m'a jamais fait mal, elle va bien. Je n'ai juste pas eu envie d'aller là-bas avec les garçons. »
« Comment ça se fait ? » Andreas fronça les sourcils.
« Je voulais traîner avec toi, » dit doucement Bill, regardant Andreas. Ses yeux étaient brillants et sincères sans maquillage.
« Nous traînons ensemble tout le temps, » dit Andreas, riant un peu.
« Pas comme ça. Pas juste nous. »
Andreas hocha la tête et regarda ses genoux. Il rougissait encore, et c'était à cause de Bill. Il sentit du mouvement sur le canapé. Bill avait bougé et s'était installé très près de lui. Le film était fini à la télévision, et le générique défilait.
« Tu ne penses pas que tu manques quelque chose d'important aux répétitions ? » dit Andreas.
« Ce n'est pas vraiment une répétition. » Bill haussa les épaules et gratta le bas de son jean. « Ils m'auraient fait y aller si c'était important. En plus, Tom m'a dit de rester à la maison et de me reposer. »
« Il est vraiment inquiet à propos de toi, » commenta Andreas.
Bill sourit. « Ouais. »
« Ca ne t'a jamais ennuyé ? »
"Non, » répondit immédiatement Bill. « Je tomberais en morceau s'il n'était pas à mes côtés. Ca m'arrive souvent, de toutes façons. »
« Non, tu es formidable, » dit Andreas, et alors il rougit violemment. « Je veux dire, tu sais. »
« Tu penses que je suis formidable ? »
Andreas leva de nouveau les yeux. Bill l'observait soigneusement.
« Tu le penses ? »
« Ouais. » Andreas hocha doucement la tête.
Bill s'assit et se mit face à Andreas, son visage doux et léger. « Personne n'a jamais dit ça. Pas en dehors de ma famille, en tous cas. »
« Bien, quoi qu'il en soit, c'est vrai, » dit Andreas. Son ventre se nouait dans sa gorge.”
“Tu rougis.”
Andreas rit nerveusement. “J'ai l'impression que je vais gerber.”
“Ne le fais pas.” Bill sourit. « C'est dégueulasse. »
Le générique du film finit et la pièce devint silencieuse et sombre. Andreas se mordit la lèvre et jeta un coup d'œil à Bill, son cœur battant bruyamment dans sa poitrine. Bill se pencha doucement en avant et toucha le visage d'Andreas. Andreas ne recula pas, ne bougea pas, mais écarquilla les yeux.
« Bill, » murmura-t-il. Bill hocha la tête et pressa légèrement ses lèvres sur celles d'Andreas. Andreas ferma les yeux, sentant les doigts de Bill sur son menton. C'était la chose la plus douce, la plus apaisante qu'Andreas ait sentie depuis sa mère, et il trembla un peu.
Quand Bill se retira ils se fixèrent tous les deux.
« Je le voulais, » dit Bill. « Je ne suis pas désolé. »
« Je devrais y aller, » fut tout ce que dit Andreas. « Il est tard. »
Bill hocha encore la tête. Andreas se leva et fit un signe d'au revoir, puis sortit de la maison. Il marcha jusque chez lui comme étourdi et s'en ficha lorsque son père le gronda pour être sorti si tard.
Andreas savait que d'une manière ou d'une autre il était tombé amoureux du garçon étrange.
FIN CHAPITRE 5