CHAPITRE 5 JE T AIME BILL

 

Je l'aime. J'arrive pas ... à arrêter, à changer. Faire quelque chose pour que ça change. Et pourtant ... Dieu seul sait si j'en ai envie. Enfin, c'est pas réellement une envie. C'est juste que ... en sachant que c'est mal, je ne veux plus continuer. C'est mal. Ces deux mots que je me répète à longueur de temps et ... qui me détruise.
J'ai essayé. Plusieurs choses.

D'abord de tomber amoureux de quelqu'un d'autre. Et puis ... ben rien. J'ai pas réussi. C'est comme si Bill était LA personne la plus parfaite du monde à mes yeux. Que jamais quelqu'un d'autre ne pourrait le remplacer. C'est en partie vrai, puisque c'est quand même ... mon frère ... et jumeau en plus ...

Mein Gott, p'tit frère j'suis un monstre ...

J'ai pas le droit de te voir comme ça ... Je suis horrible. Si tu apprenais que ton frère t'épie tout le temps, te regarde comme si tu étais la 8e merveille du monde ... te 'mate'. Mon Dieu mais c'est vrai ! Je suis ... dégueulasse.

Quand tu n'avais que 13 ans, je commençais déjà ... à avoir ces ... sentiments, mais je ne savais pas ce que c'était. A force de voir, d'accumuler des expériences extérieures ... je sais ce que ces sentiments veulent dire.
Mais à cette époque, je croyais sérieusement que c'était de l'amour fraternel.
De l'amour de jumeaux.

Tu parles.

C'est effrayant quand j'y pense. 13 années. Je me rappelle tellement ... merde, j'ai failli le faire.
Nan, je l'ai fait. Je te l'avais dit ...
Je t'aime, Bill.

Je te l'avais dit, mais à ce moment tu ne savais pas. Trop jeune, comme moi.
Ouais, c'aurait pu être émouvant dans d'autres circonstances.
Là, c'était juste ... insignifiant.

Flash-back raconté par Tom

Tu étais devant moi, tu ne me regardais pas. Les larmes aux yeux, tu as commencé à pleurer. Ça m'avait brisé le cœur. Mais ... en y repensant ... ces larmes étaient méritées. Et puis tu m'en voulais à mort.

C'était dans des coulisses. Les coulisses de ce putain de show télévisé que toutes les Fans connaissent désormais. Et dont tu as honte. Faut dire que ... tu chantais pas aussi bien que maintenant et puis ... tu avais perdu. Je sais en moi-même que tu es super fier, parce que ce p'tit con qui avait gagné n'est pas aussi connu que toi maintenant. Je sais toujours tout de toi, Bill. Des pensées que tu crois cachées ... je les connais pratiquement toutes.

Tu m'en voulais d'avoir gagné le pari, et de ne pas être à ta place. Mais Bill, tu sais bien que même si j'avais perdu, c'est toi qui y aurais été. T'aimes trop chanter pour me laisser la place ... que je ne veux d'ailleurs absolument pas !

Mais à ce moment là, tu m'en voulais d'avoir perdu, tu m'en voulais d'avoir gagné, tu m'en voulais à moi et personne d'autre. Pourquoi ? J'ai encore du mal à le savoir. Je répondrais ... parce que. Mais bon, j'étais con (c'est pas prouvé qu'tu l'sois plus) et tout ce que j'ai trouvé à faire c'est ça. Te regarder alors que tu ne me regardais pas, et te dire « je t'aime, Bill » . Parce que je sentais toute cette animosité que je ne comprenais pas et qui me faisait si mal, en toi.

Et puis tu as relevé les yeux. Tes jolis yeux cerclés de noir et de cette couleur noisette que j'idolâtre. Et tu m'as dit d'une petite voix « t'es bien le seul maintenant » . Et ... sur le coup, ça m'avait fait très mal. Parce que j'avais bien compris qu'être le seul n'était pas un avantage.

Alors je t'avais pris dans mes bras jusqu'à ce que Maman arrive, donc quelques secondes plus tard, elle m'a viré et a prit le relais. J'avais mon petit cœur brisé. Peut-être que j'avais compris, allez savoir.

C'est la seule et unique fois ou j'ai pu te le dire sérieusement.
Après ça, je les ais évités comme la peste, ces deux mots.

Plus que tous.

Fin flash-back.

Qu'est-ce que j'en ai marre de ces sentiments. Tu m'as brisé le cœur tellement fois, sans même avoir une illusion de ce que tu pouvais me faire. Bien sur, qui penserait une seule seconde que son frère jumeau est amoureux de lui ?

Personne, parce que personne n'est assez con pour tomber amoureux de son frère jumeau.
Personne sauf moi.

Une main se pose sur l'épaule de Tom qui tressaille à ce contact, perdu dans ses pensées.
-« Tu viens ? » dit Gustav, sans rien demander de plus.

Toujours discret. Pas besoin de savoir. Si Tom a des problèmes, ça ne le regardera que s'il décide de lui en parler. Même si Tom ne se confie plus à personne depuis longtemps. C'est comme ça, et Gustav préfère nettement s'occuper de ses propres accrochages que d'en créer de nouveaux en s'insérant dans la vie des autres et les projets qui ne le regardent pas.

Finalement, le dreadeux se lève et emboîte le pas à son ami. Ils traversent les couloirs du studio, étroits et chaleureux. Ils croisent des gens qui les saluent s'ils ne l'ont pas déjà fait. Aucune réponse ne vient de Tom. Il ne sait pas quoi penser de ce qui lui arrive. Au niveau de ces sentiments qui réapparaissent si forts, et au niveau de ce problème physique qui vient troubler sa vie sexuelle mouvementée. Il se sent mal, en fait. Très mal.

Aujourd'hui, Tokio Hotel est fortement sollicité. Si Tom avait écouté les recommandations et explications de David, il aurait su que les journalistes avaient été avertis de (ou avaient découvert) la vente de ces albums dans un pays où n'importe quel groupe venu d'ailleurs voudrait percer : les États-Unis. La gloire la plus forte, pour le premier pays Mondial.

De ce fait, ils avaient plusieurs interviews aujourd'hui, qui leur prendrait très certainement la journée, avec la séance de dédicace de l'après-midi. Le lendemain, les attendaient, une séance photo aux environs de midi et enfin, ils seraient libres quelques jours. C'était toujours comme ça. Des tonnes de choses à faire pendant plusieurs jours, et puis plus rien. Ils pouvaient se reposer comme il se doit. Le calme avant la tempête ... ou, après la tempête. Selon l'angle de vue.

~
-« Malgré ce départ, vous ne pensez pas quitter l'Europe pendant longtemps ? » demande Nicolas du ONE Français.

Je lui souris franchement. C'est un journaliste que j'apprécie beaucoup. Je peux même parler au nom du groupe. Quand nous n'étions pas encore très connus en France, il est venu nous voir en Allemagne, comme aujourd'hui d'ailleurs. On avait fait une partie de foot. Ça m'avait fait rire de me dire que les fans croiraient qu'à cette heure-là j'étais entrain de me maquiller. Que voulez-vous les fans pensent des choses assez ... bizarres sur moi.

Enfin, il est là parce qu'il voulait absolument nous voir avant qu'on ne parte ... et ... nous n'avions pas prévu un passage par la France avant.

-« Bien sur que non. Dès notre tournée finie, nous reviendrons. On ne peut pas se passer de notre famille, je me tourne vers Georg , et ... de nos animaux de compagnie ! »

Mon Dieu, la tête qu'il fait. Nico me sourit. Il a l'habitude qu'on s'embête.

-« Quand pensez-vous partir, plus précisément ? »
-« Sans donner de dates, je crois que nous partons dans trois ou quatre mois. On aurait du partir plus tôt, mais ce n'est pas réellement nécessaire, et nous avons déjà passé des vacances à New-York. C'était super, mais nous étions en incognito. Aujourd'hui entre l'Allemagne et les USA, autant rester un peu plus longtemps ici. On a encore quelques retouches à faire sur le nouvel album, qui plus est. »

Nico regarde sa feuille de questions, dont plusieurs posées par des fans. Puis il relève la tête.
Je m'attends à nouvelle question.
-« C'est fini ! » dit-il, en appuyant sur le bouton Off de son magnétophone.

Nous soupirons en chœur, et il se met à rire.
Sans que j'aie rien vu venir, je sens une douleur à l'arrière de ma tête.
-« Aiiieuuuh ! »
-« Bien fait pour toi. » dit le Yéti avec sa bonne humeur habituelle.

Je souris légèrement, le regardant entamer une conversation avec Nico dans l'espoir qu'il ne publie pas ma répartie. Je ferme les yeux et me laisse aller dans le fauteuil. Mon Dieu, encore demain et on aura une soirée à nous ...

Pendant pratiquement toutes les interviews, Tom est resté muet. Se faisant parfois réprimander par les membres du groupe, et déranger par les journalistes trop curieux. Le dreadé n'a pas la tête à ça. Des questions. Encore des questions. Il s'en pose bien assez des questions. Sur son amour irrationnel et non contrôlable pour son propre frère jumeau. Sur cette apparition brutale d'un ... changement de sexe. Et de ces deux simples sujets, découlent déjà une quarantaine de questions qui défilent indéfiniment dans son esprit, le réduisant au silence le plus complet devant les êtres normaux.

A cet instant, Gustav a glissé son casque sur ces oreilles et comme à son habitude, deux baguettes à la main, s'entraîne sur les rythmes de ses groupes préférés. Y compris en s'écoutant lui-même ... appuyé contre le mur, regardant d'un œil désintéressé les gens qui l'entourent.

Georg supplie presque Nico d'enlever cette stupide phrase de son interview. "Ça ne lui coûtera rien" ... "non c'est vrai, mais c'est tellement plus drôle de la garder" ... "oui, mais c'est déjà la trente-deuxième fois qu'on le rabaisse dans un magazine ONE" ...

Et Tom est là. Appuyé sur un autre mur de la pièce, pas le même que Gustav, qui se trouve derrière le canapé. Tom est en face. Les yeux rivés sur l'objet de ses désirs.

Je suis répugnant. Je me hais moi-même mais ... putain ... qu'est-ce que j'ai envie de lui ! Pourquoi merde ?! Avant ... l'aimer ... spirituellement, ça allait, c'était différent ... ce n'était presque pas malsain. Mais là ... c'est ... immonde. J'ai des images , des scènes dégoûtantes à l'esprit et d'autant plus stupides qu'elles me viennent avec ma bite. Putain même mon corps a pas assimilé cette ... chose, de toute façon c'est toujours moi qui domine ... ... ... mais, mais ... ... comment j'vais faire ?!

C'est une question que Tom pouvait se poser, effectivement .


FIN DU CHAPITRE 5


 

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