Chapitre 21


- Bill ?

Tom tira d'un geste hésitant sur le grand rideau rouge de la cabine et écarquilla brutalement les yeux en faisant soudainement face à une énorme culotte verte et à la grand-mère sexagénaire qui y était intégré.

- Oh mon Dieu...

Il relâcha aussitôt le rideau comme bruler à vif et ferma durement les paupières en essayant d'oublier cette image traumatisante qu'il réussit par miracle à ne pas assimiler à une futur Aby.

- Heurk...

Il fit un pas en arrière, grimaçant en frottant sa langue contre son palais comme si un gout amer et écœurant s'y était déposé et parcouru rapidement la pièce des yeux en priant le ciel pour avoir ne serait-ce qu'un indice lui permettant de retrouver son idiot de meilleur ami, grommelant finalement encore une fois en se rapprochant des cabines.

- Bill ? Merde, Bill t'es où ?

- J'suis là !

Une main manucurée apparut soudainement derrière le tissu de la dernière cabine et il se précipita vers elle en remerciant le ciel d'être si clément avec son rythme cardiaque.

- Putain, j'ai cru que j'te retrouverais jamais ! Tiens... Il fit passer une pile de fringue à l'intérieur de la cabine d'essayage mais reçu une vilaine tape sur la main lorsqu'il essaya d'écarter le rideau.

- Même pas en rêve Tom !

- Bill tu fais chier ! Tu m'avais promit un défilé !

Un léger soupir d'exaspération s'éleva alors de derrière le rideau et il fronça les sourcils en se laissant retomber une énième fois dans le fauteuil mou et inconfortable face à la cabine. Ce fauteuil mou d'un « vert pomme » foutrement hideux qui semblait avoir prit la forme de son postérieur à force d'y être avachit pour patienter.

Homer Simpson sur son canapé.

Tom se faisait l'effet d' Homer Simpson à moitié avalé par son canapé, le ventre bedonnant et le paquet de chips souder à la main droite.

Affligeant.

Une demi-heure qu'ils étaient là et que Bill refusait catégoriquement de lui montrer ne serait-ce qu'un dixième de tout ce qu'il emmenait à l'intérieur de la cabine, prétextant attendre les bonnes fringues pour enfin se montrer, et Tom était allé jusqu'à se cacher comme un gamin derrière les rayons pour l'observer choisir un jean et se donner enfin une idée du look que monsieur avait en tête. Car oui, Bill lui avait bien évidemment interdit de rester dans les parages lorsqu'il choisissait ses fringues, l'envoyant gentiment paître dans le rayon des baggys en lui promettant de faire vite.

- « Faire vite » hein... Tsss ...

Tom se renfonça un peu plus dans son siège et plongea ses mains dans les grandes poches de son sweet en grommelant une fois de plus contre ce foutu rideau, épais et foutrement opaque lui faisant audacieusement face. « Et moi je me suis fait Pénélope Cruz tiens ... ». La vieille sortit de la cabine au même moment et elle lui lança un regard furieux qu'il préféra ignorer en louchant sur la moquette.

- Si c'était sensé être discret sache que j'entends tout Tom .

La vieille passa devant lui en sifflant et il s'enfonça encore un peu plus dans son siège avant de lever les yeux au ciel en chuchotant encore plus doucement. « A bon ? J'croyais que tu t'étais endormi tiens... »

- Je t'entends toujours !

Tom ferma lentement les yeux d'exaspération et la voix de Bill s'éleva une seconde fois dans la pièce. « Et puis excuse-moi mais si toi tu t'es fait Pénélope Cruz, alors j'imagine que je suis marié à Elvis Presley ».

Tom ne dit rien et se contenta de l'étrangler intérieurement. « Petit con . »

Et ce qui l'énervait encore plus, Tom, ce n'était pas de patienter comme un idiot en faisant la conversation au rideau, ni même de devoir endurer la vision d'une grand-mère en culotte lorsque Bill changeait de cabine sans le prévenir, nan. Ce qu'il l'énervait le plus, c'était de voir les yeux de Bill se mettre à briller comme ceux d'un gosse face à un trésor en passant devant un jean ou une paire de santiag, puis se détourner finalement piteusement vers un autre, plus loin, plus bas dans le rayon, large et fade comme ceux qu'ils avait déjà dans son armoire, avant de le prendre dans ses bras maigres et de repartir vers la cabine.

Incroyable. Bill était juste foutrement incroyable.

Tom s'était donc tout d'abord dit qu'il devait lui laisser un peu de temps pour oser choisir des fringues plus personnelles et plus audacieuses, et qu'il ne devait surtout pas le brusquer. Ne pas le brusquer et encore moins critiquer ses choix qu'il n'était d'ailleurs pas sensé connaitre, après tout, Bill avait déjà fait l'énorme effort de venir jusqu'au centre commerciale, ce centre commercial qui l'effrayait tant et Tom était déjà surprit par tant d'initiative venant de sa part. Bill l'avait juste soufflé en lui proposant ce relooking. Et ce changement de comportement était juste une magnifique preuve de son désir d'évoluer.

Seulement voilà, Tom n'était pas idiot.

Il avait bien vu la gêne et l'air perdu dans les yeux de son androgyne en entrant dans le magasin, puis ses doigts qu'ils ne savaient soudainement plus où mettre et le sourire faussement déterminé sur son visage crispé. Dans la tête de Bill tout leur lycée devait surement être là, autour d'eux, à l'ombre d'un rayon, prêt à se foutre de lui et à rire en l'observant choisir un jean ou une veste trop stylée pour lui. Alors oui, Tom comprenait. Tom comprenait et prenait son rôle d'Homer Simpson très à cœur.

Enfin très à cœur... Au début du moins.

Tout ces trucs qu'il se répétait mentalement afin de ne pas étriper son meilleur ami et toutes les excuses qu'il lui donnait intérieurement, assis sur son fauteuil vert pomme en observant ses jambes filiformes passer et repasser devant lui, c'était bien avant de le voir prendre un jogging, un jogging couleur crotte de chien, hideux, difforme, sans aucun doute de la taille de la grand-mère en culotte verte, et disparaitre derrière le rideau. Là, Tom n'avait pas pu, ça avait été trop pour lui. Alors il avait juste envoyé se faire foutre le Tom patient et compréhensif au fond de sa tête et s'était lui-même déplacer jusqu'aux rayons pour lui choisir personnellement ses fringues.

- Tom, qu'est-ce que ...

Fringues qu'il devait d'ailleurs justement être en train de découvrir.

- C'est pas ce que je t'avais demandé, tu.../ Oh mon Dieu !

Bon, des fringues certes un peu excentriques, -Bill allait l'étripé-, mais ça avait juste été un grand coup de cœur et il n'avait pas pu résister à l'idée que Bill les essaye.

- Tom espèce de salaud !

Un sourire amusé étira ses lèvres et il observa la tête brune sortir brusquement de derrière le rideau en fronçant les sourcils.

- T'es barge ou quoi ? J'vais pas essayer ça ! Pourquoi tu m'as pas ramené ce que je t'avais demandé ?!

- Oh pitié Bill, même ma grand-mère s'habillait plus classe que toi . Il se releva du siège en souriant et s'approcha doucement de lui. Essaye-les juste, tu verras bien si ça te plait ou pas...

- Je les ai vus Tom. Et ça me plait pas.

- Menteur.

- Tu fais chier... Il souffla durement d'agacement en observant le sourire taquin en face de lui et se mordit la lèvre inférieure pour s'empêcher de lui coller une baffe. Et arrête de sourire, merde ! C'est pas drôle !

- Ok ok ! Mais alors... Tom fit glisser d'un air joueur son doigt sur le tissu rugueux en souriant. Laisse-moi entrer ?

Son doigt fut instantanément broyer sous les délicates mains du brun qui disparut rapidement derrière le rideau, et Tom se recula lentement de la cabine d'un air fier et satisfait pour se rassoir en souriant dans son siège. Bill adorait ces fringues, ça se voyait comme le nez au milieu de la figure. Il le savait et ça le faisait juste jubiler de savoir qu'il était le seul à pouvoir l'obliger à les essayer.

Il allait être magnifique...




(...)




- T'en met du temps dis moi... râla-t-il faussement au bout de dix minutes en posant sa tête contre le dossier du fauteuil, souriant comme un idiot, déjà las de ne plus l'entendre geindre ou l'engueuler.

- Ta gueule Tom.

- Vilain ! Un sourire plus grand encore s'étira sur ses lèvres. On parle pas comme ça à ces amis tu sais ?

- T'es plus mon ami. J'te déteste.

- Oh... Alors comment elles sont ?

Un silence religieux se fit soudainement derrière le rideau, puis la voix de Bill s'éleva doucement derrière la cabine.

- Magnifiques putain ...

Tom secoua la tête en riant muettement et se mordit les lèvres, refoulant difficilement l'envie d'ouvrir le rideau et de prendre son meilleur ami dans ses bras. Bill pouvait être si foutrement adorable parfois...

- Aller Bill, montre-moi maintenant ...

Bill se pinça les lèvres et inclina une fois de plus la tête face au miroir, faisant lentement glisser ses yeux sur son reflet. Son reflet si difficilement reconnaissable et si douloureusement inconnu. Il avait cette boule, là, dans la gorge, qui l'empêchait de déglutir normalement et un sentiment effrayant de palpitation prêt du cœur. Ce cœur qu'il sentait ralentir mais battre plus fort et plus sourdement face au miroir. Ce corps. Son corps à lui, le sien, dans ce jean moulant et ce tee-shirt si court, la finesse de sa silhouette et la minceur de sa taille, soudainement si agréable, la cambrure de ses reins accentuée par l'étroitesse du tissus et puis l'arc des ses aines, si visible, les formes, les formes soudainement si apparentes, comme s'il n'avait jamais su qu'elles étaient là, la rondeur ferme de ses fesses, l'étroitesse de sa taille, et puis ses hanches, la blancheur de sa peau, le bas de son ventre, plat et discernable au dessus du jean, avec la ceinture tellement basse qu'elle semble posé sur son sexe. Bill se rapprocha du miroir et releva les yeux vers son visage, à quelques centimètres de la glace, qu'il se mit à fixer d'un regard effrayé et perdu.

Pourquoi est-ce que ça lui allait si bien ? Pourquoi est-ce que ces putains de fringues lui allaient si bien ? Il avait l'impression de se rencontrer, là, pour la première fois. Rencontrer le garçon qu'il avait toujours pensé devoir être, mais qu'il n'avait si douloureusement jamais été.

Ce mec dans la glace était tellement loin de lui. Ce mec lui avait toujours été tellement inaccessible, une vague idée, une forme floue, à peine avouée, auquel il s'associait secrètement durant ses rêves illusoires ou ses voyages intérieurs lorsque la musique remplissait sa tête et qu'il était seul pour oser s'imaginer autrement.

Et c'était douloureux. C'était douloureux parce que c'était tellement injuste, savoir qu'il n'avait jamais vu, qu'il n'avait jamais su se voir plus loin que le garçon brisé et sombre qu'il était, et qu'à cet instant tout était là, enfin, dans le miroir. Une évidence. Une amère évidence et l'impression douloureuse d'avoir perdue tellement de temps. Tellement de temps à ne pas exister dans ses propres prunelles alors qu'il était juste là, sous ses yeux, sous sa peau, dans la chair.

Ses pupilles s'humidifièrent doucement alors que face à lui se dressait le garçon qu'il avait toujours été mais qu'il n'avait jamais su voir, et dans ses rétines se fut soudainement une explosion de souvenir. Le bus. Les absences. Le lycée. Les profs. Les larmes. La musique. La peur. La solitude. Le rasoir. La CPE. Les larmes. Tom. La solitude. Le rasoir. Tom. Le miroir. Les crises. Tom. La musique. Tom. La place libre. Tom.

- Tom...
- Ouais ?

Il rouvrit soudainement les paupières et essuya d'un geste maladroit la larme qui perlait sur sa joue.

- Rien, rien. Laisse tombé...
- Tu veux de l'aide ?
- Nan nan c'est bon... Il se pinça les lèvres et passa brièvement un doigt sous ses yeux.
- Tu me préviens dés que t'as fini hein ? Tu me fais pas le coup du « j'ouvre le rideau tout habillé et j'ai déjà tout essayé c'est partit on peut y aller » ok ?

Un sourire attendrit s'étira sur ses lèvres en entendant le blond s'impatienter et il tourna une nouvelle fois ses yeux larmoyant vers le miroir. Qu'est-ce que ça pouvait bien faire finalement, qu'il ne devienne Bill que maintenant et qu'il ait été seul si longtemps... Il était maintenant un Bill avec un Tom.

Tom qu'il ne vit d'ailleurs pas entrer en souriant malicieusement dans la cabine...

Il était maintenant un Bill avec un Tom et plus rien ne comptait. Il n'était plus seul. Sa main manucurée se posa un instant sur la glace et il se dévisagea. Ce n'était définitivement pas les fringues qui avaient réussit à changer les traits de son visage, ni ce jean qui faisait briller d'avantage ses prunelles, nan, c'était juste cet idiot de dreadé. Tom l'avait tellement transformé...

Il plissa les yeux et s'observa encore un peu plus. Son regard était d'une douceur que lui seul avait pu lui infliger et il sut. Il sut qu'il ne serait plus jamais le même. Plus jamais le Bill triste, le Bill seul, le Bill qui n'avait pas su faire, le Bill un peu paumé. Nan, il était désormais le Bill avec le Tom... Tom faisait désormais partit du tableau et il se mordit la langue en se remémorant les yeux de son meilleurs ami toujours derrière le rideau.

- Bordel de merde, Bill ...

Les mots eurent à peine effleuré les lèvres de Tom que Bill sursautait violement et faisait volt face et en se collant dos au miroir, la main sur le cœur et les yeux écarquillés.

- Putain de merde Tom ! Préviens-moi quand c'est comme ça !

Et à son plus grand étonnement, ce fut le silence qu'il eut pour seule réponse. Le silence et puis les battements sourds et effrénés de son cœur qu'il sentait sous sa main posée sur sa poitrine. Parce que Tom n'ajouta rien. Il n'ajouta rien et ne lui cria même pas au visage. Il ne lui cria pas qu'il avait bien le droit d'entrer, qu'il avait poireauté pendant plus de trois quart d'heure et qu'il était fatigué de l'attendre, nan. Il resta juste muet comme une carpe et entre leurs deux corps seuls les battements sourds de son cœur et l'air sidéré de Tom.

Bill observa son regard interdit et le sourire taquin qui avait soudainement quitté ses lèvres. Tom avait juste les yeux braqués sur lui, les yeux braqués sur lui et l'air complètement abalourdis. Il sentit alors la chaleur s'emparer de tous les pores de sa peau et son visage se mettre à rougir violemment.

- Ça te plait pas ...

Tom releva doucement les yeux à l'entente de sa timide question et plusieurs secondes passèrent avant qu'un sourire ne s'étire lentement sur son visage.

- T'es superbe.

- Vraiment ? Un sourire que Tom n'avait alors encore jamais vu aussi timide s'étira doucement au coin des lèvres pourpres de Bill et il acquiesça en secouant légèrement la tête pour se reprendre. Vraiment. Tu... /Merde, putain j'en perds mes mots . Il gloussa doucement en hochant la tête et s'approcha de lui pour lui saisir le bras et le soulever. Bill sérieux t'es fait pour porter ces fringues !

- Exagère pas ! Bill rabaissa son bras en s'insultant intérieurement d'être si sensible aux compliments de Tom et se mordit la lèvre inférieure en souriant. Ca me va juste... bien.

- Juste bien ?! Un sourire ahuris prit forme sur ses lèvres alors qu'il détournait ses yeux du jean pour les planter dans les siens et il fit glisser mécaniquement ses doigts dans les cheveux ébène de Bill avant de le désigner en souriant. Bill tu vas me piquer tout les plus beaux mecs avec ce look !

Bill pouffa alors en rougissant d'avantage et Tom se pinça les lèvres en parcourant le corps de son meilleur ami des yeux. Il était complètement sur le cul face au changement que ces fringues entrainaient et il ne remarqua pas l'étonnement furtif passer dans le regard du brun lorsqu'il avait inconsciemment fait glisser ses doigts dans ses cheveux. Le tissu épousait juste son corps à la perfection et il relâcha doucement son bras pour faire glisser ses yeux sur la chute de rein du brun.

- Par contre t'étonnes pas si... Enfin si de nous deux c'est toi qu'on prend pour un gay, hein ?

Il releva son regard taquin vers Bill et celui-ci haussa un sourcil en inclinant la tête.

- Bin ça peux s'arranger ça, si tu veux on peut toujours échanger nos fringues gayboy.
- Rêve...

Ils gloussèrent ensemble d'une même euphorie et Tom s'adossa doucement à la cabine en plongeant ses rétines dans les siennes. Il était vraiment heureux pour lui. Heureux et puis très fier aussi, parce que c'était lui son meilleur ami et que les gens étaient définitivement idiots de ne jamais l'avoir jalousé. Parce qu'il y avait vraiment de quoi, Bill était exceptionnel et ce même dans ses joggings et sa doudoune jaune poussin...

- Alors, tu les prends ?

- Est-ce que tu poseras pour moi ?

- Va te faire foutre !

Bill explosa de rire et il sortit de la cabine en ronchonnant.




(...)




L'après midi était passé plus vite qu'ils ne l'auraient pensés et Bill avait passé toute la fin de journée à essayer ses fringues chez Tom, vidant ses sacs sur le parquet et multipliant les allers-retours entre la petite salle de bain et la chambre où il le dreadé l'observait depuis le matelas, assis en tailleur contre le mur en souriant.

Le blond avait donc finalement eu droit à son défilé et ils s'étaient amusés à échanger leurs vêtements, Tom se glissant dans les jeans moulants du brun et Bill dans les toiles de tantes du blond. Ils avaient parlé, rient, écouté de la musique et même dansé sur les compiles de funk que le dreadé gardait précieusement dans son armoire. Aby s'était également jointe à eux et Bill s'était amusé à se filmer en train de danser avec elle puis avec Tom à l'aide de son portable. Tout s'était dérouler à la perfection et l'étincelle dans les yeux du blond s'était remise à briller ardemment. Puis Tom s'était écroulé sur le matelas, transpirant et le souffle court, Aby s'était éclipser en prétextant être trop vieille pour se genre de bêtises et Bill avait ouvert le velux en grand pour se rafraîchir le visage en de grande bouffées d'air frais.

Dehors la nuit commençait lentement à tomber et il se hissa agilement sur le rebord de la fenêtre pour pouvoir passer sur la toiture. L'inclinaison du toit n'était pas vraiment prononcée et il s'assit simplement sur les tuiles fraiches, remontant ses genoux contre son torse avant de fixer le ciel pensivement. Tom le rejoignit bien évidemment quelques instants plus tard, l'engueulant d'être si peu prudent et se positionna à ses côtés, sans un mot de plus.

- Est-ce que tu regrette d'être partit ?

Tom tourna lentement la tête vers le brun et posa son menton sur ses genoux avant de répondre en chuchotant.

- Nan. Pourquoi?
- Comme ça...

Leurs mots n'étaient que murmures et Bill tourna finalement la tête vers lui, souriant doucement en posant sa joue sur ses genoux.

- Je regrette de pas t'avoir connu avant tu sais. On aurait surement été de supers potes étant gamins .

Bill se sentait nostalgique de l'enfance qu'il aurait pu vivre auprès de Tom, nostalgique de ces moments si nombreux qu'ils auraient pu partager, de ces moments de complicité et de cette enfance qui n'avait jamais eu lieu pour la simple et triste raison qu'ils n'avaient juste jamais eut la moindre conscience de l'existence de l'autre avant ces quelques semaines. Combien de soirée à danser sur des vieille compiles funky auraient-ils partagés ? Combien de nuits blanches auraient-ils passés à se raconter leur vie ? Combien de films, combien de séance au cinéma ? Oui, Bill était définitivement nostalgique. Il était nostalgique et ce simple fait, regretter une enfance inexistante et irrationnellement impossible lui donnait juste envie de se gifler. C'était tellement stupide. Il avait l'impression de penser aussi niaisement qu'une fille. Surement la lune ou l'atmosphère intime qui lui donnait ces pensées décousues. Conneries de lune...

- On en aurait surement fait voir de toutes les couleurs à nos parents ! T'imagine un peu?!

Deux sourires amusés prirent forme sur leurs lèvres rougies alors qu'ils s'imaginaient mentalement ensemble à six ans et Bill se rapprocha finalement de Tom, collant leurs flans ensemble et posant sa tête sur son épaule. Au diable la lune, il avait besoin de cette foutue nostalgie et temps pis s'il avait l'air d'une niaise.

- On aurait apprit à nager ensemble et tu te serais casser le bras en voulant faire du vélo sans roulette devant chez moi , chuchota-t-il joyeusement, appréciant la fumée blanche du à la chaleur de son souffle s'élever lentement d'entre ses lèvres.

Tom enroula son bras autour de sa taille et posa sa tête sur la sienne, souriant de l'imagination attendrissante du brun et décidant de rentrer également dans le jeu. Il plissa les paupières en fixant le ciel et réussit facilement à se faire une idée des deux gamins qu'ils auraient été.

- La maitresse nous aurait séparé en classe parce qu'on aurait jamais voulu parler aux autres enfants et Maman serait allé lui parler pour qu'on puisse se remettre côte à côte , continua-t-il en laissant son regard glisser sur la cime des arbres, devinant le sourire du brun qui enchaina rapidement en se rapprochant encore un peu de lui si c'était possible.

- Aby l'aurait surement accompagné pour essayer de draguer la maitresse et elle nous aurait remit ensemble dés le lendemain matin .

Ils rirent doucement de cette idée pour le moins plausible et Bill continua sur sa lancée, un sourire foutrement taquin collé aux lèvres.

- Et puis tu m'aurais acheté une poupée barbie pour mon anniversaire, mais j'en aurais pas voulu et tu m'aurais fait la gueule durant toute la soirée !

Un petit rire espiègle s'échappa de sa gorge et Tom lui pinça les côtes en s'esclaffant.

- Petit con ! Il hocha la tête en écoutant Bill glousser et détourna les yeux vers le ciel, amusé par ces souvenirs loufoques tout droit sortit de leur imagination. On aurait volé la boite de maquillage à ta mère et c'est moi qui t'aurais le premier noirci les paupières.

- On serait rentrés au collège ensemble et les profs nous auraient détestés.

- On aurait été se faire tatouer en cachète et c'est moi qui t'aurais apprit à dessiner...

Bill pouffa contre son épaule « Tu dessine comme une merde Tom. »

- Et alors, on a le droit de rêver nan ?

- Hum... Il ferma doucement les yeux en souriant et frissonna légèrement au contact du vent sur ses bras dénudés. Et puis tu m'aurais un jour avoué être tombé amoureux d'un garçon... Il sentit Tom se crisper légèrement contre lui et rouvrit les paupières en chuchotant plus bas. Et je t'aurais pas trahie, je t'aurais pris dans mes bras et à l'heure actuelle tu serais fier de ta différence.

- J'ai pas honte Bill.

- Mais tu te cache.

- Laisse tombé... J'ai pas envie de parler de ça maintenant. J'suis fatigué.

- Ok.

Tom resserra son bras autour de sa taille pour lui faire comprendre qu'il ne lui en voulait pas et Bill ferma les paupières en essayant de se concentrer sur la chaleur de son corps, histoire de réchauffer un peu le sien qui semblait frissonner de plus en plus avec son unique tee-shirt imprimé tout neuf et foutrement magnifique.

- Dis, Tom ...

Un léger sourire prit forme au coin des lèvres du blond en entendant de nouveau le ton timide de l'androgyne s'élever dans la nuit et il caressa doucement la peau de sa hanche du bout des doigts pour l'intimer à continuer.

- Si tu rencontrais vraiment un garçon, tu me le dirais pas vrai ?

Il gloussa en levant les yeux au ciel et resserra sa prise sur Bill.

- Te connaissant tu serais même surement au courant avant moi de toute façon. La question serait plutôt : « Est-ce que si un jour je me rends compte que t'es tombé sous le charme d'un mec, je pourrais te prévenir ? »

Ils rirent une fois de plus de leur connerie et lorsqu'ils regagnèrent la chambre, Tom imagina un instant qu'il était amoureux. Cette pensée le fit sourire d'amusement et il secoua la tête en se disant qu'en effet, Bill serait le premier à le remarquer si c'était un jour le cas. Il ferma son velux et raccompagna Bill à l'entrée.

FIN CHAPITRE 21

 

 

 

 

 

 

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