Chapitre 27
Il peut arriver qu'une situation que l'on considérait comme approximativement vivable devienne du jour au lendemain complètement infernale, au point d'en avoir peur et de redouter ses propres réactions face aux risques d'une éventuelle trop grande pression. Ou du moins pour Tom, d'une éventuelle trop grande restriction, dans ses gestes et dans ses mots quand lorsqu'il ouvrait les yeux le matin, pour se souvenir avec angoisse qu'il ne devait surtout pas reproduire dans la réalité les quelques bribes de rêves qui lui restaient encore de sa nuit, l'envie de tout envoyer en l'air lui brulait la poitrine.
Tout envoyer en l'air, ouais. Tout envoyer en l'air et Bill le premier. Oh oui.. Bill le premier avec qui il s'enverrait en l'air, à coup sûre.
Dans ses rêves c'était simple et sans équivoque. Des baisers, des caresses, des « je t'aime » et des « ne me quittes pas tu me rends tellement dingue ». Des « tu es magnifique » et « donne moi ta main », « je t'aime pour la vie » et « sors avec moi ». C'était pour tout ça qu'il ne voulait pas se réveiller, Tom. Pour les sourires, les caresses, les rires gênés et puis les carnets à dessins faisant follement l'amour aux appareils photo sur la bande son de Titanic, version cuivre bien sûre, avec les trompettes et les saxos qui accompagnent doucement les coups de reins d'un adolescent amoureux sous une couverture. Des rêves qui se mélangent et s'entrechoquent les uns aux autres pour éclater en de nouvelles images et de nouvelles mélodies, alors que les personnages, eux, restent invariablement les même. Deux ombres marchant pieds nus dans la rue et deux gloussements ivres, des vêtements imbibés d'eau qui s'alourdissent au fil des pas sur le macadam noir et une lune qui lève les yeux au ciel face à l'absurdité de certains gamins. Et puis la piscine, bien sûr, derrière, qui s'éloigne et devient presque indiscernable dans la nuit, lui et Bill. Lui et Bill et bordel de merde, c'est tellement bon un souvenir que l'on peut transformer à sa guise sans remords. Bill qu'il déshabillerait timidement prés du bassin et puis leur première fois dans l'intimité de l'établissement sombre et désert. Bill basculant sa tête en arrière sous l'impact tendre mais ferme de ses coups de reins, le dos acculé contre le bord et l'eau de la piscine éclatant à cadence régulière contre sa gorge diaphane, alors que leurs soupirs inaudibles ne perceraient jamais que le clapotis de l'eau.
Cette situation, Tom s'était dit qu'il la surmonterait. Des Bill plein la tête durant la nuit et des réveil matin aux côtés de son meilleur ami la plupart du temps roulé en boule dans ses bras à sept heure du mat'. Il l'avait vraiment pensé. Pensé très fort même. Peut-être aussi parce qu'il n'avait finalement pas d'autres choix que d'y croire dure comme fer...
Quoi qu'il en soit, il s'était trompé. C'était bien plus dur et déchirant qu'il ne l'aurait cru...
« Tu veux pas changer de disque un peu ? Du rock, ça serait bien du rock, nan ? »
Tom hocha négativement la tête sans même ouvrir les yeux et Andy geignit de désespoir en reposant mollement sa tête contre le parquet. Tom, Bill et lui formaient en ce moment même ce qu'ils aimaient appeler « l'étoile par terre ». Parce qu'ils étaient tout les trois étalés en étoiles et... par terre, et Tom inspira une grande bouffée d'air frais en rouvrant les yeux sur les poutres de son plafond.
« Tracy Chapman les mecs... » Murmura-t-il en frissonnant, les coups de médiator de sa chanteuse préférée résonnant dans ses tempes. « Rien ne vaut du Tracy Chapman. Vous verrez. Un jour vous ferez l'amour sur cette chanson...»
« Tu déconnes ?! » Andy pouffa en relevant les sourcils. « Jamais je ferais l'amour sur ce genre de chanson ! C'est trop... sentimental, nostalgique ou... Bref, appelle ça comme tu veux. »
« Et pour toi faire l'amour c'est quoi, tête de nœud ?! »
Bill pouffa à l'appellation de Tom avant qu'une main vexé ne vienne tirer à l'aveuglette une dread blonde derrière elle. « Regarde toi une seconde dans une glace et demande-toi c'est qui la tête plein de nœud, mon chou ! »
Bill leva les yeux au ciel. « Tom a raison, ta remarque est débile. Tu ferais l'amour sur du Claude François toi ? »
« Nan. Mais pas sur du Tracy Chapman en tout cas. »
« Tracy Chapman est une déesse » grogna Tom. « T'as juste des gouts de merde et aucun sens du romantisme. »
Une énième dispute digne de deux grands gamins débuta entre les deux adolescents et Bill fixa pensivement le plafond avant de doucement reprendre la parole. « Tu te vois vraiment le faire sur cette chanson ? »
Les deux compères se turent synchroniquement et Tom déglutit alors qu'Andy souriait discrètement sous cape.
« Ben... Ouais. Pourquoi ? C'est beau nan ? »
Bill laissa les notes couler lentement sur lui avant de sourire. « Ouais. C'est beau... »
Et le cœur de Tom vrilla sous sa poitrine.
Rien ne nous prédispose à savoir jusqu'où notre volonté de s'abstenir est capable de nous mener. Pourtant, Tom savait pertinemment que malgré la difficulté d'être dans l'obligation de taire son cœur, il ne pourrait jamais vraiment s'éloigner de Bill et de sa voix de gamin rêveur et curieux.
« Et toi ? » chuchota doucement Andy en souriant, faisant doucement froncer les sourcils du brun.
« Quoi moi ? »
« Bin t'as pas des fantasmes ou trucs du genre pour ta première fois ? »
Tom gloussa et Bill siffla. « Qui te dis que je l'ai encore jamais fait ?! »
Andy leva les yeux au ciel alors que la voix de Tom s'élevait taquinement dans la pièce. « Bill rêve surement de le faire dans un champs de clémentines, des épluchures d'oranges partout autour de lui ! »
Bill se releva sur son coude pour frapper l'une après l'autre les épaules de Tom et d'Andréas qui gloussaient désormais comme deux dindes. « Bande de con ! » Il se releva entièrement sur le plancher avant de leur tourner le dos en boudant. « Je vais pisser. Je reviens... »
Il disparue alors rapidement derrière la porte de la petite salle de bain et Tom souffla lentement le sourire aux lèvres, faisant progressivement taire son rire grave en même temps que celui d'Andy qui fermait maintenant les yeux de fatigue. Bill et ses clémentines. Toute une histoire d'amour... Tom croisa doucement ses bras derrière sa nuque avant de fixer pensivement un clou dépassant d'une de ses poutres au dessus de sa tête. C'était à double tranchant finalement. Le seul problème dans le fait d'être amoureux de Bill, c'était que même ce genre de taquinerie, clamer tout haut qu'il aimerait surement faire l'amour dans un champ de clémentinier, ça laissait dans son gloussement un amère sourire anéantit et saturé.
Car peu importe où Bill rêvait réellement de perdre sa virginité, Tom savait qu'il ne serait jamais là pour voir. Et ça, c'était dur à concevoir quand on voyait avec quelle facilité et logique ils s'étaient tous deux laisser croire qu'ils partageraient tout ensemble. Bill et lui étaient beaucoup trop proches pour que Tom s'en sorte indemne.
Lui savait.
Lui savait pertinemment ce qu'ils ne partageraient jamais ensemble. D'ailleurs il avait souvent l'impression de ne penser qu'à ça, à tout ce qu'il ne pourrait jamais faire connaitre à Bill parce que ça ne lui traverserait juste jamais l'esprit.
Alors la douleur dans sa poitrine qu'il avait pourtant réussit à éliminer durant quelques minutes revint sourdement élancer son cœur et Tom souffla longuement d'anéantissement avant que la tête d'Andy n'apparaisse soudainement près de la sienne, le faisant légèrement sursauter.
« Putain Andy ! Qu'est-ce qu'il y a ?! »
Alors que Tom grognait doucement en détournant le regard, Andréas posa pensivement sa tête sur sa main avant de doucement chuchoter. « T u te fais du mal tu sais... Et Bill se fait du soucis .»
Tom éradiqua machinalement la première partie de la phrase pour ne retenir que la dernière. « Comment ça du souci ? »
« Ben pour toi. Il dit que depuis votre concert tu t'es un peu éloigné et t'es tout le temps dans la lune et ça l'énerve carrément de pas savoir pourquoi. Je te jure que j'ai cru qu'il allait me péter une durite quand il m'a dit ça... T'aurais vu sa tête.» Andy pouffa doucement au souvenir de la tête de son ami. « Il est vraiment inquiet. Tu devrais lui parler. »
« Bill est comme ça, il se fait du mouron pour rien et tu le sais... »
« Ouais... » Andy défia Tom du regard durant quelques secondes de silence. « Je le sais comme je sais également des tas d'autres choses Tom. Ça pourra pas durer indéfiniment, fais quelque chose mon vieux... »
Et Tom eut juste le temps de sentir son rythme cardiaque s'accélérer que la porte de la salle de bain claquait bruyamment derrière lui, faisant rapidement s'éloigner Andy sur le parquet.
« Les gars ! J'ai mes règles ! »
Andy balança un énorme oreiller dans la tête idiote de Bill qui pouffait comme un gamin et Tom n'eut pas le courage de sourire à leurs conneries. Pourquoi est-ce qu'il avait constamment l'impression de s'enfoncer toujours plus profondément dans la merde ?
« Hé ! Ça vous dit un action ou vérité ? »
Ben voilà : Dans.la .merde.
( ... )
« Action ! »
« Mon pote t'es dans la merde. » lança Tom en gloussant, les sourcils relevés d'un air taquin face à Andréas qui fixait désormais le sourire de Bill d'un air effrayé. « Répondre action à Bill... t'es soit cuité soit complètement con. »
Il gloussa une fois de plus en se laissant retomber sur le matelas, impatient d'entendre le gage du brun qui, il le savait pour l'avoir douloureusement vécu, avait une imagination débordante dans ce genre de jeu.
Bill et Andréas se fixaient donc dans le blancs des yeux, se faisant tous les deux silencieusement face assis en tailleur près du corps inerte du dreadé et la sentence tomba comme une pierre dans l'eau.
« Aby est dans le salon, descend la voir et demande lui de te prêter sa plus belle culotte. »
Andy écarquilla lentement les yeux, Tom ferma rapidement les siens en plaquant sa main contre ses lèvres dans un fou rire silencieux et Bill continua en souriant. « Bien sur, il faudra que tu la mette devant nous... »
Et c'est de cette façon qu'un quart d'heure plus tard, après maintes tentatives d'esquives et supplications de la part d'Andy, les joues en feu du peroxydé se mirent à littéralement surchauffer sous le regard bouche-bée de ses deux enfoirés d'amis.
Andréas détourna timidement les yeux en rougissant d'avantage, Bill ayant juste un immense sourire hilare en travers du visage alors que ses yeux détaillaient avec jubilation la minuscule culotte de dentelle noire qu'il portait devant lui. Le brun lui fit alors silencieusement signe de faire un demi-tour sur lui-même et Andy s'exécuta en grognant, ses deux fesses blanches comme la lune recouvertes d'un tissus bien trop court apparaissant timidement devant eux.
Le sourire taquin du brun s'apprêtait alors instantanément à se transformer en un fou rire sans nom quand ses yeux se posèrent involontaires sur ceux de Tom assis à ses côtés.
Ils se posèrent sur lui comme ça, parce qu'il tournait doucement la tête en pensant le voir se marrer également et le sourire de Bill se figea lentement sur ses lèvres.
Tom avait le regard rivé sur le cul d'Andréas.
L'hilarité de la situation s'évapora instantanément dans son esprit et il détourna rapidement les yeux de son meilleur ami plongé dans ses pensées pour refixer Andy d'un air indéchiffrable. Qu'est-ce que Tom regardait comme ça ? Les fesses d'Andy étaient plates comme des planches à pain !
« Sérieux Bill, t'as pas intérêt à choisir action parce que je te jure que je te le ferais regretter jusqu'à la fin de tes jours... »
Le ton mi-sérieux mi-anéantit du blond platine le fit tout de même légèrement sourire et Tom gloussa doucement à ses côtés alors qu'Andy courrait rapidement dans la salle de bain se changer. Tom se tourna lentement vers lui en souriant.
« T'es culotté quand même, c'est Aby qui va encore se demander ce qu'on peut bien faire ici... »
Il gloussa comme un idiot et Bill agrippa doucement son tee-shirt pour poser la tête sur ses jambes et plonger son nez dans le tissus. « N'empêche que pour le coup, c'était pas moi le culotté ... »
Et la boule dans son ventre se dissipa légèrement en observant la gorge de Tom s'étirer dans son fou-rire.
(...)
« Vérité »
« Avec qui est-ce que tu te vois finir tes jours ? »
Tom fusilla discrètement Andréas du regard et celui-ci étira ses lèvres en un sourire entendu qui fit se serrer son estomac.
« Di Caprio ».
Andréas leva les yeux au ciel alors que Tom caressait toujours tendrement les cheveux de Bill allongé sur ses jambes.
« Bill, action ou vérité ? »
« Vérité... »
« Tu trouves pas qu'Andy est chiant ? »
« Si. »
Andréas écarquilla les yeux alors que Bill se relevait lentement sur le matelas en souriant. « Je déconnes. » Puis il fronça les sourcils en tournant brusquement la tête vers Tom. « Tu lui as dit ?!! »
Le cœur de Bill venait de louper trois battements en repensant à la réponse de Tom. Di Caprio... Andy était au courant pour lui ?
« Dit quoi ? »
« Ben... Que... Tu sais. »
Andréas sourit tendrement devant l'appréhension que Bill avait à l'idée de faire une boulette. « Quoi. Qu'il aime la queue ? »
Tom lui balança violemment son oreiller dans la figure et il tomba lourdement sur le matelas en riant. Le blond grogna à la vulgarité de ses mots et Bill referma simplement les lèvres sans rien dire.
Donc ... Tom lui avait dit.
Une boule se forma dans sa gorge et il se força mentalement à ne pas se comporter une fois de plus comme un gamin idiot, émotif et égoïste. Il bougea distraitement sur le matelas pour rapidement penser à autre chose et remercia mentalement le ciel de ne pas faire déraper sa voix lorsqu'il reprit la parole. « Tom, action ou vérité ? »
« Action. »
Andréas releva ses sourcils d'un air dubitatif. « Mon pote, t'as un pet' au casque?! »
« N'oublie pas que je suis son préféré, il me forcera pas à enfiler de culotte, moi ... » Tom se tourna vers Bill en souriant. « Pas vrai ? »
« Vrai. »
Et Andy secoua la tête d'un air désespéré alors que ces deux amis se fixaient désormais tendrement sans même se rendre compte du tableau qu'ils lui offraient. Avec un peu de chance, peut-être le choisiraient-ils comme témoin dans quelques années ? Aorf... Aby sera surement celle qui donnera les alliances, il se contentera juste de saouler les mariés après la fête. Le gateau devrait être à la fraise d'ailleurs, rien à foutre que tout le monde aime le chocolat. Il était le meilleur ami des mariés et il devrait avoir son mot à dire ! D'autant plus qu'après l'épisode de la culotte, se retrouver en présence de la tante de Tom risquait d'être assez comique si/
« Est-ce que tu serais d'accord si je te proposais qu'un jour on partage un appart' ensemble ? »
Andy s'étrangla avec sa salive alors que ses pensées se fracassaient littéralement la gueule à l'intérieur de sa tête et il toussa bruyamment dans sa main avant de relever des yeux exorbiter vers l'air sérieux de Bill et celui complètement... indéchiffrable de Tom.
Il fit alors successivement glisser ses yeux de l'un à l'autre, la bouche ouverte et les yeux en soucoupe. Bill à Tom. Tom à Bill. Puis explosa au bout d'interminables secondes.
« T'as dis quoi ?! »
Sa voix eut le don de faire revenir Tom sur terre et Bill continua doucement en se grattant l'avant bras. « Genre tu sais... Une colocation quoi... A deux. Vu qu'on projette de faire des études dans la même école, ça serait plus simple et surtout moins cher et puis... Puis je sais pas, je.../ Moi ça me paraissait logique alors... »
Un énorme malaise naquit soudainement dans ses yeux face à la non-réaction de Tom. « Enfin c'était juste une idée hein. C'est pas grave, j'avais juste pensé que... C'est pas grave, bref... »
Il détourna rapidement son regard de celui de son meilleur ami et pria ce Dieu auquel il ne croyait si foutrement pas de ne pas laisser ses yeux s'humidifier.
Et alors qu'Andy retenait son souffle et que Bill refoulait difficilement les larmes, Tom hocha doucement la tête en tournant les yeux vers lui. « Ouais. Ouais évidemment. »
Un sourire tendre étira alors ses lèvre en voyant Bill faire de même d'un air vraiment soulagé et il se gratta doucement l'avant-bras en se forçant à rire. « Je sais même pas pourquoi tu pose la question d'ailleurs, pour moi c'était déjà tout vu ! Tu te débarrasseras pas de moi aussi facilement ! »
Et Andy observa Tom mentir pour la première fois.
Il observa Bill se jeter dans ses bras, un immense sourire aux lèvres, débitant à une allure follement ahurissante tout ce qu'il projetait déjà de mettre dans leur futur appartement, la voix euphorique et les yeux brillants d'anticipation et sa gorge se noua de peine en voyant les yeux de Tom se perdre lentement dans le vide, eux bien plus ternes alors que l'androgyne resserrait ses bras autour de son cou.
Tom venait de mentir et Andy s'en voulu. Vraiment. D'avoir lourdement essayé de le faire réagir durant toute la soirée à propos de Bill alors que c'était bien plus compliqué que ça.
« Bon... Bin je vais y aller les gars. »
Et l'humidité dans les rétines du dreadé le poussa à se relever en souriant d'un air mal à l'aise.
« Mes parents m'attendent et quand Bill s'accroche à toi comme une moule à son rocher on aurait le temps de tuer un âne à coup de casquette qu'il se serrait toujours pas décroché ! »
Bill se décolla alors de Tom en riant et ce dernier pencha discrètement la tête en arrière pour éliminer l'humidité de ses pupilles avant de rire à son tour et de se relever en indiquant à Bill qu'il allait le raccompagner en mobylette.
Le brun acquiesça d'un hochement de tête et s'approcha du blond platine pour lui faire la bise et lui souhaiter bonne nuit. Puis il se retourna pour s'élancer sur le lit d'un bon, rebondissant sur le matelas avant de s'enrouler comme un boudin dans la couette.
Tom l'observa fermer les yeux en souriant et fut heureux que Bill ne soit pas aussi tactile et complice avec les autres qu'avec lui.
( ... )
« Tom... »
« Quoi. »
Tom attrapa silencieusement le casque que lui tendait Andréas désormais debout sur le trottoir devant son immeuble et releva rapidement les yeux vers un point invisible en face de lui alors que ses doigts s'enroulaient déjà autour de l'accélérateur. Il ne voulait pas en parler. Il ne voulais foutrement pas en parler et de toute évidence, Andy n'était pas de cet avis...
« Au pire qu'est-ce que tu risques... » Il inclina légèrement la tête pour intercepter le regard de Tom. En vain.
« Même si c'est pas partagé tu sais parfaitement que Bill te laisseras jamais sortir de sa vie. »
Tom eut un rire amer mais ne détourna pas les yeux de l'horizon pour autant. « Je sais. Je le sais parfaitement ça... »
Il releva alors sa main droite pour se gratter nerveusement le menton et se força à sourire quand les larmes se mirent à lui brouiller la vue et que son menton trembla de manière incontrôlable. « Je le sais je.../ » Il était tellement épuisé par tout ça... Retenir une chose si énorme et si belle à l'intérieur de lui alors que c'était tellement logique qu'il soit tombé amoureux de Bill. Que c'était tellement logique et irrémédiable, légitime et bourré de bon sens. « Je le sais très bien qu'il sera toujours là. Et c'est peut-être ça le pire... »
Andréas se pinça les lèvres en baissant les yeux et Tom secoua vigoureusement la tête avant de se tourner vers lui, lui assenant un coup amical sur l'épaule en souriant faussement et démarrant rapidement la bécane après un dernier clin d'œil et « Te prends pas la tête avec ça. Ça va aller... »
Il s'élança alors sur le bitume noir et Andréas observa la moto disparaitre au loin avant de pensivement shooter dans un caillou en tournant les talons.
« Ouais... Prends-moi pour un con. »
( ... )
Tom laissa silencieusement choir son manteau sur le sol de sa chambre et referma lentement la porte derrière lui. Bill n'avait pas bougé d'un millimètre depuis son départ et semblait dormir comme un loir sur son matelas, les pieds encore dans ses baskets dépassant du lit et les bras surement plaqués le long de son corps filiforme dans la couverture faisant de lui un sushi endormi.
Tom s'adossa pensivement à sa porte avant de se laisser lentement glisser contre celle-ci. La pièce dépourvue de lumière lui donna un instant le tournis et il ferma lentement les yeux en posant sa tête contre le bois brute alors qu'il touchait le sol.
Bill ouvrit silencieusement les siens quelques mètres plus loin...
« Tu me mens... »
Il vit Tom relever la tête vers lui et murmura de manière légèrement plus audible. « Tu me mens en me disant que tu vas bien et je déteste ça Tom... »
Ils se fixèrent alors durant de longues minutes. De longues minutes sans qu'aucun des deux ne détourne les yeux de l'autre et jamais Tom ne répondit.
Il attendit simplement que l'effet de nausée le quitte puis se releva doucement du sol pour le rejoindre dans le lit, le recouvrant simplement de son corps en s'enroulant autour de lui, ses baskets humides et froides toujours au pied, dépassant du matelas et entrelacées à celle du brun.
Bill ferma les yeux en sentant le corps de Tom s'affaisser contre lui et ronronna lorsque son torse s'écrasa contre son dos, le nez du blond se calant machinalement dans son cou alors que son souffle glissait agréablement jusque sur sa clavicule.
« Ça va... Je t'assure. »
Et ils fermèrent tout les deux les yeux pour sombrer dans un sommeil sans rêves.
Ce fut le deuxième d'une longue succession de mensonges...
FIN CHAPITRE 27